Mespretz parisenc toustém Tederic M.

- Tederic Merger

"Provinciau", de Sèrgi Javaloyès :
http://avoste.com/2015/02/19/provinciau/

Grans de sau

  • Praube Sèrgi ne sap pas que escribe desempùch quauques semmanes sus A Voste ! Qu’a ue pensade tourcude !

  • Les observations de Sèrgi Javaloyès sont hélas bien fondées.

    Il est loin le temps où Arthur Conte, ancien président de l’ORTF, déclarait avec l’accent du cru sa fierté d’être d’abord catalan : "Je pense en catalan, je rêve en catalan..."

    Vous pouvez écouter cet émouvant témoignage sur :

    http://television.telerama.fr/television/deces-d-arthur-conte-ancien-president-de-l-ortf,106708.php

    Sèrgi Javaloyès cite opportunément les auteurs classiques.
    J’ajoute :
    La France du XVIIIe s. est faite de cercles concentriques, l’enfer étant dans les provinces les plus éloignées, marches et terres d’exil. Au cœur du système, la Cour puis les salons et les clubs, les cafés, la Convention. Point n’est besoin de civisme, puisque « regarder vers Paris est un acte rationnel » (E.-J. Hobsbawm). Le mimétisme tient lieu de foi nationale.
    Montesquieu constatait : « C’est surtout une grande capitale qui fait l’esprit général d’une nation ; c’est Paris qui fait les Français ; sans Paris, la Normandie, la Picardie, l’Artois seraient allemandes comme l’Allemagne ; sans Paris, la Bourgogne et la Franche-Comté seraient Suisses comme les suisses ; sans Paris, la Guyenne, le Béarn, le Languedoc seraient espagnols comme les Espagnols » (Cahiers, III).
    Mais en son temps Bordeaux était encore une vraie capitale, pas une "préfecture" ou une "métropole" fonctionnelle.

    Mais au temps de Molière, lequel se moqua fort de M. de Pourceaugnac (tandis que la noblesse du Limousin venait d’être mise au pas), Paris (ville longtemps rebelle, matée elle aussi comme le reste du royaume) avait encore quelque chose à dire, une haute civilisation à proposer.
    Responsables de cet état de fait, hormis la règle normale qui fait de l’histoire une suite d’acculturations au bénéfice du plus puissant ou du plus séduisant dans l’ordre de la civilisation ? Une pensée politique spéciale sans doute, mais surtout une cléricature hors-normes comme aujourd’hui, mais celle d’aujourd’hui plusieurs degrés plus bas que les fonctionnaires royaux ou républicains. On lui a ouvert le passage, elle en profite.

    Différence avec la Russie du XIXe s. telle qu’elle apparaît sous la plume des écrivains : le fonctionnaire passe sa carrière à se languir de Petersbourg dans une très lointaine province, mais il est sensible à la nature du peuple russe, la sienne.

    Regardez aujourd’hui ce que proposent et imposent les gens de la "communication" au peuple qui leur paye la redevance (capitation ? , taille ?). Quel est la part du "provincial" là-dedans ? Et quelle est la part du vrai ou simplement de l’honnête ? Nous sommes loin de Molière, de Racine, de La Fontaine en son exil provincial ou de Mansart.
    On a dû changer le personnel.

    Il faut être aseptisé et conforme au modèle sans attaches, déraciné et docile. Cette pathologie sévit dans les gros médiats et les milieux du shobiz, est véhiculée par les manieurs de mots officiels. C’est une idéologie (même sans le mot) en actes.
    L’aliénation institutionnalisée et intériorisée frappe partout (dernièrement les gens du Nord caricaturés par des pseudo-Chtis de cinéma).
    L’accent moqué et refoulé est le dernier signe de l’assimilation-destruction.

    Pourtant de nombreux français fuient Paris et ses lumières. Au prix du m2 il n’y restera bientôt plus que les grands Médiatiques. Comme au centre de Bordeaux, etc.

    L’opposition entre "Paris" et la "Province" n’y est pour rien. Ce qui constitue l’opposition, et crée le malaise, c’est l’acculturation générale due à l’imposition de normes individuelles de comportement dans lesquels les appartenances régionales sont non seulement un handicap mais une tare, une mauvaise prédisposition.

    Le préjugé qui faisait rire (le plus souvent gentiment) il y a quarante ans aux dépens des Provinciaux et aussi des Parisiens n’a plus vraiment cours aujourd’hui : dans un pays sans accents, sans distinctions, sans référents ethniques, il n’y aura même plus de place pour la plaisanterie.
    Nous allons vers des zones d’habitat privilégié et vers des zones de ghettos (riches ou pauvres) sous le contrôle plus ou moins intéressé d’instances régionales redistributrices.

    Donc : urgence de promouvoir les appartenances réelles, durables et héritées, celles de la longue durée, et ne pas polémiquer sur des préjugés, seulement construire en dehors.
    Ne pas chercher à se faire respecter en tant que Provincial mais en tant que Gascon, membre d’un peuple (et individuellement, mais ça, c’est autre chose...).
    L’agressivité nécessaire doit s’investir dans la (re)construction d’un modèle, dans la réponse au dérèglement qui a produit la situation actuelle.
    Le "logiciel gascon" dans son cadre civilisationnel européen fait partie de cette réponse.

