LA TINDA : la sonnaille ? jmcasa

La monnaie locale complémentaire choisie par les Occitanistes en Béarn porte le nom de : "TINDA".
Il parait que c’est le nom d’une sonnaille pour le bétail. Connaissez-vous ce nom ? Introuvable dans les dictionnaires consultés, version papier ou en ligne... un néologisme ?

P.-S.


[JM, j’ai transformé votre proposition de mot gascon en "gran de sau" : nous ne savons pas encore si "la tinda" est digne de figurer dans les mots gascons de Gasconha.com...
Tederic, webmèste]

Grans de sau

  • Pas vu dans les dictionnaires non plus, pas davantage chez JJ Cazaurang (in "Scènes de la vie rurale en Béarn", ouvrage pourtant assez bien documenté)... En matière de sonnailles attachées au cou des vaches (explication donnée pour "tinda" dans la République du 8/9/14), il mentionne les termes génériques "metaou, metale" puis, par ordre (des cloches les plus graves aux plus aiguës) : metaou campanè/sourdo, picarde, bourdalés, metalots, metaletes, esquiretes, esquirous, tringuirous.
    Mais de tinda, point. Je m’interroge donc tout comme vous sur l’origine du terme.

  • Curieusement, parmi les noms proposés pour cette monnaie locale, c’est celui dont la gasconitat ou la biarnesitat était la moins évidente. Parmi les autres, il y avait par exemple le "beròi"... Trop connu peut-être ?

    Je ne crois pas avoir rêvé, il me semble avoir lu dans les commentaires à ce sujet que "tinda" voulait dire "courge" dans une langue de l’Inde. Et d’ailleurs, il n’y avait pas de raison que les mots soumis au vote soient tous biarno-gascons.

    De toute façon, même si on trouvait une attestation biarno-gasconne de ce mot "tinda", il est vraiment tombé dans l’oubli, et n’évoquera rien ; de plus, comme d’hab, la graphie avec un "a" final fera mettre l’accent tonique sur le "a".

    Finalement, je crains une nouvelle monstruosité dans la série "route de l’Abelha" ou "Honha".

  • On trouve dans le dico de Simin Palay :
    "tindà,-tà" ; v.- Tinter, dreliner ; résonner ; bouts tindante, voix sonore, éclatante.

  • Il y a aussi chez Pèir Morà le mot "Tindalh":m. truc de campaneta, de cascavéth ; tintin ; sonoritat.

  • Sera prononcé comme le nom d’une éventuelle quatrième caravelle du premier voyage de Christophe Colomb.

    Du reste, imitation servile de l’eusko, qui me semblait déjà un peu ridicule, bien qu’on me dise ça et là que ces monnaies privées sont utiles.

    Je n’ai jamais pensé que l’identité passait par ce genre de gadgets, et certainement pas à l’heure où l’Eurozone partage une même monnaie.

  • L’idée de monnaie locale n’est pas ridicule dans l’absolu. Personnellement j’avais caressé l’idée il y a une trentaine d’années, mais j’ai parfois été utopiste...
    C’est une idée révolutionnaire ; elle est en rupture totale avec la délocalisation de notre économie, qui a atteint un degré jamais atteint auparavant.
    Elle s’inscrit dans une aspiration à la relocalisation, que je partage.

    Maintenant, commencer par la monnaie n’est peut-être pas le plus facile.
    D’ailleurs, si ça marchait vraiment, c’est-à-dire si ça dépassait le fonctionnement d’une fidélisation commerçants/clients, il y aurait vite conflit avec l’ordre monétaire légal, je suppose.

    Mais ne décourageons pas ceux qui mettent la main à la pâte !
    Et concentrons-nous sur la critique de ce nom mystérieux ! Le choix des noms... on est au coeur de la problématique "Gasconha"...

  • Dans la perspective de relocalisation des échanges qui est bien celle de ces monnaies locales "privées",on a visiblement raté l’occasion de donner un nom qui rappelle quelque chose à beaucoup de gens.Tiens,par exemple et tout bêtement ,l’"escut" puisque le nom d’ECU(European currency unit) est vacant depuis que l’union Européenne a préféré l’"euro"...Peut-être est-il encore temps de revenir sur cette mauvaise bonne idée de "tinda" ?

