Lo "tube" daus nadaus gascons ancians : Dàvid

Revelhatz-vos, mainadas.
Estut compausat de cap a 1720 a Bordèu prau poèta Pèir Gobain, qu’èra - per l’anecdòta - de Blaia.
Blaia èra encara gascona d’aqueste temps, e la colonizacion n’èra pas encara pro avançada.
Avem aqui un imatge dau gascon blaiés.

Rebeillats-bous mainades,
Canten Nadau ale...grement,
Lou Hillet de Marie,
Nous beau da sauvemen

En Bethléem, noble Cieutat,
Lou bon Joseph s’en es anat,
L’Emperadou l’abé mandat,
Que menesse Marie,
Qu’ere grosse d’un bet Gouyat,
Mes en toute la Bille,
Nou a lougis troubat.

Rebeillats

En l’estable de Berdoulet,
Marie agut un bet Hillet,
Tant berouyet tant rousselet,
J’ai grand pau d’une cause,
Que si Joseph lou bon homet,
Non capere l’Estable,
Que mourira de fret.

Rebeillats

Anem bede acquet Enfant,
De nostres bribas l’y portran,
Mas be nous cau garda dau can,
Quan seran à l’Estable,
Force ribanes l’y daran,
Lou Hillet de Marie,
S’en sadourera plan.

Rebeillats

Lous Hillets y bolen ana,
Un flageoulet l’y bolen da,
Per lou enseigna à dansa,
Heds criderent bihore,
A qui es lou can que nous mourdra,
Qu’es au près de la porte,
Per nous garda d’intra.

Rebeillats

Mas be se sont abenturats,
De gros tricots se son armats,
Hets portent lous esclops herrats,
Hets hazen grand tempeste,
Quand passabem per lou peyrat,
Lou can qu’ere a la porte,
De pau s’en es anat.

Rebeillats

En l’Estable s’en son intrats,
Boune Marie comme estats,
Boste Marit es tout barbat,
Aci y a praube coudine,
Boste Hillet n’a pas dinat,
Prenets de nostres miques,
Que l’y aben pourtat.

Rebeillats

L’Ayne se boute à canta,
Et lou Beu se boute à dansa,
A gambada & à sauta,
A quo ere grand cause,
De regarda lou Beu dansa,
Encare d’escouta l’Ayne,
Que tant bere bots a

Rebeillats

Jou l’y dounay mon maribot,
Fallo l’y det son mandillot,
Peyrot l’y det son pa d’esclops,
Et Deliet sa pleine sange,
L’y det à l’heure Gaussemot,
Perrin l’y det sa flute,
Et Micheu son caignot.

Rebeillats

Tres nobles Reys l’an bisitat,
De bets escuts l’y an pourtat
Dedens un coffre plan barrat,
Lou Hillet de Marie
A espiat de tout coustat,
Mas a troubat un homme
Que l’a espoubentat.

Rebeillats

Adieu Marie & Joseph,
Nourrissets plan boste Hillet,
Gardats lou plan que n’age fret,
Gardats lou plan de l’Ayne,
Que ne l’y doune un cop de pé,
Mas be seré grand cause,
Si lou Beu le mourdé.

Rebeillats

Or pregan tous acquet Hillet,
Que n’es tant bet, tant roussellet,
Tant doux & tant gratioset,
Que pusquem ha grand heste,
Et canta Nau per l’amour det,
Pregan à pleine teste,
Aquet petit Hillet.

Rebeillats

Grans de sau

  • E’s parlava enqüera gascon, a Blaia en 1720 ?
    L’autor n’auré pas emplegat lo parlar de Bordèu ?

  • "Pictonismus incipit a flumine Vigenna in finibus Turonensium, desinit circiter fines Burgi oppidi in diœcesi Burdigalensi."

    "Le poitevin s’entend à partir de la Vienne, aux confins de la Touraine, et cesse à peu près à Bourg, dans le diocèse de Bordeaux."

    Scaliger

  • Atau coma Vincenç ec desmostrèt - e cadun se’n pòt avisar aisidament - la toponimia de Blaia e dau Blaiés es encara frem gascona.
    La francizacion, de jo pensat, deu lavetz èster pro recènta, que los toponims gabais augussin pas lo temps de recaperar lo palhat (la couche) gascon.
    Dau temps de las enquèstas Bourciez, ce me sembla, i avè encara vilatges dau Blaiés on trobèvan lo gascon, que son anuits passats a l’Oil. Pensi qu’es recent.
    De mèi, cèrts elements dau parlar d’aqueste nadau (ager au lòc d’auger, pr’exèmple) amuisha que se restaca pas au gascon bordalés, mès au gascon dau nòrd-Gironda.

