Survie des langues (catalan, basque...) en contexte mondialisé David

[bouture du hiu de grans de sau "Mixité basco-occitane"]

Vincent, un mot seulement :
aucune langue au monde n’aurait d’avenir si sa pérennité était aussi intrinsèquement liée à un contexte ethno-géographique originel.
L’arabe est une langue de pasteurs nomades, le berbère, un parler de paysans à flanc de montagnes. Ce sont aujourd’hui deux langues périurbaines à urbaines.
L’ethno-territoire n’est pas la condition unique et indépassable de la pratique linguistique.
Barcelone est une des villes les plus cosmopolites du monde, radicalement mondialisée. Je ne vois pas que cela mette en danger de façon quelconque la pratique du catalan.
Et d’après mes informations, on parle nahuatl à Teotihuacan ou a Tlalpan, aujourd’hui, de très jeunes locuteurs, descendants de Cuauhtemoc, mais eux-mêmes représentants d’un sous-prolétariat ultra-pauvre et ultra-violent, aussi éloigné des paysans-pêcheurs aztèques que les bordes de la vallée d’Ossau de la place de la Bourse. Et pourtant...
Et je ne te parle même pas de l’hébreu et de ses dérivés.

La société mondialisée des autoroutes à ouvert de ventre de la Gascogne ? Oui, comme de tous les pays du monde, sauf peut-être le Bengladesh et la Somalie. Pas davantage.

Grans de sau

  • La rue de Barcelone ne parle pas catalan...
    Dès lors que l’on a fait ce constat, on ne peut plus croire aux contes de fées dignes du magasine GEO.
    Le catalan n’est plus que la langue des coins restés plus archaïques comme vers Gérone, sans oublier que la langue est quasi-morte en Pays Valencien ou dans les Baléares.

  • comme dans les rues de Donostia où l’on parle plus castillan que euskara malheureusement...

  • Oui mais Saint-Sébastien n’est pas à l’origine une ville bascophone puisqu’elle parle une langue romane (gascon puis castillan) depuis les origines de sa fondation.
    D’ailleurs, et plus généralement, c’est toute la question de la confrontation entre le fait urbain et le fait basque qui se pose : Bilbao est située sur la frontière linguistique entre basque et cantabre, Vitoria est romanophone depuis des siècles, Pampelune fut longtemps bilingue (navarro-aragonais/basque) avant de passer au castillan, Bayonne est évidemment gasconne, jusqu’aux petits centres urbains comme Mauléon et Saint-Palais étaient dominés par une élite romanophone.
    Donc d’un point de vue historique, le basque au centre-ville de Donostia, c’est une reconquête !

    Pour ce qui est de la Catalogne, c’est beaucoup plus inquiétant, et je pense qu’à long terme le catalan y est condamné, parce qu’il est impossible de lutter contre la force internationale du castillan comme vecteur de communication, sans oublier que Barcelone, hub mondialisé, attire justement des personnes originaires de l’hispanophonie, et en nombre très conséquent.
    Les derniers bastions du catalan seront les bastions conservateurs des petites villes marchandes qui votent CiU ou les zones rurales.