  • Que’vs tròbi un chic sevères aquí. Ne cau pas criticar entà criticar. Ni préner los occitanistes de Biarn per colhonàs ! Se "tindar" i a, qu’i diu aver lo nòm, forçat. Que’m pensi plan "la tinda" que diu aver un arradic precís. Los dialèctes que son tan rics, ne pòden pas trobar tot en los diccionaris. Entà balhar sens a "tinda", que vei en lo diccionari de Pierre Méaule per le Gran Lana :
    Tincle sf : objet brillant, enjoliveur en métal brillant

    Alavetz, "tinda" que’u diu tànher, totun.

  • Comme Tederic, je pense qu’il y a plus qu’un gadget derrière un projet de monnaie locale complémentaire.
    Du point de vue socio-économique, ce peut être un instrument puissant, si l’on veut bien le prendre au sérieux. Je parle en général, je ne connais pas le projet "tinda".

    J’invite à réfléchir sérieusement à ce qu’une monnaie doit être pour vous. Et à ce qu’est l’euro par exemple.

    En ce qui me concerne, j’estime que la monnaie est un facilitateur d’échanges réels, instauré et contrôlé par la seule communauté de ses utilisateurs concrets, dont elle sert les besoins. Il me semble que les monnaies "sérieuses" s’éloignent de cette définition.

    Pourquoi un échange local doit-il suivre les règles monétaires du seul marché financier international, comme :
     la référence au dollar US ?
     les cours boursiers internationaux des devises ?
     les intérêts des états centraux ?

    N’y a-t-il pas la place pour deux rythmes, deux monnaies en parallèle ?

    Par exemple :
     faire son marché "frais" : viande, légume, oeuf, fruits etc...
     faire travailler un artisan ou un commerçant du coin : peintre, plombier, marchand de journaux, bistro...

    Ces échanges doivent-ils s’appuyer sur des équilibres internationaux ? Pour moi, la réponse est non, clairement.
    Gagneraient-ils à fonctionner bien plus en circuit court ? Pour moi, oui, clairement.

    En achetant avec une monnaie locale, vous disposez d’un outil puissant pour sélectionner les acteurs économiques locaux.

    Notamment en zone rurale ou en quartier "pauvre", personne n’a intérêt à notre développement, sauf ces quelques acteurs locaux. Le système officiel veut des déserts économiques et des zones hyperproductives. Il n’a pas de place pour une logique de proximité et d’équilibre comme celle d’un village un d’un quartier vivant, ce sont des abérrations pour lui. Une clientèle locale et un producteur local qui se lient de fait en utilisant une monnaie spécifique peuvent lui dire merde.

    Or la Gascogne, inexistante officiellement, largement rurale, terre d’équilibre entre action et beauté, est pleine de territoires ou d’échanges qui n’intéressent pas la mondialisation...

  • A moins qu’il y ait eu une erreur de lecture entre "cl" et "d"...
    Continuons donc à chercher ce nom commun "tinda" prononcé bien entendu "tinde", "tindo" ou à la rigueur "tinda" mais avec l’accent tonique sur "tin".
    "tinda" a été choisi par 48 voix contre 46 à "lutz" :
    http://www.larepubliquedespyrenees.fr/2014/09/08/la-monnaie-bearnaise-est-baptisee-la-tinda,1209200.php

    Renaud, digun n’a considerat aci que los occitanistas de Biarn e son colhonàs ; benlèu mema que ne vengot pas d’aqueths occitanistas, aquera tinda ? mès qu’am totun lo dret de sàber d’on ei sortida !

  • Le nom est-il bien choisi ?
    A nouveau, il faudrait connaître l’histoire et la portée de ce projet en particulier, sur lequel je ne me prononce donc pas.

    Mais comme béarnais, je n’aurais rien eu contre un retour des "baquettes". Le Béarn peut se targuer d’une histoire monétaire réussie, c’est pas donné à toutes les régions.
    La monnaie frappée à Morlaas fit référence au Moyen-Age, bien au-delà du territoire béarnais.

