Ecarter des taureaux : piste d’avenir pour la course landaise ? ?

- Gerard Saint-Gaudens

Baptiste Bordes était déjà devenu un des grands écarteurs de sa génération depuis le début de sa carrière en 2005. Aujourd’hui âgé de trente ans et parvenu à la pleine maturité de son art,il a développé ces deux dernières années une spécialité dont il est à peu près le seul représentant (en oubliant les écarteurs qui au moins une fois l’an, se mesurent à des taureaux lors de la Nuit du Toro ou du festival Art et Courage) : il écarte des taureaux, habituellement si l’on peut dire, avec chaque fois un défi nouveau : par six à la suite comme en 2017 au Moun devant des bêtes de l’élevage Victorino Martin ou en s’attaquant à toutes les « encastes », tous les élevages jusqu’aux terribles Miura et redoutables Palha (à Tyrosse en juillet 2018).

La particularité de ses exploits est qu’ils ont généralement lieu en première partie de corridas à l’espagnole (ou portugaise) : moment bref et intense qui précède le temps plus long des trois « tercios » classiques.
Et ainsi Bordes côtoie tant les toreros, picadors et autres banderilleros mais aussi forcados et rejoneadores portugais et encore les recortadores, ces écarteurs sauvages à l’allure de pirates de plus en plus populaires en Espagne ces dernières années jusqu’à venir parfois défier les taureaux de nos arènes françaises.
Mais aussi il est accueilli par les razeteurs provençaux qui, comme les autres acteurs d’un monde taurin bien divers, ont appris à apprécier ses prestations et à respecter leur auteur.
Bref tout ça ressemble un peu à un melting pot abolissant les frontières géographiques tout comme celles des diverses disciplines taurines, ce qui rappelle les essais de Toro Passion (auquel Bordes s’associe bien souvent et qui organise ses déplacements espagnols).

Est-ce l’avenir de la course landaise et des arènes tant ibériques que françaises, qui depuis une dizaine d’années marquent le pas et peinent un peu plus qu’avant à se remplir… bref, l’avenir ou du marketing momentané ? Baptiste Bordes auquel l’auteur de ces lignes posa la question hier*, ne croit guère ni à l’un ni à l’autre. Tout en notant que sa prestation intéresse de plus en plus les directeurs d’arènes en mal de nouveauté, il pense que son parcours est par nature, sinon unique, du moins rare. D’abord parce qu’on ne commence pas une carrière en écartant des taureaux : dix années d’expérience auprès des vaches rapides, astucieuses et souples lui ont appris toutes les ficelles du métier avant de se trouver un jour devant la masse terrible et impressionnante des taureaux de combat. Même ainsi tous les écarteurs ne supportent pas la décharge d’adrénaline que représente le face à face avec un tel animal. Et l’art, sauvage, sans norme ni figure imposée, des recortadores espagnols n’est sans doute pas un contre exemple si l’on veut garder (c’est son cas) l’allure, la discipline , le maintien propres aux écarteurs gascons, bref leur art.

Bref, avec Bordes, tout comme avec les héritiers de Nicolas Vergonzanne (sauteur pionnier des affrontements taurins), tel son compagnon d’aventures ibériques et provençales Dominique Larié, la course gasconne cherche bien de nouvelles manières d’élargir son art et de se renouveler mais elle ne se renie pas.
En tous cas tant que de trop jeunes écarteurs inconscients ne se laisseront pas subjuguer par le goût du danger mortel développé par les recortadores (magnifiquement courageux mais là n’est pas la question) ou par des entrepreneurs de spectacle moins scrupuleux qu’aujourd’hui.

Pour ceux que la distance n’effraie pas, on recommande la prestation annoncée de Bordes le 5 octobre prochain dans les plus anciennes arènes portugaises, celles de Chamuscas.

*lors d’une conférence organisée par le Cercle taurin de Soustons, boulevard Darrigade, dans le cadre d’une série de prestations pendant toute la semaine.

Un gran de sau ?

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