Regard sur la Catalogne des élections du 27 septembre Succès et limites d’un régionalisme aujourd’hui

- Artiaque

P.-S.

Tous les commentaires sont bienvenus. Il est forcément intéressant pour les Gascons de regarder ces résultats : la Catalogne est si loin et si proche, sur bien des aspects...

Grans de sau

  • Finalement, ce ne serait pas - en gros - ceux qui parlent catalan qui votent pour l’indépendance ?
    Pour nous, la Catalogne (Sud) est bien un autre monde...

  • Me concernant, je n’ai jamais compris l’intérêt d’une solution étatique pour la Catalogne :

     La Catalogne bénéficie de l’un des régimes d’autonomie les plus poussés d’Europe occidentale (éducation, santé, police, ...). Reste la question du prélèvement de l’impôt sur le revenu, qui doit pouvoir se négocier.

     C’est couper la Catalogne de son environnement immédiat, dont les communautés catalanophones voisines : les Països Catalans existent, au sein de l’État espagnol et il ne tient qu’aux Catalans d’imposer le fait catalan.

    Ce qu’ils ne font pas : très peu d’hommes politiques catalans ont une carrière à Madrid, sauf nouveauté : Albert Rivera de Ciudadanos, parti de centre-droit aux tendances recentralisatrices.

    Il est certain que le PP au pouvoir à Madrid, pour des raisons électoralistes, a aggravé la situation, par des brimades à l’endroit de la culture catalane (qui est toujours menacée, notamment autour de Barcelone), des maladresses insignes dès les années 2000 via une opposition rabique à l’Estatut puis aujourd’hui, par un légalisme attentiste ridicule : la politique, c’est du panache, c’est la négociation, c’est réformer un texte constitutionnel si cela est nécessaire.

    Reste que d’un autre côté, l’alliance contre-nature entre les libéraux de Convergència et les indépendantistes historiques de gauche d’ERC n’avait pas grand sens, d’ailleurs cette alliance a moins de sièges que la somme des sièges de la précédente mandature des deux partis pris séparément, et que de fait, ce maximalisme a favorisé la CUP, parti d’extrême-gauche dans la tradition anarchique catalane, anti-européen, qui ne veut pas d’Artur Mas, accusé de corruption et trop libéral.

    Cela fait beaucoup de politicaillerie ! Oui. Mais il faut aussi analyser comme Tederic le fait : in fine, ce sont les régions où le fait catalan est le plus fort qui votent pour l’indépendance. Ce sont les provinces de Gérone et Lérida, face au multiculturalisme barcelonais et au sudisme plus contrasté de Tarragone (c’est la vallée de l’Èbre, une Catalogne qui tend vers l’Aragon).

    Dans cette optique, les résultats dans le Val d’Aran sont intéressants : le seul député aranais est issu des rangs de Ciudadanos, et l’indépendantisme y est à son plus faible niveau dans toute la Generalitat.

    MAPA ¿Cómo se distribuye el voto independentista en Catalunya ?

    On lit des analyses assez désagréables sous la plume d’occitanistes en vue qui expliquent ce vote du fait des migrants castillanophones. Je suis ouvert à ce genre d’analyses (cela explique pour partie le vote Ciudadanos dans la banlieue de Barcelone) mais les migrants catalanophones avec résidence secondaire sont au moins aussi nombreux en Val d’Aran. Bref, cela n’a pas lieu d’être : la haine des Castillans par l’occitanisme institutionnel, par imitation du catalanisme, est franchement ridicule.

    Il est clair que le Val d’Aran, dans sa majorité, ne se sent pas concerné par le processus catalan, n’est pas sensible au romantisme du nationalisme catalan, pour des raisons évidentes : vallée pyrénéenne lointaine, reliée par un tunnel qui donne autant sur l’Aragon que sur la Catalogne, de langue vernaculaire gasconne, dite immuablement "aranaise" par les autochtones, le Val d’Aran a développé une sociologie politique prudente, sensible aux intérêts commerciaux de ses habitants, une collectivité qui pratique la négociation directement avec Madrid.

    Bref, pour le plus grand désespoir des occitanistes, qui ont appelé à voter pour la CUP ou JxS, les Aranais sont légalistes et modérés, très pyrénéens, comme l’est plus marginalement la Ribagorza voisine.

    Pour l’occitanisme, l’idée que la vallée jouerait comme un rôle de pont entre une Catalogne indépendante et le mouvement occitan tombe à plat ... Les Aranais sont avant tout intéressés par les problématiques valléennes, la préservation du statu quo et mûs par une méfiance grandissante à l’endroit du centralisme catalan.