  • Bonjour,

    J’étais encore à Saint-Sébastien samedi dernier et je peux confirmer qu’on entend parler basque dans la rue. Et même mieux que ça.
    Le matin : Arrêt de bus en face des universités, le parking y est gratuit et facile. Un groupe de gamins avec des maillots du Barça e de la Real Sociedad, âgés de 10 à 12 ans. J’ai donc fait l’âne, c’est ma seconde nature, et ai demandé, en basque, à ces jeunes gens, de me dire quel était le bus pour aller au centre. Ils m’ont compris et répondu en basque.
    Arrivée au centre ville. Je continue donc à faire l’âne et demande à un passant d’une trentaine d’années de m’indiquer tel restaurant. Encore petite conversation en basque. Arrivée au restaurant. Je m’adresse au serveur derrière le bar, 60 ans environ. Conversation en basque.
    12h : Nous sortons du restaurant. Je m’adresse à une passante, la trentaine, des renseignements sur le musée San Telmo. Conversation en basque. Arrivée au musée. Toutes les guichetières parlent basque, avec moi et entre elles aussi. Les vigiles parlent basque, les surveillants dans le musée parlent basque, tout est écrit en basque, les vidéos sont en basque. Un vieux monsieur s’approche de moi pendant la visite et entame la conversation en basque et en français, il me raconte qu’il a vécu 20 ans à Paris avec ses parents.
    Fin de la visite du musée San Telmo, que je vous conseille.
    14h30 : Arrivée au restaurant, rue Juan de Bilbao. Quelques pintxos, les deux barmens bascophones (environ 60 ans et 35 ans).
    Salle de restaurant, serveuse bascophone. Clients du restau, deux ou trois tables castillanophones et toutes les autres bascophones. J’ai des oreilles et j’écoute.
    Après-midi : Balade autour du mont Urgull. J’aborde un pêcheur juste pour parler, bascophone. J’avise un type avec magnifique T shirt 64 et lauburu autour du cou. Je m’adresse à lui en basque, il ne comprend pas. Magasin de souvenirs, castillanophone. Pâtisserie, castillanophones.
    1er magasin de fringues, j’étais avec mon amie, passage obligatoire. Nous avons fait quatre boutiques, tous bascophones, y compris les petites vendeuses (la vingtaine toutes).
    Petit tour à la Fnac, tous les vendeurs auxquels je me suis adressé, 3 en tout, bascophones. Tout est écrit en basque et en castillan. Librairie Elkar, à côté de la Plaza de la Constitución. Absolument tout le personnel est bascophone, entre 25 et 40 ans. Re pâtisserie pour acheter une glace, bascophone environ 25 ans. Visite de San Vicente, une dame passe le balai, bascophone.
    Retour dans la ville nouvelle et visite de la cathédrale du Buen Pastor. Fin d’une cérémonie, en basque et en castillan. Bureau de tabac, buraliste environ 50 ans bascophone. Retour au bus, je fais à nouveau l’âne et demande ma route au monsieur qui attend, bascophone environ 50 ans.
    J’oubliais, les deux chauffeurs de bus bascophones, les employés aux péages bascophones.
    Pendant toute la journée, j’ai entendu parler castillan dans les rues, bien entendu, mais aussi très souvent basque, de tous âges.
    Il va sans dire que toute la signalétique est en basque, partout. Voilà, une petite expérience que je renouvelle régulièrement. Quand je vais dans les petits ports, les bleds un peu plus reculés, c’est bascophone à 80%.

  • Vincent, je ne suis pas du tout d’accord avec toi sur le catalan à Barcelone...
    Et je pense assez bien connaître le sujet.
    Dans une ville cosmopolite, participant en outre de l’aire culturelle ibérique, dont elle est le phare, il n’y a rien d’étonnant à ce que l’on parle plusieurs langues dans les rues, c’est une donnée absolument évidente et naturelle.
    Parmi ces langues, des langues non-territoriales, ainsi que l’espagnol, rien d’étonnant non plus pour des raisons d’une évidence qui n’échappera à personne.
    Mais le catalan, tout le monde le parle, à commencer par les panneaux, la radio, la télé... Langue sans états, elle a sa place dans ce pôle du fashion mondial, qui draîne jet-set et jeunesse dorée de la Terre entière. Et là est l’important !
    Le monolinguisme n’a jamais existé dans aucune grande métropole, à aucune époque. Pas plus dans le Bordeaux de 1400 que dans l’Alexandrie des Lagides, pas plus la Tel-Aviv de Ben Gourion, ni probablement dans la Rome d’Auguste ou dans l’Athènes de Périclès...
    Je n’y vois nul obstacle au progrès d’une langue non-étatique, qui plastronne aux côtés des différentes variétés d’espagnol, de l’anglais, d’une noria d’autres langues.
    Mais Vincent, qui rêve de monolinguisme, à l’heure qu’il est ? Quel pêcheur de lune pense qu’on ne peut parler qu’une seule langue dans une mégapole ?
    Disparition du catalan ? Parce que l’espagnol est parlé sur deux continents ?
    Je dirais plutôt mutation interne des différentes variantes d’espagnol (je pense à l’argentin, l’uruguayen et le chilien) vers de nouveaux parlers trans-romans, pour débuter...
    Et tu ne tiens pas compte des différents cercles de sociabilité.
    Quant aux immigrés andalous qui peuplent les banlieues ouvrières de Barcelone, Valence, Elxe etc. leur morgue hautaine ne plaide guère pour une longue survie de leur idiome dans le domaine catalan.
    Vincent, quand la Generalitat vint à Fontainebleau offrir à Louis XIII le titre de comte de Barcelone, les lettres patentes étaient entièrement en catalan.
    Pas un mot d’espagnol (il s’agissait de se débarrasser d’Olivarès).
    Le catalan, en 1641, était tout sauf une langue internationale.
    Une structure possédant un tel acquis n’a, je pense, nul souci à se faire.

