Langon et les petites villes de Gascogne

- Tederic Merger

Deux articles de "Sud-Ouest" ont attiré mon attention sur Langon, ville que je traverse de temps en temps :

 Avis négatif de la Commission nationale d’aménagement commercial sur la création d’un multiplexe de cinéma près de l’échangeur autoroutier, concurrençant le cinéma de centre-ville :
http://www.sudouest.fr/2013/06/29/le-projet-de-multiplexe-refuse-1100515-2915.php
Là, c’est la question du centre-ville qui est posée, les activités se déplaçant à la périphérie.
Mais affleure aussi l’impression d’un manque de dynamisme de la ville. Dans les commentaires de l’article :

  • "Langon est une ville de vieux où il n’y a rien pour les jeunes quand il fait "moche". Bowling, salle de flippers, de baby-foot, de jeux vidéos, etc...)"
  • "Les jeunes de ma famille en âge de conduire se faisaient une joie à l’idée de pouvoir fréquenter un lieu fait pour eux. Comme ils m’ont dit, faute de multiplexe nous irons à Arcin avec les autres potes."
    Arcin : il s’agit en fait du centre commercial de Rives d’Arcins à Bègles (et "La Plantation" à Villenave d’Ornon), à une quarantaine de km de Langon.

Les jeunes (enfin peut-être pas tous... j’espère que certains savent s’occuper sur place...) sont attirés par la grane bile [1], la métropole bordelaise, et s’y échappent en voiture. Seule la création de MacDo et multiplexes autoroutiers pourrait les retenir à Langon, et encore...
Le désenclavement (voir plus bas) est à double tranchant : il favorise l’installation de bordelais et (pas tant que ça en fait) l’implantation d’activités, mais il favorise aussi la fuite des consommateurs vers la métropole voisine.
Finalement, Langon ne pourrait survivre que comme appendice de Bordeaux-métropole, et de toute façon, le vieux centre de Langon serait "out"...

Un wagon de COLAS RAIL en gare de Langon (déc. 2010)

 Langon, ville non enclavée... et pourtant, "elle dort" :
http://www.sudouest.fr/2013/07/05/verite-va-t-il-raccrocher-duel-au-sommet-a-saint-selve-1105941-4626.php
Langon est depuis peu reliée à Pau par "l’autoroute de Gascogne", mais elle était déjà sur l’autoroute Bordeaux-Toulouse (échangeur proche du centre ville), de même qu’elle est sur la voie ferrée Bordeaux-Toulouse (avec VF desservant une zone industrielle), et dispose même d’un port sur Garonne !

 Par ailleurs, Langon n’est pas encore tout à fait engloutie par l’aire urbaine de Bordeaux.

Les nouveaux pays gascons

Donc, se joue à Langon le "drame" des petites villes gasconnes qui, "enclavées" ou non, vivotent, perdant leurs activités au profit des villes moyennes comme Pau, Agen, Mont de Marsan, Dax, et surtout Bordeaux et Toulouse.
Parmi ces villes qui comptent plus ou moins 10 000 habitants dans leur aire urbaine, je pense aussi à Tonneins, Nérac, Condom, Aire sur Adour, Orthez, Oloron peut-être...

Le faible coût de l’énergie pousse au regroupement des activités dans des centres plus gros, et l’environnement administratif et normatif pousse lui aussi à la concentration et à l’industrialisation des activités, décourageant les activités artisanales fortes consommatrices de main d’oeuvre.

Mais Langon a, parmi les petites villes gasconnes susnommées, la particularité d’être très proche de l’aire urbaine de Bordeaux, et prête à s’y engloutir.

Quelles solutions ?

Refuser l’influence de Bordeaux semble impossible.
Il faut composer avec elle. Mais "pas que", comme disent les jeunes !
Il faut avoir une double stratégie : satellite de Bordeaux, certes (mais alors il faut "caser" les bordelais dans un centre-ville réhabilité), mais aussi petite ville gasconne :
retrouver sa fiertat gascoune, s’affirmer comme centre d’un pays rural, avec ses marchés de producteurs, par exemple...
Autres exemples :

  • on dit que le tourisme fluvial a le vent en poupe... les touristes pourraient venir par la Garonne depuis Bordeaux jusqu’à Langon et Saint Macaire, puis repartir par le train, de la gare de Langon, qui est bien desservie. Cela suppose de bichonner le vieux Langon et les quais.
    Langon - Trompe-l’oeil dans la vieille ville
    Tederic M.
  • pousser à l’utilisation de la nouvelle autoroute de Gascogne pour un transport rapide trans-Gascogne en autobus Langon-Pau avec correspondances praticables avec Bordeaux, et utilisation de parkings relais...