  • Totun, que seré hòrt estobable avóssinn enqüèra parlat gascon a Blaia au sègle 18au. N’ac crei pas briga pramor qu’èra dejà la Grande Gavacherie.

  • L’enquête de l’abbé Lalanne dans les années 50 a montré qu’il subsistait des foyers gasconophones dans des villages gavaches (Parsac, Montagne, ...), c’était fonction des familles et des alliances en fait.
    Il est assez clair que la toponymie du Blayais est trop massivement et subrepticement gasconne pour envisager une disparition massive.
    L’étude de la toponymie de la Petite Gavacherie montre bien que la colonisation a eu pour conséquence la quasi-disparition de l’intégralité des micro-toponymes gascons, ce n’est pas le cas en Blayais où subsistent des toponymes très caractéristiques.
    Il semble en sus que Blaye n’ait jamais parlé gavache mais un français régional, ce qui accrédite l’idée que la ville est passée directement du nord-gascon au français standard.

  • Je viens de regarder la carte de l’IGN autour de Blaye...
    Je confirme que la micotoponymie y est encore très gasconne :
    la Pouyade, Pelegris, Hontane, Castets (apparemment "le Castel" pour Cassini, mais je suis pas sûr), Souberlaure, Mazerolle, Gradecap, le Cap de Haut, la Cassagne, Loumède, Poncla, la Palanque, Bouhou, Tastat, Cantemerle, Sesque, le Pey, la Valade (plus oc que spécifiquement gascon celui-ci), les Pouyaux, Sesque, le Pey, la Rouille, le Bayle, le Bouil, la Sègue, les Jonqueyres, la Pouyade, la Grela (l’Agrelar probablement)...
    N’en jetez plus !
    Les microtoponymes manifestant généralement une couche relativement récente (200-300 ans ?), il y a une présomption que la campagne autour de Blaye parlait gascon bien au delà du Moyen âge.
    Nos cartes de la Gascogne lingüistique laissent cette zone hors Gascogne parce qu’elles se fondent sur des données de fin du 19e siècle.
    Je suggère que nous considérions que le Blayais est gascon pour une part substantielle (et que nous n’hésitions pas à l’englober dans notre rêve de "Gasconha de doman" !).
    C’est bien sûr à préciser et à consolider par une étude systématique, et comparative avec le pays gabaye qui entoure le Blayais.
    La ville de Blaye, place militaire française, a pu être un foyer de francisation.
    Donc, on peut imaginer pendant des siècles deux mouvements contraires : une tendance à la dégasconnisation à partir de la ville, et à la regasconnisation à partir de la campagne environnante.
    Tant que l’école n’a pas été généralisée, le gascon a pu tenir la corde...

  • Il faudrait compléter l’étude toponymique par trois autres études :


     Une étude dialectale du parler gabay du Blayais, en quoi celui-ci serait plus français, en quoi par ailleurs est-il dit "gabay gascon" par les dialectologues du XIXème siècle (ce que je ne comprends pas). Le parler est cependant probablement éteint.


     Une étude sociologique sur les relations entre Gabays et Gascons. Via un bon ami bordelais aux racines gavaches du Vitrezais, je peux attester de deux faits : d’abord que les Gabays du Vitrezais considéraient que les Médoquins "étaient d’une autre race" (sic), d’autre part que les Gabays du Vitrezais ne considéraient pas les gens de Blaye comme leurs semblables, déjà des "méridionaux", que même ils auraient eu un accent.


     Une étude historique basée en partie sur les relevés généalogiques et patronymiques, car si le sol parle gascon, il faudrait vérifier que les patronymes étaient restés pour partie gascons, en tout cas d’oc, ce qui est loin d’être évident, car le Blayais étant terre de petits châteaux et de grosses demeures, il est possible que la micro-toponymie se soit mieux conservée qu’en Petite Gavacherie, pour partie vaste zone de landes à reconquérir. Je me souviens avoir remarqué en Blayais une certaine proportion de patronymes limousins, ce qui me faisait penser que la colonisation gavache a aussi eu un contingent du Massif Central.