  • Probablement un beau texte que vient de pondre David, qui pourrait servir d’éditorial pour une quelconque revue savante, tant il évite, non sans s’en rendre compte, la question très bête, mais peut-être trop politique ou contemporaine, de savoir si l’on parle vraiment catalan à Barcelone.
    Les panneaux, répond David au détour de ce petit texte qui est avant tout l’apologie un peu abstraite du bilinguisme.
    C’est très bien, mais enfin la vérité c’est qu’à Barcelone, on ne parle pas catalan dans la vie de tous les jours, que la ville est une métropole multiculturelle qui certes chérit en apparence sa culture vernaculaire, mais qui dans les faits, à savoir la somme des comportements individuels, lui fait peu d’égard.
    Il n’y a rien d’étonnant à cela, dit David. Mais je ne m’étonne pas ... C’est comme ça.

    Pour le reste, je conseille à David de s’intéresser aux tensions très fortes entre les néerlandophones et les francophones en périphérie bruxelloise, voir si son monde rêvé bilingue est si facile que cela à mettre à exécution.

  • Bonsèr a tots,
    Juste une précision envers le témoignage de P Lartiga sur son séjour en Euskadi sud, je suis heureux de constater qu’une majorité de basques parlent basque car je rappelle que c’est une autonomie où la langue officielle est l’euskarra...
    Serait il d’accord pour que l’Euskadi nord devienne elle aussi autonome et rejoigne le sud, ce serait logique pour un peuple basque non ?..
    4+3=1.
    D’autres parts il a beau expliquer que son anti occitanisme n’est pas primaire vu le recul d’années d’observations, il véhicule toujours des mensonges très ciblés cette fois envers un homme que je connais très bien.
    Ce soir je n’ai pas le temps mais demain j’expliquerai preuves à l’appui combien les propos envers l’occitanisme local à la Gascogne sont faux l a part de notre Filipe Lartiga.
    A deman bona serada

  • Sur la pratique du catalan dans la vie courante à Barcelone de nos jours, qui peut nous apporter des témoignages récents ? Merci d’ailleurs à Halip pour son rapport sur la pratique du basque à Donostia !-)

    De brèves excursions à Barcelone au début des années 90 m’avaient laissé penser que le catalan était bien présent dans la vie courante.
    Je me rappelle d’un dialogue guichetier-client en catalan devant moi dans une gare.
    Je me rappelle aussi de la famille qui gérait l’hostal où je logeais, qui parlait catalan.
    Un ami castillanophone qui résidait à Barcelone m’a parlé d’une voisine qui parlait à ses chiens en catalan... Il était aussi en bisbille avec son syndicat de copropriété qui utilisait le catalan dans ses réunions, langue que lui ne maîtrisait pas.
    Mais tout ça est bien parcellaire et insuffisant, et surtout c’est vieux, parce qu’en 20 ans, presque une génération, les choses peuvent changer, surtout à notre époque.
    Je crois aussi, par la lecture épisodique de points de vue catalanistes, qu’il y a bien une inquiétude sur l’avenir du catalan à Barcelone, voire en Catalogne, et sur la qualité de ce catalan (tendance à la castillanisation).
    Le catalan qu’on entend sur des radios barcelonaises me sonne très castillan.

  • Adixatz Mossur Arrosèras,

    Quiò, que soi ad ua entà los Bascos de bisa qu’àginn lo son departament desseparat e ua autonomia hòrta.
    La termièra dond separteix lo pòple basco enter dus Estats qu’es artificiau e qu’ac sàbem tots.
    Quiò, los Bascos que pàrlann mei anar mei l’euskara, e susquetot los joenns e hòrt joenns.