Notes

[1grane bile = grande ville

Grans de sau

  • Mon punt de vista per jo qu’èi prampo frequentat Lengon, coma "granda" vila la mèi pròisha :

     Dans la vieille ville, il n’y a absolument rien, à part le centre culturel des Carmes. Le patrimoine est très réduit (église St Gervais, ruine de ND du Bourg, une maison ancienne).
     C’est l’identité "port fluvial" qui serait à exploiter. Je ne vois que ça. St Macaire, St Pierre d’Aurillac, le Tourne, Barsac, l’utilisent. Dans l’idéal, il faudrait faire tout un réseau des petits ports, avec la Réole, Caudrot, Verdelais, Cadillac, etc etc. Autour de la tonnellerie aussi, une activité importante à une époque.
     L’identité "langonnaise" n’existe pas. Historiquement cette ville est en Bazadais ; les vins du coin sont dits du Sauternais (et de toute façon font partie du Bordelais). En plus, cette ville a la malchance d’avoir acquis une mauvaise réputation ("A Langon y a plus de c... que de maisons", proverbe entendu maintes fois et même par un gars d’Eysines !).
     Je ne sais pas si les événements "beauf-gascons" améliorent les choses (fête du cochon, foire aux vins & fromages). Cependant, il ne faut pas oublier les Nuits Atypiques.
     Malgré son manque d’attractivité culturelle, Langon concentre quand même pas mal de structures qui l’avantagent par rapport à Bazas et/ou la Réole (sous-préfecture, gare, grand centre commercial, hôpital avec urgences + clinique privée, lycée qui est un centre d’examen, lycée professionnel)

  • J’ajouterais que la culture gasconne pourrait y être redécouverte avec l’oeuvre de l’Abbé FERRAND (d’une bonne qualité de langue) et les Félibrées des années 1930...

  • Gaby, tu pourrais nous mettre ici un passage qui illustrerait l’oeuvre de l’Abbé Ferrand ?
    E enqüera miélher, un enregistrament ton ?

  • E bé, n’èi malurosament pas d’extrèit de l’abat Ferrand (La Rabagassade, 1879, a les Arshivas departamentalas de la Gironda), i avèvi sonque recaptat de mòts e locucions. Per contra, dens lo mème dialècte, vachiu un poèma de Jan-Maria Buget (de La Rèula), La mòrt de mon ausèth.

    L’èi enregistrat e èi assajat de lo junher, mès coma es en .wma , a pas fonccionat.

    Dens lo nid ont t’amigalhèvi
    Ausèth, que totjorn plorarèi
    Dens la cauja ont t’apasturèvi
    Elàs, ne te tròbi pas mèi !

    T’en ès anat, ausèth aimable
    Que m’as dishat dens mon turment
    Que t’èi donc hèit, jo miserable
    Per me quitar tan tristament ?

    T’en ès anat, e dens mon ama
    Punteja una amèra dolor
    A, t’èi perdut, mon còr se pama
    Ausèth, jo t’aimèvi d’amor !

    Èras lo sol dens mon malure
    Qu’avèi pr’adocir mon shagrin
    E per comble a ma pena dura
    Ne cantès pas mèi un matin

    Quand t’avèi per ma companhia
    L’òra passèva vistament
    Ta via èra un sharme a ma via
    E ta voas un ravissament

    Davant una sòr vièrja encara
    Passèt viste com un flambèu
    Tu l’as seguida, e jo totara
    Vau anar la joénher au tombèu

    Shens dobte au cèu ont es montada
    Avès meditat ton essòrt
    E ton ama a pres la volada
    Devèrt aquera estela d’òrt

    Ren d’ací-bas n’amorisquèva
    Ton còr banhat dens les dolors
    A ton ama que s’anugèva
    Jo respondèvi per les plors

    Mès la-haut jamèi ne broncissen
    Los auratges desensheinats
    Jamèi los bèths jorns ne s’esclipsan
    La via a tota ses clartats

    Una lutz d’amor totjorn brilha
    D’un esclat que ren ne ternís
    E lo plaser totjorn gratilha
    Lo còr de l’ange que bondís.