    Sur ces points, le vote aranais est presque réjouissant, en ce qu’il fait la preuve que l’occitanisme a complètement perdu le contact avec la réalité et n’a pas vu venir ce vote légaliste. Sur le fond, il semble comme confirmer une fatalité gasconne, une acceptation de l’acculturation au fait grand-national (espagnol dans ce cas), mais cela s’explique peut-être aussi par l’absence de mouvement gascon fort côté français.

  • Depuis mes souvenirs des trois ans et demi passés en Catalogne entre 1996 et 1999, je ratifie tout à fait tant la lecture analytique du document mis en ligne par Artiaque que les conclusions de Vincent.
    J’ajoute que la zone intérieure, la plus indépendantiste, est celle qui parle le plus catalan, et qui s’est faite connaitre dans l’histoire des derniers siècles par son opposition constante au pouvoir central, surtout dans sa version libéralo/étatiste au temps où cette option s’incarnait tant dans la monarchie isabelline (règne d’Isabel II) que dans l’éphémère République des années 1868/1872.
    Cette zone était alors, avec la Navarre et une bonne part des Provincias Vascongadas (l’Euzkadi actuel) très largement acquise à la cause carliste lors des trois guerres civiles déclenchées autour de cette cause au XIXè siècle.
    Il est étonnant de voir la permanence de certains courants souterrains, même réapparaissant à travers des formes qui eussent horrifié les ancêtres des habitants actuels de ces zones.

  • A Voste parle d’ espanholisme presque avec regret ! C’est trop drôle ! Les Aranais auraient-ils peur des catalanistes de l’ensemble occitano-catalan ? Du peuple-frère ???

    On rêve aussi d’indépendance pour Aran Libre ? Occitanisme, catalanisme, aranisme, espagnolisme...personne ne semble aimer son voisin !Vive les indépendances des peuples aliénés ! Libertat ! Libertat ! Libertat !

    Sans parler des "sécessionnistes" linguistiques gasconistes ou pire : béarnistes ! Ceux-là ils sont terribles, vénéneux, mortels comme les amanites phalloïdes ! A éradiquer d’urgence avec une croix occitaniste sur le front au fer rouge ! Au bagne ! Dans la Garonne ! Dans l’Adour ! Dans les Gaves !

    En décembre les élections régionales françaises, encore plus rigolo !
    Quels noms pour les régions, quelle capitale ? Le retour des Wisigoths ? Des Jacobins, des Girondins ? La Septimanie ? La Vasconie ? La Languonie ?
    Vous avez dit Union européenne ? Europe des Régions ?
    C’est quoi une région en France ???
    Un administratisme !

  • Escric en català perquè per fer-ho en gascó o francès em caldria força temps. Ja assajaré d’escriuré amb els mots més semblants possibles perquè se’m comprengui.

    Certament, el vot sobre la independència està fonamentat molt majoritàriament en la llengua que es parla. A Catalunya hi ha dues comunitats lingüísticament parlant, la catalana i la castellana. En un 80% o més els vots del sí són de catalanoparlants, d’origen o no, i un 80% dels vots del no són de castellanoparlants.

    No comprenc perquè no s’entén que vulguem un estat per a nosaltres mateixos. Qui és que vol que el manin els altres ? Econòmicament, a més, hi sortiríem guanyant, tot i que, encara que a cops es digui el contrari, el sentiment independentista es fonamenta principalment en el sentiment i la identitat.

  • Jordi, el meu català es ara una mica (e mai qu’una mica !) rovellat i prefero fer una resposta en francès. Aixo serà mai fàcil per a tothom !

    N’étant pas concerné directement je ne me permettrai pas de dire si oui ou non la Catalogne peut ou doit être indépendante. Au plan général votre contribution m’incite à faire les réflexions suivantes.

    Oui, il y a un lien fort entre langue et identité (et sentiment d’identité), bien que celle-ci puisse s’exprimer autrement que par la langue, bien sûr mais les autres aspects sont plus fragiles (c’est bien net chez nous Gascons - autres qu’Aranais - dont le lien à la langue s’est distendu et qui avons du mal à nous définir).

    L’identité crée bien une différence entre « nous » et « les autres » (els altres) mais que sont les conséquences à en tirer ? Faut-il nous isoler « dels altres » et jusqu’à quel point ? Faut-il nécessairement concevoir un cadre où « els altres » n’auraient pas voix au chapitre dans des affaires que nous avons nécessairement en commun ?

    Transcription politique : une « nation » (au sens identitaire du terme) doit elle absolument coincider avec un Etat séparé des autres ? C’est là une conception créée par le XIXè siècle soit dans sa version romantique allemande (la nation c’est l’ethnie – pas forcément avec des connotations de race, évidemment – cristallisée politiquement) soit dans sa version française. Cette seconde option est une idéologie formalisée par Ernest Renan : une nation c’est la volonté d’être politiquement ensemble, quitte ensuite à oublier qu’elle peut intégrer des ethnies différentes en remodelant les individus comme s’ils étaient membre du même groupe ethno-lingusitique : c’est le modèle libéral – puisque basé sur les individus avec refus de prendre en compte tout groupe intermédiaire - et républicain. Reste qu’on peut se demander si l’Etat-Nation correspond bien aux réalités du XXIe siècle (intégration européenne, etc….). Le sujet est complexe et agite nos contemporains en Europe (et en France particulièrement).