    Réponse de Gasconha.com :
    D’accord sur ce programme. Souhaitons qu’un universitaire s’en empare !
    Pro que la Gasconha sia sonqu’un objècte d’estudis per passionats qui ne son pas pagats !
    Lo noste amic peitevin Eric Nowak, qui viu justament en Blaiés e trabalha suu parlar "gabaye" e sus l’istòria de la populacion de la region vista a truvèrs l’evolucion de la lenga, que poderé tanben ajudar.

  • Pour ce qui est de la toponymie, j’ai eu l’occasion de l’écrire, la toponymie gasconne cesse au Nord d’Anglade, là où débute le marais anciennement dit de "Brau" dans les textes bordelais, autrement dit Braud-Saint-Louis.
    Il doit s’agir d’une zone colonisée plus tardivement (forte proportion d’hagiotoponymes), probablement par des Saintongeais.
    Il y avait auparavant donc un grand marais et une vaste forêt ("Pleine Selve").

    Le fait notable est donc que la toponymie gasconne est encore importante au Nord de Blaye : à Saint-Androny on a des toponymes comme "La Mothe Taudiat" qui permettent d’ailleurs de reconstruire le gascon blayais.
    Toujours à Saint-Androny : Le Ménaudat, La Pastourade, La Sègue, ... A Anglade : Les Bigorres, Berdot, Garouilla, Perdillot, Le Petit Guilhem, Fourat, La Grave, ...
    A Braud, après le marais, je ne détecte aucun toponyme gascon, par exemple le suffixe -at/ade de Fourat ou Pastourade a disparu, on trouve "La Vergnée".
    Le macro-toponyme "Etauliers" est déjà un indice qu’il s’agit là traditionnellement de la limite du gascon : si la zone avait parlé gascon au Nord du marais, on aurait eu "Estableys".
    On n’y détecte d’ailleurs pas de toponyme gascon, alors que dans les villages du Sud (Cartelègue, Campugnan, ...), on a : Bouscade, Le Pontet, Hauquelet (?), Ricadet, Cazaumorin, Casau, Le Pouyau, Cailley, La Font de Gouas, Le Barrail Caillau...

    Réponse de Gasconha.com :
    Oui Vincent, le lecteur de tes grans de sau dans les "locs" de Gasconha.com avait déjà pu noter tes observations.
    gasconha.com—tipdoc=locs&mot=blayais
    Je devrais réviser certaines affirmations écrites au nom de Gasconha.com, et qui sous-estiment la persistance du fait gascon en Blayais.
    [Tederic M.]

  • Bonjour !
    Il ne me reste que un quart d’heure avant d’aller "embaucher" mais je ne résiste pas à mettre mon grain de sel !
    D’abord commençons par une évidence qu’il faut toutefois savoir réaffirmer suffisemment fort : l’occitan a couvert autrefois des terres plus septentrionales, on a pensé jusqu’à une ligne Rochefort-Niort-Poitiers, on sait maintenant que c’était peut-être plus haut jusqu’à une ligne Talmont-Saint-Hilaire-Fontenay-le-Comte-Niort-Poitiers... Donc le Blayais fut d’oc !
    Une autre évidence : le poitevin-saintongeais est descendu jusqu’au milieu du canton de Bourg au 19ème, et les anciens en ont encore le souvenir dans ce secteur...
    Donc le Blayais est un peu comme le Kossovo (si j’ai compris le cas du Kossovo, ce dont je ne suis pas certain) : hier serbe, aujourd’hui albanais...
    Le Blayais fut d’oc hier, aujourd’hui il est poitevin-saintongeais (sauf le sud et centre du canton de Bourg resté d’oc).
    Mais ça ne vaut pas une guerre : reconnaissons cette double parenté !
    Moi je suis pour un enseignement de l’occitan jusqu’à La Roche-sur-Yon !
    C’est aussi une de nos racines poitevines-saintongeaises, l’occitan...

  • Seconde intervention :
    Quel occitan était parlé en Blayais ?
    Je suis pour ma part à 100 % d’accord avec Vincent, la toponymie du sud Blayais (vu de saint-Ciers-sur-Gironde le sud Blayais commence au marais de la Vergne : je devrait dire le centre Blayais) est gasconne (alors que ce secteur entre La Vergne et le centre du canton de Bourg est actuellement poitevin-saintongeais).
    Je pense que ça pourrait être pareil dans le sud du nord Libournais actuellement poitevin-saintongeais.
    Le reste du Blayais a pu être nord occitan de type limousin, c’est à dire identique aux parlers saintongeais et poitevins méridionaux du temps où ils étaient d’oc.
    D’où ici un bémol : attention un toponyme limousin en Blayais ne signifie pas forcément une migration limousine mais peut être un substrat commun au limousin et au parler de Poitou méridional et Saintonge ancien du temps où il était d’oc...