    Aimable ausèth, a, se podèvas
    Desertar lo cèu un moment
    Un sol moment se revinèvas
    Jo morirí pus doçament !

    Dens lo nid ont t’amigalhèvi
    Ausèth, que totjorn plorarèi
    Dens la cauja ont t’apasturèvi
    Elàs, ne te tròbi pas mèi !

  • E valà !

    Un poèma de Jan-Maria Buget (de La Rèula)
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    var mejsloader;
    (function(){var a=mejsloader;"undefined"==typeof a&&(mejsloader=a={gs:null,plug:{},css:{},init:null,c:0,cssload:null});a.init||(a.cssload=function(c){if("undefined"==typeof a.css[c]){a.css[c]=!0;var b=document.createElement("link");b.href=c;b.rel="stylesheet";b.type="text/css";document.getElementsByTagName("head")[0].appendChild(b)}},a.init=function(){!0===a.gs&&function(c){jQuery("audio.mejs,video.mejs").not(".done,.mejs__player").each(function(){function b(){var e=!0,h;for(h in d.css)a.cssload(d.css[h]);for(var f in d.plugins)"undefined"==
    typeof a.plug[f]?(e=!1,a.plug[f]=!1,jQuery.getScript(d.plugins[f],function(){a.plug[f]=!0;b()})):0==a.plug[f]&&(e=!1);e&&jQuery("#"+c).mediaelementplayer(jQuery.extend(d.options,{success:function(a,c){function b(){var b=jQuery(a).closest(".mejs__inner");a.paused?(b.addClass("pausing"),setTimeout(function(){b.filter(".pausing").removeClass("playing").removeClass("pausing").addClass("paused")},100)):b.removeClass("paused").removeClass("pausing").addClass("playing")}b();a.addEventListener("play",b,!1);
    a.addEventListener("playing",b,!1);a.addEventListener("pause",b,!1);a.addEventListener("paused",b,!1);g.attr("autoplay")&&a.play()}}))}var g=jQuery(this).addClass("done"),c;(c=g.attr("id"))||(c="mejs-"+g.attr("data-id")+"-"+a.c++,g.attr("id",c));var d={options:{},plugins:{},css:[]},e,h;for(e in d)if(h=g.attr("data-mejs"+e))d[e]=jQuery.parseJSON(h);b()})}(jQuery)});a.gs||("undefined"!==typeof mejscss&&a.cssload(mejscss),a.gs=jQuery.getScript(mejspath,function(){a.gs=!0;a.init();jQuery(a.init);onAjaxLoad(a.init)}))})();/*]]>*/</script>

    Ei dit ’’cantas’’ au lòc de ’’cantès’’ perque l’accent èra a mitat esfaçat, mès bon èi la nhiula de tot tornar enregistrar ;)

  • Gaby évoquait plus haut comme une des rares opportunités l’identité "port fluvial".
    Je pense que l’idée a fait son chemin : les quais ont été réaménagés, et j’ai constaté récemment qu’ils avaient retrouvé un début d’attractivité. Mais je ne suis pas bien renseigné sur d’autres projets éventuels de développement fluvial. Ce devrait se faire avec Saint Macaire, qui a un patrimoine bâti remarquable que n’a pas Langon.

    Par contre, un article de Sud-Ouest montre que le vieux Langon commercial ne trouve pas de nouveau souffle.
    Un projet déjà engagé de "Passage gourmand" semble en voie d’être abandonné au profit d’une médiathèque.
    "passage gourmand"... il y avait bien l’idée de miser sur la gastronomie - et pour de petites villes gasconnes, cette idée est naturelle. Mais apparemment quelque chose ne marche pas.