    E dic messonjas jo ?
    Lasquaus e contra qui ?
    Qu’èi mentavut Mossur Grosclaude (Es eth de qui pàrlatz, que boti ?) pramor qu’èi tornat comentar un gran de sau deu nòste amic G. Saint-Gaudens dond parlèva d’ua entervista pareixuda en no sèi pas mei quau jornal catalan, qu’es lo tot.
    E serí atau un messongèr calomniator ?
    Dàvid Grosclaude no m’a pas jamei hèit arré mau e, cada còp qui s’am aubèrt los pòts, qu’estó dab civilitat, mau síinn las nòstes concepcions hòrt desparièras.
    Quand parli d’eth, no parli pas de l’òmi qui no coneixi pas mes deu capulat arrepresentant un cèrt occitanisme qui arrefusi.
    Tà çò de l’anti-occitanisme primari, anatz véder en çò de l’IBG, alahòra que quiò !!
    Jo, qu’accepti las criticas de las mias teorias vasconistas. Tot que pòt e que deu estar criticat.
    Cadun deus vòstes grans de sau qu’amuixa un cèrt occitanisme n’ac pòt pas har dab serenitat.

    Que’vs desiri hòrt ua bona jornada e portatz-ve plan.

    Réponse de Gasconha.com :
    "ad ua" = "d’acòrd" (n’es pas evident, Halip !)

  • Vincent, inutile de rhétoriser ainsi, mettre en exergue les lacunes méthodologiques d’un texte ne te donne pas raison pour autant.
    Tu possèdes un certain talent dans l’art de la plaidoirie, même si la technique consistant à grossir exagérément un aspect d’un texte donné en occultant tout le reste est une très très vieille méthode un peu éventée, et un peu trop connue pour être encore bien efficace.
    Je ne suis pas ici pour entamer une disputatio contre un disciple de maître Patru où du père Bourdaloue, mais pour échanger et réfléchir sur un site de bonne tenue intellectuelle, où il est intéressant d’échanger des idées.
    Tu sais bien que je n’élude rien : le catalan est menacé à Barcelone justement parce qu’il y existe (le gascon n’est pas menacé à Bordeaux, il en est absent).
    Il est menacé comme le sont à peu près toutes les langues territoriales dans les mégapoles, surtout quand ladite langue territoriale n’est pas langue d’état.
    Bon. Ceci dit, la présence du catalan à l’oral - notez, cher maître - y est encore tout-à-fait patente et réelle.
    Et s’ils sont confrontés à un recul, ils n’auront, eux, aucun mal à l’enrayer assez facilement.
    Mon évocation de la signalétique, mais aussi de la toponymie urbaine (Casa Milà ; Palau de la Musica catalana ; Hospital Sant Pau...) renvoie au fait que ces réalités contribuent à une immersion, un bain lingüistique hors de toute comparaison avec ce qui se fait chez nous. Pour ça, je ne crois pas une seconde que la langue catalane soit sérieusement menacée.

  • Pas menacé le catalan ?
    Alors qu’il est pour ainsi dire mort en Roussillon français, quasi-éteint en pays valencien et aux Baléares, où il est en plus entaché de l’arrogance catalane, de telle sorte que l’on est arrivé aujourd’hui à ce que les Valenciens rejettent leur langue vernaculaire parce que trop liée à la Catalogne ?
    Sans parler des migrations internes à l’Etat espagnol (ça existe encore les patronymes catalans ?).

    Pour ce qui est de la Catalogne, sans même tenir compte de la qualité du catalan parlé (le fameux catañol), les stats indiquent que 47.6% de la population parlerait catalan, ce qui est somme toute notre situation il y a 25 ans, on voit où nous en sommes.
    Seuls 34% des Catalans ont le catalan comme langue maternelle.
    Quand on va dans le détail, c’est catastrophique : le catalan n’est utilisé que par 27% des habitants de l’aire urbaine de Barcelone.
    Il ne faut pas être devin pour savoir ce qu’il en sera dans 100 ans, surtout quand on sait l’importance des métropoles dans la diffusion des schémas culturels.