    Le gabaye gascon c’est quoi demande Vincent ? C’est un poitevin-saintongeais où "ch" n’existe pas, où on a "qu" à la place. On y dit "queun" pour "chien" et non "cheun"...
    C’est l’isoglosse séparant le limousin du languedocien qui tout à coup vient couper le poitevin-saintongeais dans son extrème sud : Hé ! on la tient là la preuve (potentielle...) : c’est ici, sur cet isoglosse (ou un peu plus au nord il a pu reculer : on le trouve vers Blaye mais il a pu être vers La Vergne autrefois) que passait l’ancienne limite entre gascon et nord occitan limousin (ou poit et saint ancien) : donc come le gabaye gascon ou "gabaye que" concerne les environs de Blaye jusqu’à l’ouest de Cubnezais (d’apris Tourtoulon et Bringuier) les environs de Blaye (le centre Blayais poit-saint.) devaient donc bien être gascons.
    De plus Tourtoulon et Bringuier retrouvent ce "gabaye que" vers Néac et Montagne : donc dans le sud du nord libournais poitevin-saintongeais : ce secteur (Néac et Montagne mais également éventuellement plus loin en centre libournais si l’isoglosse a reculé) devait également être gascon.

    Réponse de Gasconha.com :
    A Eric : un grand merci pour avoir risqué d’arriver en retard au boulot !
    A tous : évitez cependant l’abus des médicaments contre les maux de tête !

  • Merci à Eric pour ses commentaires linguistiques qui renforcent la réalité du substrat gascon en Blayais et partie du Libournais (j’avais pareillement détecté la toponymie gasconne de Montagne ou Néac), face au substrat probablement limousin du Vitrezais, du Nord-Bourgeais et des environs de Coutras (ma seule hésitation est sur les communes septentrionales : quid de Laruscade qui n’est pas limousin ? Marensin est également très gascon quant à sa distribution).
    L’Isle a également probablement été frontière à un moment donné puisque sur la rive gauche on trouve Camps (qui serait Champs en limousin) et Porchères sur la rive droite (qui serait Pourqueyres en gascon).
    Tout cela mériterait des cartes cumulant les isoglosses, les densités toponymiques, ...

    Et en Petite Gavacherie, c’était du gabay en qu ou en ch ?

  • Bonsoir,

    Merci et bravo à Eric Nowak dont j’apprécie particulièrement le travail.
    Et bravo pour vos interventions sur le site "Au Rendez-vous des langues" de Cap Sciences. Avez-vous lu "Terres et Langages, peuples et régions" de Pierre Bonnaud ?
    C’est un ouvrage remarquable et le second volume, avec l’atlas notamment, est une belle source d’informations.
    Il fait effectivement remonter l’ancienne limite oc-oîl assez haut, Rochefort-Fontenay-Parthenay, Poitiers.
    Il fait également passer l’ancienne limite entre limousin et gascon au nord de Blaye, à peu près sur la limite départementale actuelle.
    Bref, si vous ne possédez pas cet ouvrage, je vous conseille vivement de l’acquérir directement chez l’auteur, à Clermont-Ferrand. C’est à lui que je l’ai acheté.

    Amicalement.

  • Suite à la remarque de V. P. : réponse : la petite gavacherie (enclave de Monségur) a un gabay en "che"... Et je n’avais jamais pensé à ça ! Alors, si mon hypothèse est bonne ("gabay que" = marque d’un substrat gascon à l’ouest ou mi languedocien mi gascon à l’est, pouvant remonter légèrement plus haut que le gabaye "que" si l’isoglosse a bougé), comme dans la petite gavacherie on a un gabaye "che" on tiendrait là la preuve qu’elle est issue d’une migration...

