Rouchaléou

Nom typique de la petite lande (vers Préchac, Captieux...). Je l’interprète comme une gasconnisation du nom gavache Rocheleau/Rochereau... migration très ancienne.

On retrouve ce phénomène dans la toponymie : les Andraoudes (cf Andraud), Berjounéou (Berjonneau), Bouléouts (ex. Boutéouts = Bouteau), Bouyréou (Boireau), Bouytaout (Boiteau), Chipaou (Chipeau), Coundéou (Condeau), Gazenaou (Gazeneau), Grugey (Grugier), Moucéou (Mousseau ?), Passeréou (Passereau), Poutchéou (Poucheau), Reléou (cacogr. de Rouleau), Terracheyre (fém. de Terracher), Tisséou (Tissaut)...

Gaby
en graphie alibertine :

Rochaleu

Grans de sau

  • Les attestations de Rouchaléou semblent en effet assez tardives (Geneanet n’en donne qu’une avant 1750).

    Que hè gai de véser l’agilitat qu’avèvan los nostes ajòus de transpausar en gascon ua terminason francesa -eau, -aut, -aud..., e de gasconizar l’ensemble deu nom (lo "o" de Richereau vasut "ou", probablament tanben la prononciacion deu "ch" estot gasconizada en "tj"...).
    Qu’èi remarcat tanben lo lòc "Chatéou" qui dèu vénguer de "Château", e qui’s devèva prononciar "tjatèw".
    Aquestas gasconizacions, pensi, que son enqüera mei frequentas entaus noms de lòcs taus qu’us tròbam a l’òra d’ara, e qui resultan deu lengatge parlat de dus cents ans a.
    Mès anar dinc a gasconizar a l’escrit noms de familha destinats aus registres oficiaus... que calèva estar hardits !

    Qu’avèn integrat lo modele generau de transpausicion (Bordeaux = Bordèu...), e sabon tanben har transpausicions inversas : Pojòu -> Poujeau, Poishiu -> Pouchieu, Lahitau -> Lahiteau, Costau -> Cousteau, e tanben Peirahita -> Pierrefite...

  • Autres exemples, selon moi :
    En Chaoubéou, 32 Sarrant (IGN), que je vois venir d’un Chauveau d’oïl,
    et bien sûr mon cher Haoubéou/Hauveu, pour lequel je soutiens l’hypothèse d’un "Fauveau" gasconnisé (c’est peut-être encore plus compliqué).
    (Réaup-Lisse)
    Haoubeou

  • Difficile à dire, le suffixe d’origine oïlique -eu, transcrit -éou en franco-gascon, a été adopté de longue date en gascon, dès le Moyen-Âge.

    Il est évident que les patronymes étaient adaptés et que les équivalences -eau/eu étaient connues des locuteurs, peut-être même que l’origine régionale des migrants oïliques faisait que les diphtongues étaient encore prononcées par ailleurs, d’où facilitation du passage.

    Reste que dans le cas de Rouchaléou, on ne peut pas évacuer le fait qu’il peut s’agir simplement d’un sobriquet indiquant une origine, "Rochelais", ou en lien avec une anecdote évanouie, avec la grande variété que l’on peut rencontrer dans les suffixes.

    Je dis cela car seul Rochereau est fréquent comme patronyme, entre Gironde et Loire, et que je trouve la mutation de r vers l un peu poussée, bien que possible.

    On trouve le patronyme Rouchalés à Libourne au XVIIème siècle. Un patronyme béarnais Larrochelle également.

  • Élie Vinet, originaire de Barbezieux, en Haute-Saintonge, aujourd’hui dans le département de la Charente (micmac de Saintonge, Angoumois, Poitou et Limousin), à propos de son hameau d’origine :

    « lequel devant que mes ancêtres y vinssent, s’appeloit le village des Planches et maintenant porte le nom des Vinets ; (...) mon aïeul, nommé François et surnommé Vinet, qu’on dit Binet en Gascogne et en quelques autres lieux, père de Pierre et de Jehan, se faschant en son pais près de Montagu (85) en le Poitou, qui marchise à Bretagne-Nantoise et pensant trouver quelque meilleur air en la Saintonge ou Gascogne nouvellement pacifiées, pais lhors la plus grande part en friche, à cause des longues et continuelles guerres de la France et Angleterre, se mit, lui, sa femme, ses enfants et tout son autre meuble en une charrette que quatre boeufs traisnoient aiseement : et tant piqua en cet arroi qui arrive là, en l’an mil quatre cens septante, et s’i arresta au moien du bon recueil et hesbergement que lui fit le Seigneur du lieu. »

    Le témoignage est intéressant à deux titres :

     Il atteste de la poussée migratoire en provenance du Poitou et de la France de l’Ouest, vers le Sud-Ouest (Saintonge et Gascogne, cette dernière dans le sens de Bordelais où Vinet est fixé).

     Il atteste de la mutation phonétique V > B sur un patronyme "gavache", Vinet, à savoir qu’Élie Vinet, à Bordeaux, devait être appelé Binet. Cf le patronyme girondin Bibonne qui est Vivonne en Poitou.

  • A propos du toponyme "En Chaoubéou" de Sarrant : une famille Chaubeau est attesté dans la paroisse déjà au XVIIème siècle.

    Il doit s’agir d’une vieille migration gavache, gasconnisation partielle d’un Chaubeau dont la toponymie nous apprend donc qu’il était prononcé Chaoubéou par les Gascons.

    Intéressant : on retrouve également à date ancienne le patronyme Chaubeau en Libournais ainsi qu’en Tonneinquais. Même phénomène, sauf que le patronyme a disparu en ces lieux.

  • La mutation r > l peut s’expliquer par le fait que le r soit roulé.
    Effectivement, le sens "originaire de La Rochelle" est une bonne idée, d’autant plus qu’il existe une variante ROUCHALEY dont c’est sûrement l’étymologie.
    Mais si la gasconnisation avait été totale, on aurait eu... *Rouqueyrés ?

  • Il était impossible que le toponyme oïlique "La Rochelle" et ses dérivés soient regasconnisés, car de toute évidence, quand la ville a pris de l’ampleur, c’est sous ce nom qu’elle a été connu.

    Bref, pas de L’Arroquèra ... mais bien une adaptation de La Rochelle, difficile à graphier en alibertin : très franchement, ça ne peut pas être autre chose que "La Roishèla", soit en franco-gascon : "La Rouchèle".

    Les Basques disent Erroxela, ils fréquentaient la rade, dite des Basques justement.

    NB : Le patronyme béarnais Larrochelle est ancien et bien ancré autour de Thèze (ce sont mes ancêtres d’ailleurs). Il peut s’agir d’un sobriquet pour un protestant par exemple.

    NB 2 : L’existence parallèle de Rouchaley dans la lande bazadaise laisse penser qu’il y a alternance de ces suffixes de manière naturelle.

  • Il y a une foule de noms passés du français en V au B à cause de la prononciation gasconne : exemple ce texte de 1603 chez un notaire à Bordeaux :" la bille de Bourdau...les boisins et les bignes", voir aussi mon article sur internet "les gavaches.
    Adishatz"