    Escut c’est simple, typé et compréhensible. Donc pour le nom d’une nouveauté très bien.

    Sur le vocable tIndo, on retombe sur ce sempiternel trébuc du "a" final posttonique. Pas franchement judicieux et qui ne va pas manquer de parasiter la communication.

    Bam, pro debizat : hèyt key.

  • Sue les monnaies alternatives de divers types(ultra-libérales ou au contraire "alternatives" sociales ou locales telles le sol violette à Toulouse ou l’abeille à Villeneuve sur Lot) lire
    www.alternatives-economiques.fr/le-boo
    ou fr.m.wikipedia.org/wiki/Monnaie_locale
    sur l’eusko :
    www.bastamag.net/Pays-basque
    ( tous phénomènes interessants mais à ne pas surestimer:en 18 mois les utilisateurs de l’eusko par exemple ne dépenseraient en euskos que l’équivalent de 8 EUR par mois...)

    Par ailleurs les occitanistes du Béarn ne me paraissent jouer aucun rôle dans cette histoire sauf peut-être avoir proposé des noms,tous supposés en Gascon du Béarn(avec la question de ce bizarre"tinda" que personne ne semble comprendre !).Le projet est porté par l’Association "de la main à la main" apparemment créée et animée par une bibliothécaire de¨Pau appelée Eva Savaurieau.

  • Merci pour tous vos commentaires et analyses. Il n’en demeure pas moins que ce terme est inconnu des locuteurs et des dictionnaires ! Il ne reste plus qu’à demander à l’association responsable d’expliquer ce choix étrange et très mystérieux...

  • Oc, Gerard, a jo tanben "l’escut" que’m pareish ua evidença. N’estot pas, mema, prepausat...

    * sculpté sur la cheminée de la salle de séjour de la villa "L’Autan" à Hossegor

    Hossegor la basco-landaise

  • Ayant contacté l’association pour avoir son éclairage sur ce mot de "tinda", l’un de ses membres a eu la gentillesse de me faire une réponse dans un bref échange de mails, dont voici reproduits les principaux éléments :
    "(...) Il est vrai que ce mot n’apparaît pas sur les dictionnaires existant (comme certainement beaucoup d’autres mots oubliés par l’histoire de notre langue). C’est une personne extérieure à l’association qui l’avait proposé. Cette personne a une parfaite maîtrise de la langue parlée et écrite (...)". Suivait la copie d’un "texte explicatif" destiné au site de l’association (mais que je n’ai pas pu retrouver sur celui-ci). Le voici in extenso, puisqu’il était a priori destiné à une diffusion publique :
    "La Tinda qu’ei aquò ? La Tinda c’est quoi ?
    La tinda vient du verbe "tindar" qui signifie "tinter" en français. La tinda est donc un tintement, c’est la sonnante, un son de clochette et par extension une cloche. Il faut savoir que les grosses cloches que l’on trouve dans les clochers d’église sont communément appelées "campanas"(le a final est prononcé presque comme un -e ou un -o selon le coin en prenant soin de forcer l’accent sur la première syllabe). En revanche les cloches portées par les bêtes ont des tas de noms en fonction de leur taille et du son qu’elles produisent en particulier en montagne. On trouve l’esquira, l’esquireta, l’esquiròta, lo metau, lo metalon, lo picon,... Des tas on vous dit ! La Tinda c’est une façon imagée de donner un nom générique (appliqué à tous) à toutes ces petites cloches et de faire référence au son qui ondule et se propage aussi bien dans les montagnes que dans les plaines béarnaises. En proposant des noms de cloches bien spécifiques on aurait pu voir naître des querelles linguistiques entre vallées, collines, villages, ou voisins. Mais notre objectif est bien de rassembler les béarnaises et béarnais autour de leur monnaie. Et la Tinda doit être à l’image du son ondulant dans l’air, elle doit circuler dans tous les sens."