    Pour P. Lartigue. Je suis en contact avec P. Bonnaud mais je n’ai jamais lu son ouvrage en question, m’étant pour l’instant limité à ces multiples études focalisées sur le poitevin-saintongeais. Je vais tout de suite réparer cette lacune. Je sais que P. Bonnaud s’arrête à la ligne Rochefort-Niort (et non Fontenay)- Poitiers : car c’est celle issue des Travaux de Pignon (1960), mais j’ai sur le net et dans mon avant-avant dernier bouquin (Histoire et Géographie des parlers poitevins) montré qu’il faut maintenant tenir compte des travaux de Pierre Gauthier (université de Nantes) qui a démontré au début des années 2000 (c’est tout récent voilà pourquoi on n’en tient pas compte car c’est inconnu) que la toponymie d’oc (en particulier toponymes en "ac") remonte jusqu’au tiers méridional de la Vendée à une ligne Talmont-Fontenay-puis Niort-Poitiers.
    Regardez sur le site de la revue LE Picton, sommaire du dernier numéro, article parlange d’entre Loire et Gironde, vous y verrez que j’y montre la première carte publiée de ces toponymes d’oc septentrionaux.
    Voilà j’arrête là car pas le temps (anniverssire du "drole") mais prochain message pour l’élément principal et initiateur de cette conversation : la chanson trouvée par David ! Mais là il me faut plus de temps...

  • J’essaye de suivre les explications d’Eric et de Vincent.
    Je comprends bien que, comme le Bourgeais, une grande partie du Blayais a parlé gascon jusqu’à une certaine époque.
    Mais justement, la question initiale de ce fil de discussion, c’était la datation de cette "certaine époque" : à quel moment le Blayais a-t-il divergé du Bourgeais ? Y a-t-il eu un grignotage au fil des siècles, et de quels siècles ?
    Le fait que les microtoponymes du Blayais ne soient pas nettement moins gascons que ceux du Bourgeais indiquerait que le changement de langue s’y est fait après la fixation de la plupart des microtoponymes, donc très tard, on peut le supposer.
    A ce sujet, une comparaison entre la carte de l’IGN, les plans cadastraux et la carte de Cassini pourrait être intéressante.
    Hélas, j’ai du mal à lire la carte de Cassini sur Géoportail.
    Au passage, j’ai quand même trouvé que Cassini écrivait "Pontalher" (une forme très occitane) le "Pontaillé" de l’IGN.
    Connaissant très mal le limousin, j’ai beaucoup de mal à détecter des microtoponymes limousins. S’il s’agissait uniquement d’un substrat différent gascon/limousin, on devrait trouver au nord du Blayais des microtoponymes purement limousins, puisqu’on trouve au sud et au centre des microtoponymes purement gascons...
    J’en tiens quand même un, limousin, avec "la Valade"... Mais c’est dans une zone où il y a encore des microtoponymes gascons, il me semble !
    Et puis je vois une modification franche de la toponymie encore quelques km plus au nord, avec les nombreux lieux "Chez Untel".
    Si le Blayais est passé au gabaye, pourquoi pas des "Chez Untel" en Blayais ?
    La couche gabaye en Blayais semble bien mince, ce qui suggère qu’elle s’est posée très tardivement sur le substrat gascon.
    La ville de Blaye n’est-elle pas, de plus, passée directement au français, je repose la question.

    Ensuite, après l’histoire, je tiens toujours à passer à la prospective :
    Plus on affirme l’ancrage du Blayais en Gascogne, plus on doit l’associer aux réflexions sur l’avenir de la Gascogne. De toute façon, le Blayais est présentement dans l’aire bordelaise, donc regarde la Gascogne (enfin, théoriquement, parce que même Bordeaux la regarde relativement peu).
    Dans l’hypothèse (que je caresse !) d’un éclatement du département de la Gironde entre métropole bordelaise et 4 ou 5 pays qui l’entourent, nous pourrions voir avec faveur l’association du Blayais au Bourgeais, au Cubzagais, et au Libournais, malgré la frontière gabaye/oc qui les a séparés à un moment donné...
    Les doubles appartenances m’agréent.
    Comme le pays bayonnais que je vois basco-gascon ou "vascon", je verrais bien le Blayais comme un pays "gasco-gabaye".
    Bien entendu, cela n’a d’importance que si nous savons mettre un contenu culturel sous cette étiquette, et déjà sous l’étiquette gasconne...

  • E’ns pot diser David se la musica de "Revelhatz vos" e’s pot trobar sus Youtube o endacom mei ?

  • Cet échange me fait découvrir que l’idée qui était mienne d’une substitution de population massive (déjà !) et concentrée sur le seul XIVè siècle pour tout l’ensemble Poitou/Charentes (sauf la limousine, bien sûr) et incluant Grande et Petite Gavacheries était inexacte.
    L’emploi de la microtoponymie est en effet très démonstratif.
    Pour la partie ouest de la grande Gavacherie, je lis dans la "rubrique "locs" que la limite historique entre gascon et oil poitevin pouvait être il y a peu (quand exactement ?) la ligne Anglade-Saugon ; je confirme d’ailleurs que le Vitrezais, que j’avais bien connu dans mon adolescence, est, lui, résolument et historiquement saintongeais.
    Par contre, il est frappant qu’on ait toujours prononcé le nom du chef-lieu, dans le Blayais aussi bien qu’à Bordeaux, "Blaye" à la gasconne et non Blaie comme ce devrait être le cas pour une ville d’oil.