    Le seul commentaire à cet article de Sud-Ouest esquisse une proposition :
    « Il y aura un espoir de développement lorsqu’on retirera la circulation automobile du centre ville afin de le paysager pour qu’il devienne un lieu sûr de promenade, de tranquillité et pourquoi pas s’y déplacer en trottinette. »
    Certains parleraient de "boboïsation" comme remède. Personnellement je le comprends bien. Mais je pense que la population du coin n’est pas prête à abandonner son auto. C’est un problème général. Le mouvement des Gilets jaunes nous le confirme.
    Nous ne revitaliserons pas les centres-bourg et centres-ville anciens si une part substantielle des habitants ne décroche pas du tout-automobile.

    Je vois aussi que le projet de cinéma multiplexe "Grand Écran" en zone commerciale extérieure est relancé : https://www.francebleu.fr/infos/culture-loisirs/le-projet-de-cinema-a-langon-relance-et-de-nouveau-enterre-1516303217

  • Plus de détails sur l’échec de ce "Passage gourmand" :
    https://www.francebleu.fr/infos/economie-social/langon-le-passage-gourmand-enterre-apres-seulement-18-mois-d-existence-1545909728

    J’y suis passé aujourd’hui. Je joins une photo du 1er étage sur la rue Maubec. Belle restauration.
    Le passage commercial lui-même m’a fait bonne impression. Enfin, l’aménagement des lieux, pas sa vie commerciale, puisque, comme le dit l’article, il est en voie de désertion...
    L’idée n’était pas mauvaise. Un lieu très urbain, un peu haut-de-gamme. Le passage joint deux artères encore commerçantes. Il n’y a peut-être pas le potentiel bobo pour faire vivre ce concept à Langon.
    Mais peut-être faudrait-il persévérer...
    Peut-être un jour, quand le vieux Langon - que je trouve malgré tout intéressant, avec sa "rue ronde" etc. - en descendant vers les quais, aura été réhabilité... J’ai vu qu’il y avait des travaux de rénovation en cours, qui sont prometteurs...

    Ensuite, comme le suggère l’article de France bleu et le reconnait le maire, une municipalité n’est peut-être pas dans son rôle en dirigeant une galerie commerciale.

    Sur le projet de mettre une médiathèque à la place du Passage gourmand :
     La réaction d’un élu de l’opposition ("Une médiathèque on en a tous une, j’en ai une dans la poche, mon portable.") me parait pertinente. Sauf qu’on n’a pas encore dans son smartphone tout un rayon occitan - lire ci-dessous...
     Du coup, j’ai voulu voir la médiathèque actuelle, d’autant plus que son site web annonce un fonds occitan.
    C’est vrai qu’elle est un peu à l’étroit. Au petit rayon occitan, il y a de la bonne lecture (et de l’audio aussi) : en vrac et par exemple, Arnaudin, Gasconha lenga e identitat de Halip Lartiga, JF Bladé, Lo trimfe de la lengua gascona de JG d’Astros, du Manciet, le lexique du gascon parlé dans le Bazadais de Bernard Vigneau (curieusement dans le fonds local, à côté du fonds occitan)... Il y a aussi pas mal de languedocien, par exemple Asterix a l’escòla gallesa...

    PS :
    Aux gasconhautes qui se demandent pourquoi je m’acharne à parler d’urbanisme commercial à Langon :
    C’est dans notre travail prospectif sur les petites villes gasconnes : il s’agit de sonder le substrat d’une Gascogne future qui renouerait avec ses centre-villes historiques dans l’esprit "Crear doman a la lutz de gèr" !

  • Alors que je sous-pèse la viabilité de ce "Passage gourmand", j’apprends que le peuple a "fain" à Langon ! Même qu’il est en colère et veut couper les couilles à Jupiter...
    Alors évidemment...

  • Déjà celui qui a écrit cette aimable poésie aurait été avisé de respecter la langue française car avec ses "FAIN", "DONNE LUI A MANGE", "QU’IL VIENNENT", ses arguments sont encore moins convaincants.
    De nos jours, force est de constater qu’avec un Bac en poche on est plus ignare que jadis avec le Certif ou l’entrée en 6ème. Si le gascon et ses langues-soeurs d’oc sont morts, le français, lui, n’est pas vraiment brillant. Pas grave, nos descendants s’exprimeront un jour en chinois, contraints ou non. Mais s’ils sont aussi virtuoses avec les idéogrammes que de nos jours avec le français écrit, alors "ça craint".


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