  • J’ai habité Barcelone de 1996 à 199, ce qui commence à faire loin mais j’ai pu faire alors quelques observations qui ont gardé, je pense, quelque réalité aujourd’hui.
    D’abord il y a quasiment plusieurs barcelones, plusieurs manières d’y vivre et d’y parler en fonction des milieux sociaux et de l’âge (cette dernière réalité étant la plus mouvante : ceux que j’ai observés à l’époque ont, comme moi du reste, treize ans de plus et je ne garantis pas leur évolution !
    Les milieux sociaux tout d’abord :

     la bourgeoisie barcelonaise, celle "dels quatre cognoms" (les quatre grand-parents catalans) parle traditionellement et plus que jamais catalan (c’est l’armature du parti CiU qui a presque constamment gouverné la Généralité depuis 1978) ; à noter pour faire bonne mesure que la noblesse, moins nombreuse et moins influente, parle plutôt... castillan !) ;

     pour les classes moyennes et populaires, très majoritaires, c’est beaucoup plus compliqué et c’est là que les fronts linguistiques bougent, on ne sait pas toujours où et comment. Trois groupes y sont à distinguer :

     un groupe de catalans de souche qui a vaille que vaille gardé la langue et l’ a sans doute revitalisée grâce aux lois linguistiques de la Généralité, sauf quand il se trouve dans des quartiers ou banlieues majoritairement peuplées par les deux groupes qui suivent ; la langue peut dans ce cas avoir subi un revers par une sorte d’assimilation à l’envers ;

     un groupe numériquement beaucoup plus important, fait des travailleurs venus de l’Espagne de l’intérieur, surtout d’Andalousie et d’Extremadoure dès le début du XXè siècle (la grande époque de la construction et de l’industrie barcelonaise, celle de la "Ciudad de los prodigios" d’Eduardo Mendoza) : leur flux n’a jamais cessé depuis et ils sont clairement castillanophones bien qu’obligés à une scolarité en catalan depuis plus de trente ans( il y a donc là les plus et les moins de quarante ans, plus que dans tout autre groupe social) ;

     les immigrés de l’étranger,très nombreux depuis 15 ans environ(Roumains, Marocains, Subsahariens, voire Pakistanais dans le Raval et massivement sud-américains : ces groupes soit parlent déjà castillan (les derniers nommés) soit s’intègrennt à la société espagnole par cette même langue.

    Les classes d’âge ensuite : si les plus de 40 ans, en gros, ont tous été scolarisés en castillan pendant l’époque franquiste, les moins de 40 ans l’ont été en catalan. Il me semble que les premières années, jusqu’au milieu des années 90 peut-être, la joie de libérer le catalan, de lui redonner une vraie présence sociale l’a partout emporté mais il me semblait commencer à déceler un agacement devant le caractère méticuleux, systématique et quelque peu obsédant des mesures inspirées par la politique linguistiques de la Généralité commençaient à donner, auprès des jeunes, à la culture castillane un attrait de fruit défendu, presque de contre-culture.
    Depuis lors, les produits culturels ou sous-culturels de la mondialisation d’origine nord-américaine ont vraisemblablement été surtout reçus, ipods et autres iphones aidant, dans la même langue, bien que la politique linguistique de la Généralité ait toujours veillé à ne pas se laisser "ringardiser" les vecteurs de la catalanité et que le "basic english" ait commencé ses ravages, là comme ailleurs.
    Bref, le catalan est-il menacé à Barcelone et donc en Catalogne puisque l’aire métropolitaine de Barcelone couvre à peu près la moitié de la population catalane (sans même compter le nord roussillonais, en effet linguistiquement bien écrasé) ?
    Les chiffres donnés par Vincent me paraissent assez vraisemblables quand ils s’agit de la langue usuelle(beaucoup plus nombreux, scolarisation aidant, sont ceux qui ont une connaissance au moins passive voire une capacité d’expression en catala, certes castillanisé) mais il ne faut pas comparer les deux situations linguistiques : en Gascogne et dans tous les pays d’oc, la langue locale avait il y a 50 ans un fort parfum d’arriération alors que pointaient les trente glorieuses et de fait, la langue ne portait pas alors les mots de la modernité, ce qui n’est pas du tout le cas du catalan aujourd’hui.
    Enfin,cette question est bien sûr en Catalogne fortement instrumentalisée politiquement : dire que la langue n’est guère ou pas menacée, c’est souvent un satisfecit donné à CiU et dans une moindre mesure au PSC socialiste, allié des socialistes de Madrid mais demeurés bien différents à beaucoup d’égard.
    Dire que la langue est perdue ou très menacée est le propos constant des indépendantistes d’ERC, dont le chef Carod-Rovira est du reste de père aragonais ...
    Bref,les prognostics sont délicats : celui que donne Vincent est possible mais ne me parait nullement certain.

