Le "Pays de la Nouvelle Conquête" Autour du Périgord gascon

- Vincent P.

Les amateurs auront remarqué qu’à compter du XVIIème siècle, apparaît sur les cartes régionales, un drôle de pays en Entre-deux-Mers, celui de la "Nouvelle Conquête".

Il est délicat de comprendre à quoi ce pays correspond, faute d’ouvrages connus par moi-même sur la question. A priori, la sénéchaussée de Bordeaux, créée en 1542, division administrative complexe aux compétences qui, à titre personnel, me dépassent dans leur compréhension, se serait agrandie de terres qui ne relevaient pas du Bordelais historique, tel que défini par son évêché.

On remarque ainsi que le territoire de Langon, en Bazadais religieux, est détaché de la sénéchaussée de Bazas. Et il en va de même d’une large part du Bazadais d’entre Garonne et Dordogne, plus précisément la partie allant du Dropt à la Dordogne : c’est là d’ailleurs le gros de ce "pays de la Nouvelle Conqueste", au nom particulièrement étrange, sur lequel il conviendrait d’enquêter (est-ce en lien avec un projet "colonial" de remise en valeur qui verra l’afflux des populations gavaches ?).

La sénéchaussée de Bordeaux, dans tous les cas, est agrandie également d’une partie de la bande de terre agenaise qui va jusqu’à la Dordogne, ce qui deviendra le Pays Foyen de la géographie contemporaine du département de la Gironde, ce qui laisse entendre une tendance de long terme nette quant aux intérêts de Bordeaux pour Sainte-Foy.

Enfin, et c’est le plus intéressant, une zone au nord de la Dordogne, en amont de Castillon, qui deviendra la Bataille, est annexée à la sénéchaussée de Bordeaux, toujours dans ce pays de la Nouvelle Conquête. (Je me demande dans quelle mesure l’acquisition de la seigneurie de Montaigne par la famille Eyquem de Bordeaux est liée à tout ceci).

La question de savoir si Castillon a relevé, à un moment donné de son histoire, du Périgord, est fort complexe, outre qu’il est toujours difficile de s’entendre sur la notion même de Périgord (les deux évêchés médiévaux de Périgueux et Sarlat ? la sénéchaussée de Périgord ? le comté de Périgord ?). Il semble acquis que Castillon ait toujours été de l’évêché de Bordeaux, en tout cas. Ce n’est pas le cas des environs de Montravel, dans le diocèse de Périgueux (séparé par la Dordogne du diocèse de Sarlat, au sud).

Pourquoi nous intéresser ici même à ces confins périgourdins ? Nous avons eu l’occasion de discuter de la question de l’appartenance linguistique du parler de Lamothe-Montravel au domaine nord-gascon, disons-le bordelais. Je ne proposerai pas d’analyse linguistique de la question, d’autres pourront le faire en commentaire, mais il fait consensus que la langue de Montravel est la même que celle de Castillon, et que la langue de Castillon, bien que mêlée et dépourvue de traits caractéristiques gascons (tel le h-), relève plutôt du domaine linguistique gascon bordelais.

La toponymie est très clairement gasconne, et laisse penser que la langue fut même plus typée qu’elle ne l’était lors des derniers recensements linguistiques. Quelques exemples pris le long de la Dordogne, rive droite : Le Carros, Le Cendrey, Bardies, La Tauziatte, Tréty, Les Palanques, Crabide, ... Ces lieux-dits, soit montrent des traits linguistiques nord-gascons, soit par leur distribution se rattachent au monde gascon.

Dans quelle mesure le rattachement de cette contrée au "Pays de la Nouvelle Conquête" a-t-elle influencé l’orientation plutôt nord-gasconne, disons bordelaise, de cette zone périgourdine ? Est-ce que c’est cette annexion qui a induit l’orientation, ou bien ne s’agissait-il que de l’officialisation d’une réalité humaine ? De nos jours, il est assez clair qu’entre Lamothe-Montravel et Saint-Antoine-de-Breuilh, l’univers développé est complètement bordelais, tout le long de la Dordogne, et s’affirme beaucoup plus nettement périgourdin en "s’enfonçant" vers le Nord, la disposition du sol y étant pour beaucoup.

Il est possible que cette situation de frontière ait été plus ancienne encore : ainsi, le lieu-dit "L’Hirondelle" sur le "Grand Chemin" (ancienne voie romaine) me semble relever de la série des dérivés du celte *icoranda : au moins Montcaret, Montaigne et Lamothe auraient été dans l’orbite bordelaise à date fort ancienne.

Voir en ligne : Direction de Bordeaux, Comprenant La Séneschaussée de Bordeaux et Le Pays de La Nouvelle Conqueste Dédiée A Messieurs Les Fermiers Generaux des Fermes Royalles Unies / Par... J.B. Nolin... ; Gravé par H. Van Loon

Grans de sau


Un gran de sau ?

(connexion facultative)

  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Ajouter un document

Dans la même rubrique :


 

Sommaire Noms & Lòcs