    La tinda est donc un tintement

    En demandant à cette personne s’il s’agissait bien, en résumé, d’une forme non attestée, bref, d’une création par association d’idées, elle m’a fait le complément suivant (en signalant n’avoir elle-même pas voté pour Tinda) : "Après recherche, d’autres mots dérivés du verbe Tindar comme “tindaire” existent aussi. Il n’est pas exclu que le nom commun “tinda” soit employé ou ait été employé quelque part en Gascogne. Car que ce soit dans le Palay ou sur l’atlas linguistique il manque forcément des mots. Nous n’avons pas une académie de la langue comme le français, la création est donc permise. Une expression comme “un còp de tinda” ne me choquerait pas par exemple. Je vais sonder les anciens dans mon village".

    Bref, jusqu’à preuve du contraire, j’en déduis que cette substantivation d’un infinitif relève bien d’un néologisme. A chacun de se forger son jugement sur la pertinence de la décision !

    [G.]

  • Adixat munde,

    Je ne parle pas très bien patois, je suis à des années lumières de maîtriser la langue à la manière des savants comme Simin Palay qui ont écrit les dictionnaires.
    Et pourtant, du peu de langue vive que j’ai reçu, il peut m’arriver de connaître un mot, ou une signification d’un mot qui ne sont pas dans les dictionnaires.
    Je n’irai pas jeter le dictionnaire pour autant, ni ne renoncerai-je à mon mot.

     C’est une langue spontanément créative par suffixation, métaphores, onomatopées...
     C’est une langue riche de dialectes nombreux et pourtant intelligibles, qui conservent chacun des éléments de langage perdus ou non-apparus ailleurs, comme autant de richesses,
     Les dictionnaires gascons pour éminents qu’ils soient, sont relativement peu nombreux, et géographiquement, ils ne couvrent pas le pays de façon égale.

    Alors peut-on aborder cette langue comme le français, avec le dictionnaire comme référence ultime ? Je crois la chose difficile, pour les raisons ci-dessus.

    Le doit-on ? Mon sentiment est que non. Au contraire :
     son élaboration décentralisée, sur chaque recoin du territoire,
     le fait qu’elle procède d’une mémoire collective répartie au sein du peuple, tous métiers et classes sociales confondus,
     le degré raisonnable de liberté qu’il laisse au locuteur et qui le rend si vif et plaisant,
    Ce sont je crois des raisons de fond pour la sauvegarde de cette langue, notamment vis-à-vis du français.

    Comme de pouvoir faire face au flux de nouveautés de notre temps en créant des mots nouveaux spontanément sans attendre que l’académie recoure laborieusement aux racines grecques et latines, c’est un bel avantage !
    "pincho-cu" c’est quand même autre chose que "discothèque" non ?

    Je fais une analogie avec le chant dans les vallées. Il est ce qu’il est et résonne si profond en nous par ce qu’il est un élan spontané, collectif, indivis entre tous. Le jour où il devient l’apanage de musiciens spécialisés et de groupes constitués, on perd l’essentiel. On perd notre plus-value, notre place singulière parmi les peuples et l’on devient des européens amateurs de musique et de chanson comme les autres.

    Vous aurez compris que je crois qu’il en est de même pour le parler, le jour où les dictionnaires ne servent plus à recueillir le trésor de la parole vive mais à la limiter, nous serons définitivement francisés dans notre approche.

    Puisse-t-il me pardonner mon audace, j’irai jusqu’à faire dire à Simin Palay qu’il n’aurait pas voulu que l’on fasse cet usage-là de son grand-oeuvre.

  • Bèth messatge que lo d’Artiaque.
    Que m’aduvi plan dab eth. "LA tinda" per jo, e que’m sembla clar e evident, que pòt estar lo nòm d’ua esquira. Be n’i a tant !
    Entà collectar (estants un collectaire de memòria, e en gascon), que vs’ic dic : mots dont ne son pas en los diccionaris, que’n tròbi un bèth tròç, e quasi cada semana. Qu’es mau conéisher le lenga, e sustot le varietat tan rica deus dialèctes, que de díser "n’es pas en lo diccionari, qu’es un neologisme".

    A nòste, qu’èi tostèm entinut díser "un escoupitiot" entà díser lo francés "un ramequin". E totun, n’at èi pas vist enlòc en nat diccionari d’on que sii. Le mia gran mair, be se l’avè divut inventar...


Un gran de sau ?

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