    Par ailleurs qu’en est-il des zones centrale et orientale de la Grande Gavacherie, c’est à dire les zones de Guitres et Coutras ?

  • En Petite Gavacherie, il y a eu substitution de population, d’ailleurs la micro-toponymie gasconne surtout vers Saint-Ferme est nulle.
    Il me semble également avoir lu que le Vitrezais avait été saintongeais autrefois, ce qui pourrait coller avec le toponyme "Guirande" (du celte icoranda) de Marcillac qui figure l’ancienne frontière entre Bordeaux et Saintes.

    Pour ce qui est de la région de Guîtres je suis hésitant car les données sont contradictoires.
    Laruscade ne peut qu’être gascon, parce qu’en limousin, cela aurait été Laruchade (Laruchée en oïl).
    Maransin est très gascon comme vocable.
    D’ailleurs, le toponyme "La Guirande" de Lagorce montre bien que la frontière entre Bordeaux et Saintes était bien sur la limite actuelle entre Gironde et Charente-Maritime. Reste que Guîtres est un toponyme limousin : la forme gasconne serait Guistres.
    Au Nord de Guîtres, dans la vallée de la Dronne, Chamadelle figure la palatisation de ca initial depuis (déjà en 1339).
    Idem Chalaures.
    Je pense que le confluent de la Dronne et de l’Isle était limousin, en tout cas la frontière passait là (cf Camps/Porchères).

    NB : Le Vitrezais est un nom d’oc : c’est le pays de Vitrac, avec prononciation plutôt limousine Vitrat d’où "Lo Vitrasés" à l’intervocalique.

  • Si l’on regarde la toponymie au Nord de Guîtres en allant vers Bayas, elle est parfois plutôt gasconne : Berdot, Canday, Le Pourteau, Maugey, ...
    A Maransin : Péristève, Capblanc, ...
    Plus loin à Laruscade : La Bidane, La Cornade, Le Cournau, La Clouque, Garouillas, Le Grand Garrouil, Terrier de Lassalle, La Garosse, La Péguille, Le Peyrat, Les Plaçottes, Le Tricolet, Les Vergnottes, ...

  • J’ai tenté d’avoir un aperçu des noms de famille du Blayais, en passant par Geneanet et en interrogeant pour 1700-1800.
    Les patronymes sont très peu gascons, ni même languedociens.
    Il y a donc une discordance entre noms de lieux et noms de famille, qui est étonnante, et remet en selle l’idée d’un apport massif de population "gabache".
    Très étonnant aussi : sur Saint-André de Cubzac, en principe zone gasconne jusqu’au bout, la proportion de patronymes gascons est presque aussi faible.
    Là encore, je suis incapable de faire la différence entre des noms limousins et des noms poitevins (ce qui renforce la distance que j’ai par rapport à "l’occitan langue unique").
    Il y a un mystère. Plusieurs phénomènes contradictoires se sont probablement confrontés en Bourgeais et Blayais : des gascons ont dû devenir "gabayes" (Blayais), et cela avant la fixation des noms de famille, et des gabayes devenir gascons (Bourgeais) sans recevoir un nom de famille gascon.
    La qualité de citadelle française pour Blaye a pu jouer, alors que Bourg et Saint-André étaient des ports sur Dordogne ouverts à l’influence limousine, mais aussi bordelaise.

  • Je partage totalement ton analyse, Vincent.
    Eric, tu le sais, je diverge de toi sur ce point précis : je ne pense pas qu’on puisse dire qu’un pays est poitevin-saintongeais parce qu’on peut y déceler la présence (ou les vestiges) de colonies de peuplement de parler poit-saint.
    Je regarde Blaye et le Blayais comme une terre occitane gasconne de parler d’oil, non pas comme une terre d’oil.
    La nuance, pour verbeuse qu’elle puisse paraître, me semble toutefois fondamentale.
    Au surplus, glorifier l’identité d’une population de colons en la substituant à celle des populations antérieures me semble un jeu tendancieux, auquel je ne jouerai pas.
    Je ne m’amuserai pas à revendiquer l’identité gasconne de St-Sébastien ou de Fontarabie, par exemple.
    Et je concède aux Basques le droit de faire de Bayonne une ville basco-gasconne, pour tout un tas de raisons ethnologiques et historiques.
    Pour ces mêmes raisons, je pense que Blaye doit avoir au moins la double identité. Virtuellement bien entendu.

