Contes populaires de la Grande-Lande

- Ric dou Piaou

Contes populaires de la Grande-Lande recueillis par Félix Arnaudin : Lou TAC. Le texte est dit par Halip Lartiga en gascon neugue de la Grande-Lande (Haute-LAnde et PAys de Born).

Youtube : https://youtu.be/uWI7paod3M4

Voir en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=uWI...

Grans de sau

  • Plan dit e dab la musica hòrt plasenta deu Ric deu Piau darrèr.
    Lo tac qu’es un deus estes mès estranhs de la mitologia lanusqueta, tot au còp arrident e mauhasèc. Sèi pas s’aurà equivalents endacòm mèi en d’autas mitologias europevas.
    L’amic PJ M ac saberà benlèu diser.

  • Felicitacions per aqueth enregistrament, Halip e Eric !

    Lo Tac, aperat atau en’queth conde, qu’es tot simplament çò qu’apèran sovent en francés "le feu-follet", un esperit jogaire que hèi camaligas aus òmis. Qu’es pro presènt en lo patrimòni narratiu europenc. L’estrabuc estant de har quauquarren de pro "comun" quauquarren de tipic o de locau quèn es plan pro despartit.

    Prenem les hadas : pertot on èi collectat en Gasconha pirenenca (enfin, que m’entèni...), que les apèran atau : "hadas". Mes sovent, que’us balhan nòms ultra-locaus com, per exemple, "sarraginas" (sarrasinas) a Erce (09). En Gasconha, n’èi pas coneishença que disin atau parièr enlòc mèi. Totun, en Provença, qu’es estat collectat per Charles Joisten e tanben en Savoie devath aquera aperacion. Perqué aquí e pas ací ? Mistèri...

    E donc, preu Tac, medisha causa, un nòm ultra-locau, probable non partatjat en totas les Lanas e causit per Arnaudin, que’u conéishem, per le soa fòrma isolada... Que seré ua error de’n har com un totem quèn, e’m pensi, èra dijà completament confidenciau deu son tèms autanplan suu nòm que sus l’istoèra. Après, qu’es lo devenir deus condes deu pèc de le Bohèira que d’aver ua vita pròpia mes per aver hèit l’Arnaudin pendènt 8 annadas, e’m pensi qu’am tròp tendença de har deu patrimòni narratiu collectat per Arnaudin quauquarren d’unic o de circonscrit a les Lanas... Se s’interrèssan a etnografes com, justament Joisten o mèi que mèi a Van Gennep, que veden n’es pas tan despariat çò de nòste. Per exemple, qu’aví enregistrat a Aulús 2 condes que son condats, haut o baish, de le medisha fèiçon en Arnaudin. O enregistrat ua istoèra a Harrèra (65), jamèi entinuda enlòc mèi e legida, just similària, en un libe de Joisten en Haute-Savoie.

    Entà çò deu "feu follet", o "l’esprit follet", qu’es un tèma pro espandit e multifòrme au hart. Lo Tac n’es pas sonqu’ua declinason de’queth tèma.

  • En écoutant le conte recueilli par Arnaudin (merci pour l’initiative et pour toutes les autres vidéos !) je me suis dit que c’était une histoire de feu. Ça s’accorde à la discussion. Comme le dit Renaud, c’est sans doute un cas particulier de quelque chose de plus vaste, européen et localisé à la fois.
    Puisque GSG me tend la perche, j’ai pensé à ceci :

    Le Tac est un être énigmatique, ce qui fait partie de sa définition.
    Il est protéiforme : jeune animal cornu (image narrative du feu de l’été, comme le bélier ?), branche morte (métonyme du feu ?), entité sonore. Il siffle ou ricane.
    Il ne demande rien, même pas à être transporté ; on le trouve.
    À la différence des lutins et diablotins médiévaux, il n’apporte rien aux hommes, ni ne les aide.
    Il y a un rapport entre la pesanteur croissante du fardeau et la révélation du Tac : il est associé à une sorte de malaise passager. Il est léger et lourd : impondérable. Avant tout, on le perçoit, le ressent (physiologie).
    L’effet du vin blanc n’est pas évoqué.
    Insaisissable, il échappe à la surveillance de ses détenteurs occasionnels.
    Il apparaît le soir, à l’heure indécise (t’o basse ore), quand on rentre du travail.
    Il est associé aux fontaines et aux eaux vives.
    Il peut détruire les ponts et l’on doit l’en détourner.
    Il a toujours le dernier mot et le conte est plus ou moins explicitement une mise en garde : le Tac peut égarer.
    L’association avec la mort est occasionnelle. Il fait peur.
    Le conte a retenu un motif antique, celui du cheval qui entraîne ses nombreux passagers vers la noyade, motif qui s’est agrégé à l’histoire (ce qui en ferait le résidu d’un récit plus large ?)
    Il ne semble pas qu’il y ait eu des rituels associés.