    Quant à la question économique, bien malin qui pourrait prouver si la Catalogne gagnerait ou pas à l’indépendance car cela dépend de questions purement politiques. A court terme elle y perdrait certainement (incertitudes détestées par les acteurs économiques et financiers, problèmes vis-à-vis de l’Union européenne, etc…) mais à moyen-long termes,on ne sait …

    Nosauts qu’avèm autas questions e dificultats qu’aquera e « clonar » lo nacionalisme catalan n’es benlèu pas la bona ideia !

  • N’ei pas ua bona idea ’clonar’ lo nacionalisme catalan per’mor que la realitat gascona ei hèra desparièra.

    L’independentisme catalan qu’a ensajat de har un movement mei republican e jacobin, mes non s’i a pas escadut. Lo movement independentista catalan qu’ei hèra majoritàriament fondat sur la lenga e l’identitat.

  • Vincent P. écrit :

    "Me concernant, je n’ai jamais compris l’intérêt d’une solution étatique pour la Catalogne :

    La Catalogne bénéficie de l’un des régimes d’autonomie les plus poussés d’Europe occidentale (éducation, santé, police, ...). Reste la question du prélèvement de l’impôt sur le revenu, qui doit pouvoir se négocier.

    C’est couper la Catalogne de son environnement immédiat, dont les communautés catalanophones voisines : les Països Catalans existent, au sein de l’État espagnol et il ne tient qu’aux Catalans d’imposer le fait catalan."

    L’idée "d’imposer le fait catalan au sein de l’État espagnol" tient quelque chose de joli : comment cela se ferait-il en concret ? Si l’Etat espagnol aurait été jusqu’ici une fédération plurilingue (à niveau central, se comprend), semblable au Canada ou à la Suisse, je crois que l’indépendentisme catalan n’existerait presque pas. Le problème est qu’il se passe tout le contraire : c’est l’état espagnol qui ne fait qu’essayer d’imposer le fait castillan (dressé d’"espagnol") partout. La fameuse constitution le dit clairement : une langue pour tous, et les autres facultatives pour les région qui en veulent. Comparez cela au Canada ou à la Suisse.

    Quant aux "paisos catalans", ils sont une réalité linguistique et culturelle, mais pas politique. Heureusement qu’on n’essaie pas d’imposer quelque chose que ce soit, du coté de la Catalogne, et à l’aide de l’état espagnol, aux iles Beléares ou au Pays de Valence - cela serait du jacobinisme catalaniste totalement contraproductif (c’est la principal erreur des occitanistes en France qu’il font toujours justement la chose analogue - propaguer l’occitan avec l’aide de l’état, et rien de plus). Mieux vaut de s’indépendentiser, de donner un bon exemple à suivre, et d’espérer que les autres suivront.

    Quant à la politique fiscale, il faudrait prendre en compte deux choses : Primo, beaucoup de choses en matière de services publiques ou d’infrastructures qui dépendent de l’état central en France et sont garanties d’une manière plus ou moins équitable sur tout son territoire, en Espagne ou bien n’existent pas ou dépendent des régions. Secundo, c’est le geouvernement Rajoy qui a déclenché le mouvement vers l’indépendance quant il a forcé les gouvernement régionaux, le catalan inclus, à faire l’austérité à l’échelle régionale. A ce moment, pour le gouvernement Mas et pour CDC (catalaniste de droite) il n’y avait que le choix : ou bien assumer la responsabilité propre pour la politique du gouvernement espagnol anticatalaniste ("les retallades les he fet perquè les ha imposat el govern de Rajoy", com ara diu en Mas), ou bien partir dans la fuite en avant et forger une alliance avec l’opposition catalaniste de gauche (en première ligne ERC) contre le gouvernement espagnol. C’est évidemment le second scénario qui c’est imposé. Tout le reste suit de cela.

  • "Si l’Etat espagnol aurait été jusqu’ici une fédération plurilingue (à niveau central, se comprend), semblable au Canada ou à la Suisse, je crois que l’indépendentisme catalan n’existerait presque pas. Le problème est qu’il se passe tout le contraire : c’est l’état espagnol qui ne fait qu’essayer d’imposer le fait castillan (dressé d’"espagnol") partout. La fameuse constitution le dit clairement : une langue pour tous, et les autres facultatives pour les région qui en veulent. Comparez cela au Canada ou à la Suisse."

    Qu’ei vertat


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