  • Non, Eric, le gabay gascon ce n’est pas que ça. Et ce n’est pas à toi que je vais conseiller la lecture du lexique de l’abbé Urgel !
    Au vu de cet ouvrage, sur lequel je travaille en ce moment, et qui offre pas mal de mots spécifiques au Blayais, le gabay gascon est un parler d’oil dans lequel on peut trouver jusqu’à 80% de termes gascons.
    L’abbé du reste en ignore souvent l’origine, ce qui le conduit à des errements etymologiques parfois très éloignés de la réalité : un mot aussi gascon que "lagàs" (tique), il ne parvient pas à en retrouver la source (pour cause, il cherche du mauvais côté) et finit par le renvoyer, au moyen d’une complexe gymnastique intelelctuelle, au latin "plaga" (plaie).

  • Le gascon parlé jadis en Blayais ? J’en dispose de quelques échantillons.
    J’étudie avec acharnement depuis 2009 les parlers gascons nord-girondins (Cubzadais, Bourgeais, Fronsadais...).

  • A propos des patronymes : je crois qu’il n’est pas exagéré de dire que c’est l’ensemble des patronymes du Bordelais non-landais (avec le Médoc) qui est "douteux" quant à sa gasconnité : forte proportion d’anthroponymes (Bernard notamment) communs avec les pays d’oïl, parallèlement moindre présence des patronymes géographiques typiquement gascons, forte infiltration des patronymes gavaches (n’a-t-on pas montré qu’aux premiers temps de la colonisation poitevino-saintongeaise, la population nouvellement venue était majoritaire en Bordelais ?), ...
    L’histoire de cette partie de Gascogne, indubitablement gasconne par sa langue, est quand même celle d’une interface avec le monde septentrional.

    Néanmoins, ma petite recherche sur Cars montre pas mal de patronymes au moins d’oc :
    gasconha.com—tipdoc=locs&mot=Cars+[commune]

  • Je prends la commune de Mazion : les patronymes d’oc sont assez nombreux (je dirais 50-50).
    www.geneanet.org/search/ ?place=mazion

    On trouve avant le XXème siècle (et les migrations vendéennes) : Baignières (?), Coustolle, Taudin, Broquaire, Jeantet, Bellacla (?), Campet, Barada, Ducasse, Pitou (?), Valette, Garderon, Tanet, ...

  • Vodri responder a Gerard Saint-Gaudens : ma sòr a la particion de "Revelhatz-vos mainadas".
    Un escambi d’adreças me permetré de vos la comunicar.

    Réponse de Gasconha.com :
    Que’vs vau balhar l’adreça de Gerard, s’ac vòu.
    [Tederic M.]

  • Comme aurait dit Gaston Leroux :le mystère s’épaissit mais c’est passionnant, vraiment et j’attends avec impatience le résultat des recherches de David (en espérant d’ailleurs que Vincent formalise aussi les siennes).
    Comme l’a écrit Tederic, ces recherches, quelles qu’en soient la [??], rétablissent pleinement le Blayais (voire l’ensemble de la Gavacherie) dans une commune histoire gasconne et dans un projet commun.

    Pas cap de problema, Tederic, ta comunicar la mia adreça mèl a Gaby, que granmerceji d’abança.

  • Jo tanben, que trobi aquesta recerca passionanta !
    J’ai une idée à vous soumettre :
    Le fait que sur de larges territoires, les noms de familles soient non gascons alors que la microtoponymie est restée largement gasconne et que la langue repérée vers 1900 était gasconne sauf en Blayais et quelques autres zones gabayes, me parait venir d’une vague d’immigration massive de "gabaches", tellement massive qu’elle a pu devenir majoritaire dans les terres d’accueil, mais n’a pas, le plus souvent, sauf en Blayais..., entraîné de passage à la langue d’oïl, parce qu’elle s’est suffisamment étalée dans le temps pour permettre l’assimilation lingüistique des immigrants au gascon.
    Me fais-je comprendre ?
    Un exemple : en Argentine, il y a eu énormément d’immigrants italiens.
    Peut-être même que les descendants d’italiens sont majoritaires par endroit, mais l’arrivée de ces italiens a été trop étalée dans le temps pour que se produise un basculement de la langue de la rue vers l’italien.