    Ce conte me paraît le vestige de croyances et même d’une ancienne mythologie européenne des feux. Le Tac a beaucoup d’attributs du feu des mythes et des contes européens. On y reconnaît en effet un feu-follet (présage) crépusculaire, mais celui-ci ne brûle pas.
    Par ses métamorphoses le Tac se rapproche du Koadalan breton, du Taliesin gallois, voire du Zagreus hellénique, qui sont à des degrés divers des incarnations du « feu de la parole » et du « feu des eaux ». Mais on ne sait pas si le Tac subissait des épreuves : faute de récits plus développés sa mythologie est résiduelle.
    Ce « feu des eaux » prenait toute son importance en période caniculaire, celle qu’encadraient à Rome les Neptunalia d’eau et les Volcanalia de feu, qui ont laissé des traces dans l’hagiographie et les coutumes populaires (voir entre autres Ph. Walter Mythologie chrétienne, Paris, Imago, 2003). Ces croyances n’étaient pas propre aux Romains car on retrouve dans toute l’Europe cette notion d’un fluide actif, voire dangereux, contenu dans les eaux vives et les sources curatives (je renvoie à la somme de J. Haudry, Le Feu, Archè, Milano, 2016).
    L’élément feu proprement dit n’est pas à exclure : c’est un destructeur de bois, donc de ponts de bois.
    Le feu de la maladie et de la fièvre me paraît implicite.
    Avec notre conte gascon, nous en sommes à un stade récent de ces traditions, désormais bribes de croyances anciennes dépareillées.

  • L’un des effets du tac, la pesanteur, est peut-être l’accablement caniculaire (mais il faudrait situer le conte dans le cours de l’année), mal contre lequel on prenait toutes sortes de précautions. C’est toujours d’actualité et fournit à l’entité une dernière raison d’être. Existait-il des expressions « avoir, ou prendre, le tac » (une sorte d’« attaque » ?).

    Contrairement à ce que dit la fiche ’Wikipédia’ du Tac, son nom n’a pas de rapport avec celui du Drac.
    Si l’on ne se contente pas de l’onomatopée, on peut chercher du côté du latin tactu- « toucher », intéressant parce qu’on en a tiré un nom de la phlegmasie du cheval (contagieuse par le toucher). Cette maladie s’accompagne de fièvre : c’est un feu intérieur (phlegmon « feu froid »). Il faudrait chercher le nom gascon de cette affection bien connue des éleveurs et paysans.
    Le français taquin qui signifiait « avaricieux » (voir Gasc. tacan) a une histoire compliquée ; tacanhar est « énerver ». Le mot taca « tache » n’est pas à écarter non plus.
    Palay fait du Tac "un farfadet des pinèdes", ce qui est un peu anachronique avant les plantations du XIXe siècle. Les pins des Landes, comme le travail des gemmeurs, ont pu donner au Tac une nouvelle jeunesse.

    Vous me direz que c’est chercher bien loin des antécédents. Mais justement les parallèles et similitudes montrent qu’il s’agit d’un héritage commun et antique. Si les auditeurs du conte pouvaient évidemment se passer de ce genre d’explications, il est une question qu’ils ne pouvaient pas s’empêcher de poser : « e qu’ei, lo Tac ? ». Comme les petits enfants, nous nous la posons aussi...

  • Le tac "maladie du porc" est cité en moyen français dans le FEW (avec une origine qui serait onomatopéique). Mais en même temps, cette signification est complètement isolée.

  • Création d’un visuel moderne pour représenter une ancienne peur qui parcourait notre Gascogne.
    Lou Tac

  • Création d’un visuel moderne pour représenter une ancienne peur qui parcourait notre Gascogne.
    Lou Boum

  • Lou boum, je ne sais trop pour n’en avoir jamais rencontré ... mais le tac, je doute qu’il ressemble à King Kong. Rien d’effrayant chez ce lutin malicieux et polymorphe qui a l’art de se déguiser en n’importe quoi, même en morceau de bois, d’après Arnaudin.
    Vous le ramassez en croyant étoffer le fagot que vous portez sur les épaules en vue d’un bon feu de cheminée et paf ! Il se fait de plus en plus lourd jusqu’à ce que vous n’en puissiez plus. Alors il rigole de sa bonne farce : "hiha,hiha ; me sui plan hèit portar" ! (ou si l’on préfère : hiha hiha, me sui pla hèyt pourtà).
    On ne traduit pas, parole de tac !


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