    Réponse de Gasconha.com :
    Merci Gérard pour ces informations très intéressantes !

  • Les chiffres que tu donnes sont vraisemblables, c’est à peu près ce que j’ai trouvé aussi.
    Et ils sont très encourageants !
    Ils ne correspondent pas à notre situation d’il y a 25 ans, mais d’il y a 300 ans, si tant est que l’on puisse comparer nos bourgades gasconnes (Bordeaux y compris) à l’immense melting-pot de la Barcelone des années 2010.
    Dans un tel fatras d’influences internationales, de fashion, de genres, de musiques, de pratiques urbaines, un tel pourcentage de catalanophones, c’est tout simplement remarquable.
    Et tu oublies de dire que cette situation ne succède pas à une lente décomposition, comme dans nos contrées, mais à une politique linguistique efficace (arrogante si tu veux, mais efficace) qui a re-catalanisé plus d’un million et demi de néo-barcelonais.

    Alors, certes, le catalan n’est pas sauvé à 100 %, très loin de là, mais il est sauvable.
    Menacé, il l’est bien sûr, mais je ne pense pas qu’il soit extirpable.
    On peut menacer, on ne tue pas à tous les coups.
    Quant à la situation en Roussillon, Cerdagne, pays Valencien, elle est certes inquiétante. L’immigration (et non pas migration interne) des Espagnols (Andalous surtout) à Valence et Elxe a considérablement porté atteinte au catalan, dans le Sud.
    Mais je te rappelle que ces régions ont leur propre politique linguistique, catastrophique et dramatique, et qu’elles ne font pas partie de la Generalitat, qui, elle, a la sienne.
    De toutes façons, je me fous pas mal qu’on ne parle plus catalan dans quelques villes moyennes, si on le parle dans une des plus grandes villes d’Europe et du monde...
    Comme tu aimes à le dire, le monde a changé, et si le catalan pouvait devenir une mode urbaine, cosy, fashion, in et lounge, je serais le premier à m’en féliciter !

  • En fait la comparaison la plus judicieuse serait avec la résistance de la langue française dans l’agglomération de Montréal au Quebec/Canada.
    A peu près toutes les données du problèmes sont, terme à terme, comparables.

    Réponse de Gasconha.com :
    Sauf que le français est encore une des langues les plus "importantes" du monde, alors que pas le catalan.
    [Tederic M.]

  • 25% de locuteurs de catalan à Barcelone, c’est grosso-modo la manière déguisée de comptabiliser les "Catalans de souche" à Barcelone.
    Quand il n’y a plus qu’un quart d’autochtones dans ta capitale (vous imaginez à Paris, 25% de francophones ?), il vaut mieux être pessimiste pour le siècle à venir, non pas sur la possibilité de vivre ensemble, mais en tout cas sur le vivre ensemble en langue catalane.
    Et de toute façon, ce n’est certainement pas la classe bourgeoise catalanophone qui assurera la démographie de la ville dans les décennies à venir.
    Je vois fort bien en Béarn comment en l’espace de 10 ans, l’univers gasconophone s’est effondré, c’est soudain, on se refuse de voir à l’avance ce qui va advenir.