    L’article de Sèrgi Javaloyès permet de revenir sur cette thématique de l’organisation des espaces, de la taille des circonscriptions administratives, du rôle des citoyens, de leur contenu, préoccupations du Manifeste gascon, ici http://www.gasconha.com/spip.php?article170.

  • Je pense assez que cette histoire de mépris parisien est très datée. Il est réel mais il me semble absolument dépassé de nos jours, pour expliquer la réalité contemporaine.

    Le problème, c’est moins le mépris parisien que le mépris métropolitain de nos grandes villes, qui se veulent des Paris et ne conçoivent leur survie qu’en distance de trajet en TGV à la capitale. Je suis désolé mais 2014 restera l’année de la trahison de Bordeaux et Toulouse, phénomène que j’observe depuis 10 ans, aux premières loges puisque je fréquente ces métropoles.

    L’autre problème, c’est l’absence de patriotisme local qui permettrait de ne pas ressentir avec tant d’acuité le mépris parisien. Car, d’une certaine manière, j’ai envie de dire que nous méritons le mépris de Paris. Car nous ne disons plus rien. Nous ne créons plus rien.

    Il n’y a pas si longtemps, Paris nous admirait. Venait chez nous chercher un certain exotisme, un caractère ethnique, des paysages, un art de vivre, une identité. Nous n’étions finalement pas si méprisés que cela. Caricaturés, certes, mais là où il y a caricature, c’est qu’il y a substance.

    Que dire des Gascons d’aujourd’hui ? Plus généralement des gens du Sud-Ouest ? Plus grand chose. Oui, nous méritons le mépris.

    Les Basques se foutent du mépris de Paris. On ne les entend pas geindre. Ils avancent, avec les outils que la technostructure française daigne concéder. Le misérabilisme leur est étranger.

  • Je crois que nous trouver le mépris des "parisiens" c’est encore nous accorder une certaine importance. La vérité c’est que les parisiens s’en foutent complétement. Ils viennent, achètent des maisons que nos jeunes ne peuvent plus payer. Ils viennent et achètent les commerces, les petites entreprises artisanales que nous ne voulons plus occuper. Ceux-là établissent des contacts avec les autochtones, les autres sont indifférents, veulent des vacances, la mer, "du beau temps" nous engueulent s’il pleut (l’Aquitaine). Je suis totalement d’accord avec Vincent même si c’est pessimiste. Nous devons raisonner à partir de notre réalité et cesser d’intérioriser notre domination.

  • Le trait le plus spectaculaire qui reste de la différence gasconne (ou "Sud-ouest" ou "Midi"), c’est l’accent.
    C’est lui qui permet de détecter à coup sûr une origine, un vécu régional, après seulement deux ou trois mots prononcés.
    Or, un fort accent régional fait rire ceux qui sont le plus dans le moule national français* ; il est donc senti comme ridicule ; je l’ai constaté par exemple dans le TGV Bordeaux-Paris à l’annonce d’un contrôleur.

    Je n’entrerai pas dans une discussion pour savoir si les rires sur l’accent sont une forme de mépris.
    Mais il me semble que ces rires sont blessants. Et ces blessures ne sont pas "méritées".

    * Je dis "parisien" pour simplifier - Bordeaux et Toulouse doivent leur fortune présente en partie au fait d’être des antennes de Paris. Elles ne portent pas ou presque pas de patriotisme régional ; je le regrette avec Vincent.

  • C’est pour celà qu’il est important d’entendre de pouvoir entendre notre accent venant de voies (et voix) officielles. Quel regret de ne plus entendre le cardinal Marty, ou le dirigeant communiste Jacques Duclos -qui lui, avait fait la faute de dire "hei Hitler" en entendant parler Mendès France. Et aux actualités régionales, on se reconnait de moins en moins dans l’accent des présentateurs ! Heureusement qu’il y a les annonces du métro de Toulouse pour nous revigorer.

  • Desencusatz-me, romeguèt pas contra Mendès-France, mès contra lo mosellan Robert Schuman.

  • Robert Schuman, que certains hommes politiques, dont un général deux étoiles, avaient surnommé "le Boche"...

    Le temps n’est plus en effet où la Province fournissait motifs aux artistes françois, peintres et musiciens. La veine rurale dans la culture française a eu ses heures de gloire. Après 1918 elle se doublait d’une nécessité démographique.

    Tout cela est fini. L’indistinction des territoires amène leur rationalisation, leur évaluation comptable : prix du m2, moyenne de pluviosité, de température, coût de la vie, moyenne des taxes, accessibilité des transports, écoles, soins, loisirs, ce sont les seuls critères qui les définissent a priori et sont devenus leur identité, affectée d’un label : "les villes où il fait bon vivre en France", "petite cité de caractère", etc.
    Elles sont enfin gérées.

    La population est tout aussi déqualifiée. Les "primo-arrivants" choisissent leur implantation (pour ceux qui en ont les moyens). Ne pouvant se payer Saint-Barth ou les Caïmans, on accède à la côte landaise, l’exotisme des classes moyennes.

    L’alignement des comportements est général. Mais un écolage de plus de deux siècles, ça se paye.

    Dans la conformité réalisée toute liaison entre la langue (ou l’accent) et le territoire est ressentie comme une perturbation, et condamnée.

    La population autochtone participe au mouvement, y consent, s’en fait l’agent aussi bien que les autres.
    Il n’y a plus de résistances.


Un gran de sau ?

(connexion facultative)

  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Ajouter un document

Dans la même rubrique :


 

Sommaire Noms & Lòcs