Libournais - Castillonnais

Saint-Philippe-d'Aiguille

- Vincent P.


 

Saint-Philippe et ses morts

Cette contrée du Castillonnais, dont la langue était encore gasconne par de nombreux traits, et dont l’appartenance au Bordelais n’a jamais été mise en doute, a connu cependant un métissage local, et c’est tout à fait attendu, du fait de la position frontière.

Le monument aux morts du village en donne une idée :

Augrand : patronyme assez massivement local pour ce qui est de la souche de la France du Sud-Ouest, concentré en Entre-deux-Mers et Libournais

Barthère : c’est une migration sud-gasconne. Paradoxe amusant : le patronyme au début du XXème siècle était le plus fréquent dans les villages autour de Toulouse, côté languedocien ! Les hasards des migrations.

Berger : impossible sans une étude généalogique de savoir la souche.

Billat : un patronyme limousino-périgourdin net qui a essaimé le long de la Dordogne, dans le cadre des migrations des Périgourdins et des Limousins.

Bord : a priori, la même chose, le foyer le plus intense étant en Creuse moderne, avec cependant de fortes proportions en Périgord.

Bordier : patronyme d’une grande façade atlantique française, sans de vraies souches dominantes, en tout cas qui n’était pas absent des rives de la Dordogne.

Bousquet : patronyme pan-oc, avec cependant des foyers très intenses dans les contreforts méridionaux du Massif Central. Cela étant, le patronyme Bousquet n’est rien de rare en Bordelais.

Chantagrel : la souche semble auvergnate, et il est probable que la personne de ce n’a pas fait souche dans la commune, ni aucun membre de sa famille, car on ne trouve pas de naissances de Chantagrel en Gironde.

Colombet : si la souche est locale, elle est périgourdine.

Emile : pas assez typé.

Feytou : patronyme local à cheval sur les départements modernes de Dordogne et de Gironde, le long des rives de la Dordogne. On est clairement sur la preuve de l’existence d’un pays qui humainement transcendait la frontière entre Bordelais et Périgord.

Fourcade : très nettement gascon, malgré le f- initial assez généralisé à l’écrit, avec une distribution même plutôt sud-gascon.

Gianello : une trace précoce d’immigration italienne, il serait intéressant de connaître l’histoire !

Lacour : trop peu typé.

Lagorce : souche périgourdine nette.

Lagrange : trop peu typé, là encore, mais enfin, il est loisible de constater tout de même que ce patronyme dessine en intensité sur les cartes de distribution comme un parallèle de la Dordogne, le fleuve.

Laudeat : patronyme disparu, Geneanet mentionne de rares Laudeat en Périgord, autour de Mussidan, donc non loin, il suffit de descendre l’Isle.

Maumey : cela semble un patronyme nord-gascon très localisé.

Pichardie : encore et toujours un patronyme à cheval entre Périgord et Bordelais, dont la souche semble le Périgord, et qui a essaimé, via les vallées fluviales.

Puanche : patronyme disparu, qui n’a été connu que dans les villages aux alentours.

Rougieras : les sonorités ne trompent pas, c’est périgourdin !

Rouzière : pas de souche locale, ni régionale, une histoire individuelle serait à mener pour élucider la présence de ce patronyme parmi les morts du village.

Segonzat : patronyme périgourdin des villages avoisinants ces confins du Bordelais.

Sitrougne : patronyme qui s’était localisé très précisément ici en Bordelais, mais dont les attestations anciennes montrent qu’il provient de plus loin, en Périgord.

Bref, la situation est nette : nous sommes en présence d’une quasi majorité de patronymes périgourdins, parfois partagés de longue date avec le Bordelais, mais plus souvent faisant la preuve de migrations.

Le début du XXème siècle était déjà une période de forte mobilité en Bordelais, et une étude plus précise nécessiterait de voir ce qu’il en est sur l’ensemble des registres des communes, pas seulement sur les patronymes des morts de 14-18, qui ne sont au fond qu’un échantillon imparfait des personnes domiciliés à Saint-Philippe dans les années 1910.

Reste que je crois que la tendance lourde est présente : celle d’une "infusion" des Périgourdins vers les rives bordelaises de la Dordogne, probablement à date ancienne, ce qui explique sans nul doute la très faible typicité du nord-gascon des alentours de Castillon, et plus largement du Libournais, dont la toponymie marque pourtant, bien souvent, une gasconnité plus forte.

L’on retrouve le même phénomène en Bourgeais et Cubzadais : une toponymie parfois même très typée, des patronymes plus hétéroclites et métissés.


 

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