    De toute manière, rien que sur la Catalogne, 34% de locuteurs c’est catastrophique (je rappelle qu’en Béarn, il y a 20 ans, on avait encore 50% de locuteurs).
    66% des Catalans ne parlent pas catalan ! Les catalonophones deviennent une minorité en Catalogne parmi d’autres, à protéger certes, mais dont le poids démographique ne justifie pas qu’il soit fait plus d’égard à la culture catalane qu’à une autre culture, andalouse, sud-américaine, chinoise, qu’importe.
    Les Catalans en sont tellement conscients que c’est en Catalogne qu’émergent pour la première fois depuis le franquisme, des partis d’extrême-droite qui ne sont pas parvenus à rentrer au "Parlament" mais étaient à deux doigts d’y parvenir.
    Si ce ne sont pas les symptômes d’une crispation identitaire, je ne sais pas ce que c’est.
    Il faut ajouter en sus l’échec total du nationalisme type ERC, les amis de nos occitanistes bien-pensants.

  • Mon PS n’est pas passé :
    la situation la plus comparable terme à terme est celle de Montréal.
    Les prognostics devraient être parallèles dans les deux cas.

  • Adishatz, décidement ne peut pas s’empêcher de régler ses comptes avec les occitans...
    parle tu catalan ?..
    Je vais témoigner un peu comme P Lartiga quand il va en Euskadi.
    En effet il m’est arrivé d’aller souvent en Catalogne pour des raisons professionelles, ne parlant pas trop le catalan à l’époque il m’est arrivé souvent de m’exprimer en occitan du Béarn ou gascon et là, surprise, pas de soucis, j’ai pu échanger sans problèmes.
    Maintenant que je parle catalan, dans la rue à Barcelone ou ailleurs si je fait l’expérience de m’adresser à des inconnus en catalan pour voir si effectivement le catalan est parlé tous les jours dans la rue, je m’aperçois avec joie un peu comme Philippe en Euskadi, que les [gens] parlent catalan à condition de le parler.
    C’est pourquoi Vincent tes grandes théories sur tout et tout le temps commencent sérieusement à me "harter".
    Un seul but à l’arrivée, prouver que l’occitanisme est une gangrène.
    Dans tous tes articles des critiques fondées ou infondées mais jamais de propositions concrètes pour nous dire ce qu’il faudrait faire pour "sauver" le gascon par exemple..
    Moi aussi casser, critiquer, je sais faire, facile.
    Mais construire ou proposer ça c’est plus dur...
    Je ne vais pas à nouveau raconter ce que les gens ici en Béarn, qu’on les appele occitanistes ou béarnais ou gascons ont faits et font toujours pour la transmission de langue.
    On peut critiquer certes mais au moins ils font..
    Toi tu fais quoi à part de constamment ramener ta science, il est vrai j’avoue que tu es très instruit et intelligent c’est pourquoi ce serai mieux pour tout le monde que tu mettes la même énergie à proposer et construire l’avenir que t’épuiser à bâtir cet argumentaire ridicule anti occitaniste.
    Ou alors s’il te semble que c’est foutu pour notre langue et notre culture, fait autre chose mais ne rends pas les autres responsables, c’est lâche surtout quand soi même à part persiffler on n’a rien fait pour changer ou faire évoluer les choses.
    OC qu’em harta adara !!!
    Miqueu

    Réponse de Gasconha.com :
    Je ne connais pas tous les actes de Vincent.P, mais... La seule observation de son travail sur le web, et précisément sur Gasconha.com, avec la matière considérable et de haute tenue qu’il a apporté et continue à apporter, par exemple dans la partie "lòcs", rend les reproches sur une éventuelle stérilité totalement déplacés !
    Ou alors, c’est qu’on considère qu’une action qui s’exerce dans les médias, sur le web, n’est pas une action réelle.
    Mais alors, ce serait aussi offenser le webmèste de Gasconha.com !
    [Tederic M.]

  • Je me demande en quoi la reprise de statistiques officielles sur l’usage du catalan dans l’aire urbaine de Barcelone relèverait d’un esprit de système par trop excessif.
    Après, que je trouve dramatique que seulement un quart de la population de Barcelone parle le catalan, c’est affaire de sensibilité, il me semble impossible de catalaniser 75% des habitants de l’une des plus grandes métropoles d’Europe.
    Et d’ailleurs le souhaite-t-on ?
    Tout comme en Gascogne, l’avenir passera probablement par les petites villes moyennes qui auront trouvé le moyen de se déconnecter des réseaux insufflés par la métropole (chez nous Toulouse et Bordeaux), mais même là, je suis pessimiste car le réflexe métropolitain me semble bien ancré. Et à juste titre, parce que la ville est un univers séduisant.