  • C’est également mon hypothèse :
    atavisme des migrations gavaches (saisonnières ou non) en Bordelais, peut-être depuis l’Antiquité (la Guerre des Gaules a bien débuté parce qu’une population celte entendait migrer vers la côte atlantique entre Bordeaux et Saintes, sans oublier que les Bituriges fixés sur l’emporium de Lamarque étaient originaires de Bourges).
    L’atavisme a perduré jusqu’aux migrations vendéennes modernes et encore aujourd’hui au fond.
    Parallèlement, il faut aussi faire état des migrations limousines via la vallée de la Dordogne.
    Si l’on a une vision plus générale du phénomène, on se rend compte que c’est toute la Gascogne garonnaise qui depuis les temps anciens subit ou accueille, c’est selon, une population immigrée voisine (migrations périgourdino-quercynoises en Lomagne ou Albret, ...).

    Et là je vais faire bisquer David, mais je crois bien que l’on peut mettre quelque peu sur le compte de ces faits historiques la moindre gasconnité des parlers de l’endroit.
    Et je me demande si le style architectural bordelais n’a pas été importé par ces populations.

    Maintenant, nous nous trompons peut-être.
    J’ai aussi la sensation que les historiens du XIXème siècle ont gonflé l’apport gavache parce que "national". Or ils sont les seuls à ce jour à avoir franchement traité la question.

  • Mais ça ne me fait pas bisquer, Vincent, c’est une possibilité, en effet.
    Mais je verrais plutôt une influence d’oc qu’une influence d’oil sur les parlers du Bordelais, et notamment du nord : influence dus et ouest-limousine surtout, donc périgourdine.
    Tu ne t’imagines pas la nombre d’entrées communes aux lexiques respectifs de Cubzadais et du Périgord vert.
    Par exemple, "effondrer" se dit "agalar" en Cubzadais, qui est un terme limousin et seulement limousin.
    Il y a aussi la phonétique.

    En revanche, j’ai noté très peu d’influences phonétiques et lexicales d’oil, sauf en Bourgeais où elle est très forte (cf les collectages de Daleau au XIXe).
    En Entre-deux-Mers, on trouvera des parlers très gascons, avec le /h/ bohat par exemple, mais à la phonétique étrange, comme ces vocalisations du pluriel : las vacas = /lèï bakeï/ ; les vôtres = /leï bosteï/. avac tonique sur la première bien sûr.
    J’y vois un apport limousin, bas-limousin et nord-languedocien, pas d’oil.
    N’oublie pas, Vincent, la grande et profonde altérité vécue entre Gascons du Bordelais et Gavaches, et ce jusqu’à Blaye inclus !
    Pour aller de Bordeaux en Saintonge, il fallait traverser deux fleuves ou un bras de mer !
    C’était vraiment un "ailleurs", ce que les médoquins appelaient l’Estrange, le pays des étrangers.
    Il n’y avait pas de voies naturelles de communication entre Bordelais et Saintonge, tout le contraire du Rhône, par exemple. Garonne et Dordogne formaient bien des frontières naturelles, et les Cubzadais se sentaient - et se sentent toujours - "exposés" dans leur position géographique.
    Alors présence de Gavaches en Bordelais depuis toujours, oui certes, mais toujours perçus comme étrangers, et vaguement méprisés (voir la Rebue de Mèste Jantot, de Mèste Verdièr).
    Il y a même des Bretons en pays de Buch, comme tu sais.

  • Un mot encore à propos du gascon du Bourgeais-Blayais tel que les relevés de Daleau nous le montrent : à des traits linguistiques d’oil (comme le pronom personnel sujet : il pense = "ol pensa" ; il pleut "o molha"), il faut noter des traits gascons et même hypergascons marqués, comme le /h/ bohat et la voyelle prosthétique avec redoublement : résine = "arrosina", oui, oui, entre Bourg et Blaye !
    Le thétacisme et le rhotacisme gascons sont bien présents aussi, encore que ce dernier un peu moins...
    Le noël de Gobain, dans lequel je persiste à voir une survivance ou une réminiscence du gascon jadis parlé à Blaye (pas seulement, mais conjointement sans doute avec l’oil), il nous montre bien la forme "caler", dont ce doit être, à ma connaissance, l’attestation la plus tardive en gascon du Bordelais.


Un gran de sau ?

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