Les Holagray, une généalogie bordelaise Le peuple des négociants de Bordeaux

- Vincent P.

Les Holagray sont une vieille famille bordelaise, dans le négoce : l’étude de cette famille est intéressante dans ce qu’elle dit du caractère régional et local des habitants de Bordeaux, avant les mutations profondes de la fin du XIXème siècle.

Voici un extrait de la généalogie des Holagray : HOLAGRAY sur Geneanet.org

Génération 1

Au XVIIème siècle, David Holagray épouse une Dupré, c’est un couple protestant, qui appelle leur enfant Isaac. Restent-ils protestants par la suite de la lignée ? Je n’en sais rien, les prénoms ne l’indiquent pas, pas plus que les alliances bordelaises.

Pour ce qui est du patronyme Dupré, on ne peut rien dire, les traductions étaient à l’époque assez répandues.

Génération 2

Isaac Holagray épouse une Marianne Lesboris, fille de Gaspard Lesboris et Anne Bancons. Le patronyme Lesboris a disparu mais il est clairement la forme neugue du patronyme Lasbories. Bancons existe toujours : c’est un patronyme de Chalosse, qui confirme l’origine "landaise" au sens large de cette Marianne Lesboris.

Génération 3

6 enfants. Les alliances sont intéressantes. Nous sommes au milieu du XVIIIème siècle et il semble que la famille s’est fixée au Mas-d’Agenais.

Une fille épouse un Jean Brau. C’est un patronyme soit gascon soit languedocien, très répandu notamment dans les Hautes-Pyrénées.

Une autre fille épouse un François Courros. C’est encore un patronyme du Sud des Landes, comme Lesboris, encore que l’on trouve une souche en Armagnac.

Un fils épouse une Jeanne Petit. On ne sait rien d’elle, son patronyme est trop peu discriminant, mais elle est morte au Mas-d’Agenais.

Un dernier fils épouse une Jeanne Samazeuilh. Elle est originaire du Mas-d’Agenais, c’est un patronyme très local autour du Mas, qui va essaimer par la suite à Bordeaux. Sa mère était une Mambille, patronyme disparu, qui est attesté Menville ailleurs (une variante de Minvielle), elle-même fille d’une Regondant, autre patronyme disparu.

Génération 4

De ce dernier mariage, selon les données parcellaires de Geneanet, sont issus deux garçons, nés au Mas-d’Agenais. Nous n’avons que la descendance de Jean, négociant, qui finira sa vie à Bordeaux. Retour dans la grande ville, donc.

Jean épouse une Catherine Denabre, bordelaise, sans profession. Le père, Pierre Denabre, est dit capitaine de navire. Le patronyme Denabre a disparu, il est celui d’une famille de marins de Bordeaux, du quartier Sainte-Croix. Voir DENABRE.

Les patronymes des alliances avec les Denabre (qui est lui-même éteint mais possède une apparence d’oc) sont souvent gascons : Crozillat, Balanquey, ... D’autres semblent d’oc, avec plusieurs souches possibles : Leyris, Merigon, Jalabert, ... Le petit peuple du bassin de la Garonne dans tous les cas.

La mère de Catherine Denabre est une dénommée Marie Rivière, née à Bordeaux, mais dont le père était d’Astaffort. Décidément, les liens entre Bordeaux et la Moyenne Garonne sont forts.

Génération 5

Du mariage à la fin du XVIIIème siècle entre Jean Holagray et Catherine Delabre sont issus 8 enfants.

Une fille épouse un Sudreau. C’est le premier patronyme d’apparence d’oïlique ! Mais en fait, ces Sudreau sont de Gornac, en Entre-Deux-Mers. Et Sudreau est en fait un patronyme périgourdin, avec une finale en -eau par francisation. Il subsistait en Entre-Deux-Mers des Sudreau autochtones au début du XXème siècle : une vieille migration périgourdine, comme il y en eut de nombreuses dans cette région, qui attirait les populations plus pauvres du Périgord.

Une autre fille épouse un Vergnes de Bordeaux. En remontant la généalogie, on se rend compte que ces Vergnes sont de Golfech, dans l’ancien Agenais de la rive droite de la Garonne, injustement annexé au Tarn-et-Garonne sous Napoléon. Du côté maternel de ce Vergnes, on trouve des Rauzan, des Maleville, des Daney, ... des patronymes régionaux au sens large, d’oc.

Un fils épouse une Canihac, de Castelnau-sur-Gupie ! L’Agenais encore.

Une fille épouse un Bergé. Une famille de Bordeaux. Les patronymes sont encore locaux : Dumage, Dusolier, Dupin, ... souvent de la vallée de la Garonne ou de la Dordogne.

Un fils épouse une Juvignard Preclos. C’est un nom un peu pompeux. Le père, Preclos, est seulement dit Juvignard, il est originaire de Paulhac, en Toulousain, rive droite de la Garonne. Encore cette vallée ... Les enfants de ce mariage épouseront une Faye de Marmande, une Lataste de Bordeaux (originaire à date ancienne de Doazit dans les Landes avec dans la généalogie des noms locaux gascons du Bordelais : Pomiès, Lasvignes, ...), une Escarraguel de Pauillac en Médoc (origines de l’Aude via un ancêtre architecte qui fait souche en Médoc).

Enfin, un dernier fils épouse une Alary. Les Alary sont de Preignac, dans les Graves. De cette union, vont naître trois enfants.

Génération 6

Une fille va épouser un Festugière, négociant, originaire du Périgord, près de Périgueux. Une autre un inspecteur des Ponts et Chaussées originaire de Savoie. Bref, la Révolution est passée par là, qui a fait bouger les gens au-delà de leurs anciennes provinces. Il deviendra un notable girondin, conseiller général.

Un fils, enfin, épousera une Bladé originaire de Lectoure : ce sont les grands-parents maternels de l’écrivaine Jean Balde, née Jeanne Alleman (dont la famille paternelle est de Latresne), petite-nièce de Jean-François Bladé, le grand folkloriste.

Bilan

Bordeaux était une grande ville à compter du XVIIIème siècle, la deuxième de France selon certains. Dès lors, on ne peut qu’être surpris par la provenance essentiellement régionale du peuple des négociants bordelais.

On trouve très peu d’alliances avec ceux qui deviendront des "Charentais", qui ne semblent pas encore migrer en masse à Bordeaux. Mais dès le XIXème siècle, après la Révolution, le grand brassage français est en route, même si la généalogie des Holagray l’illustre mal.

L’une des tendances lourdes à cette généalogie est celle de la présence de gens originaires de la moyenne vallée de la Garonne, notamment de l’Agenais, mais parfois plus loin. Cette vallée est clairement l’axe naturel de la ville de Bordeaux, au débouché de laquelle ce grand port se situe.

Il y a une prédominance gasconne assez nette en tout état de cause, d’autant plus si l’on remonte dans le temps. Mais Bordeaux est aussi la grande ville des Périgourdins des rives de la Dordogne, des Agenais de la rive droite, ...

Holagray ?

Je finis avec une note sur ce patronyme. Ainsi que Jean Balde le savait, ou plutôt ainsi que la tradition familiale le disait, Holagray est de toute évidence la déformation d’un patronyme basque assez commun : Olhagaray "cabane d’en haut".

Un gran de sau ?

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