    J’engage une nouvelle fois les intervenants à s’intéresser à la question bruxelloise ou comment le néerlandais disparait en périphérie de la ville, comment les Brabançons flamands entendent lutter (discrimination contre les francophones, scission des arrondissements judiciaires encore bilingues, ...).

    Quant au fait que je ne propose rien (étant donné que l’activisme virtuel n’est pas encore reconnu comme productif, il n’en reste pas moins que la fréquentation d’un blog autour du fait gascon par des centaines de personnes fait plus qu’une pastorale organisée dans un village), je n’ai très certainement pas envie d’aider un mouvement moribond qui se ridiculise encore aujourd’hui avec des affiches de la sorte : en quoi chanter en occitan, gavé de subventions, est-il de la dissidence ? C’est quoi cet éloge du tribalisme écolo-pop ? Mes pauvres ancêtres papouïsés.

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  • Vincent, 35% de locuteurs citoyens d’une des plus grandes métropoles du Monde, c’est beaucoup, beaucoup plus que 50% de locuteurs parmi les derniers agriculteurs béarnais.
    Par contre, la moitié seulement de la population béarnaise des années 40-50, alors essentiellement rurale, capable de parler gascon, ça c’est grave, et laissait présager ce qui s’est produit depuis...
    Les 35% de locuteurs actuels à Barcelone sont le fruit d’une reconquête, résultant d’une politique linguistique rigoureuse.
    Pourquoi c’est beaucoup ?
    Parce que c’est peut-être moins qu’en 1640, mais c’est beaucoup, beaucoup plus que ce que ça devrait être.
    Tu uses admirablement, en grand rhéteur, de la relativité des chiffres, pris soit comme des données brutes, soit comme des données relatives.
    Un chiffre n’a de sens que mis en relation avec une situation antérieure, un contexte, des mécanismes ayant conduit à ce point.
    Tu veux comparer avec la situation du français à Paris : si ce n’est pas une boutade, c’est une telle incongruité dans ton réquisitoire, que l’assistance en pleurerait de rire...
    Compare-t-on une ville assiégée avec la métropole-mère d’un des plus prospères états européens, puissance coloniale des plus rodées ?
    Je confesse mal connaître la situation diglossique à Bruxelles, mais je sais que le phénomène a été étudié.
    Bruxelles, vieille cité flamande, est aussi linguistiquement assiégée, et ça je le sais.
    La même année où les ambassadeurs de la Généralité venaient présenter à Louis XIII des requêtes entièrement rédigées en catalan, Bruxelles possédait un gouverneur espagnol.
    Les meilleurs artistes du Brabant et du Hainaut, depuis le Moyen-Âge, employaient la langue française.
    Ils mettaient généralement leurs talents au service de princes francophones, plus à même de le monnayer que leurs cités-états perpétuellement grevées par l’impôt sur la guerre.
    Voir la destinée des musiciens Dufay et Binchois en Bourgogne, Ockeghem en France, donnant naissance à l’école franco-flamande.
    Le Hainaut était possession bourguignonne, donc francophone, et à Bruxelles (en Brabant, juste à côté) il est probable que le rayonnement de la langue française y ait été fort et précoce, quoique la ville fût censée se trouver en zone flamande.
    La géopolitique bruxelloise contemporaine est le fruit de l’extrême complexité linguistique de cette zone.
    Bruxelles, en somme, a toujours été une zone internationale.
    Barcelone, c’est une autre géopolitique, un autre territoire, d’autres mécanismes.

  • Papouisés... Voilà un mot qui va faire fureur, je pense que tu l’as mis là en toute connaissance de cause.
    On appelle ça un trait de bravoure. Les Béarnais seraient-ils des Papous pour les Papous ?

  • Pour ceux qui lisent l’espagnol : vous aurez lu ici les prémices d’une vague de fond.
    Presque 20% des votes à Vic. Les occitanistes ont intérêt à mettre à jour le logiciel d’interprétation de leur chère Catalogne.

    www.elpais.com

    NB : Remarquez que le coup des immigrés anciens qui craignent les immigrés récents, on connait ça en Gascogne, en Lot-et-Garonne plus précisément.


Un gran de sau ?

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