"Bienvenue dans la lande laide" (04-04-2014)

- Tederic Merger

J’éructe, je m’énerve : on a bousillé la lande. Partout, des lampadaires, des trottoirs, des ralentisseurs, des pavillons méditerranéens. C’est la France laide contre laquelle il semblerait qu’il n’y ait rien à faire tant de nombreuses personnes y trouvent leur compte. C’est une France recroquevillée sur elle-même, petite, minable, la France des haies, de la tondeuse le dimanche, du fantasme de la propriété, une sociologie politique minable qui à chaque élection fait son chemin.

La lande est le terrain propice à pareils changements. La terre n’y est pas chère, le relief est inexistant et puis la contrée, notamment autour de Rion ou de Tartas, est fortement acculturée depuis le 19ème siècle. L’on assiste impuissant à la disparition d’une identité, paysagère, linguistique, mentale. Si au moins ce changement était beau ... Même pas. Nous portons une lourde responsabilité pour l’avenir.
[Vincent P.]

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Grans de sau

  • D’accord sur toute la ligne, à étendre à la plupart des territoires, dans des proportions variables. On fait une pétition contre notre époque ? Chiche !

    Si je cherche sérieusement les causes...
    a- il n’y pas assez de réflexe communautaire, de vision collective et d’usage partagé de l’espace,
    b- la beauté passe après le prix,
    c- les équipements répondent à des normes, réglementations et modes pré-pensées hors-sol, de façon standard et générique, plutôt qu’à des besoins
    d- l’intégration de l’habitat dans le milieu naturel, n’entre plus en ligne compte.

    ... et que je cherche leur origine :
    a- Qu’est-ce qui a cassé la Communauté des voisins, la Besiau jadis fondamentale en Vasconie ? En remontant le temps : la substitution des populations autochtones entre l’exode rural 50-90 et le résidentiel secondaire 50-auj, l’individualisation du travail agricole, forêt et pêche dans les années 60-80, l’arrivée d’ouvriers prolétarisés (allochtones non-reliés à un réseau de solidarité) là où des industries s’étaient installées (années 20-30 notamment), les victoires du capitalisme bourgeois rationnel deuxième partie du XIXe (vente des communaux dans les Landes), modèle républicain français construit entre la Révolution et la IIIe rép qui combat tout ce qui peut se mettre entre la famille et l’Etat.

    b- ça c’est plus largement décrit, notamment tout le modèle de consommation de masse : beaucoup, le plus vite possible, standard, pas cher, de qualité et personnalité minimum. Quel écart entre une vielle maison de famille aménagée par des générations et un pavillon en kit construit en trois mois, où l’on finira seul !

    c- Individus mécontents sans implication collective, on multiplie les normes et le conformisme hors-sol : la tendance depuis 20 ans. Le lotissement avec trottoirs et lampadaires, grillage et tondeuse (et rond-point !), avec supermarché et fast-food en est l’incarnation débile. C’est impersonnel, inefficace, moche, mal intégré, anti-écologique et aliénant mais c’est légal et réglementaire. Allez essayer quelque chose de traditionnel, d’original, d’audacieux, d’innovant, de local, de collectif ou de social, d’enrichissant : vous prenez 20 normes et trois collectifs "touche pas à mon..." dans la gueule et vous laissez tomber. Incapable d’appréhender les besoins réels et d’en discuter, on se plie à des modes et on adopte des idées toutes faites.

    d- Quelle rupture avec cet équilibre qui formait une continuité remarquable depuis le néolithique, peu modifié : construire son habitat en harmonie avec le terroir alentour ! Matériaux, orientation, répartition des activités dans l’espace, lieux partagés, "urbanisme" suivant l’eau et le relief, progressivité douce du domestique au sauvage... B’ei acabat !
    J’y vois la rupture avec la mémoire (on n’hérite plus d’une maison ou d’une terre, on l’achète) avec l’observation (on ne connait que la surface du terrain et la distance avec le travail ou la plage) et le faire (on ne construit plus on fait construire), le recul des métiers liés aux ressources locales bien sûr.

    Un lien avec les choix électoraux ? Peut-être, mais plus avec une pratique politique qu’avec un parti. On se coupe de ce qui se passe autour de soi pour se réfugier dans un cocon bien enclos : mon pavillon+ mon jardin+ ma voiture. De là on montre tout du doigt : "les voisins", "les gens", "les jeunes", "les vieux", "les riches", "les politiques"... le problème et la solution sont extérieurs : qu’on m’aide moi et qu’on les corrige eux !
    Une fois votre bouc émissaire identifié, vous devenez clientèle privilégiée de tel parti : "les riches" —> Mélenchon, "les jeunes" "le public"—> UMP, "les politiques" —> abstention, "les vieux" "le privé"—> PS, "les ploucs"—> les Verts, "l’élite" —> FN et j’en passe...

  • Vous savez - j’en ai déjà parlé ici - ces portes qui semblent sortir de feuilletons américains, et qui remplacent les portes vernaculaires (voir ci-dessous), même dans nos vieilles maisons...

    Lavardac - porte, modèle régional
    Il faudrait préciser les limites géographiques de ce modèle. Il est très présent à Tonneins, par exemple. Attention, ces portes sont menacées de remplacement par d’autres qui ne les valent pas (euphémisme), à chaque rénovation !
    Tederic M.
  • N’oublions pas que les principaux responsables, ce sont les autochtones. Loin d’apprécier une authenticité qui leur échappe, ils se tournent vers une reconstitution de l’environnement urbain. Quant aux landes, elles sont totalement bradées. Ce foncier qui n’aurait jamais du être constructible est vendu sous prétexte de démographiquement bien figurer dans le canton, pour « conserver l’école » et pour les rentabiliser fiscalement.

  • Toujours rétif à l’usage de Facebook. Désolé.
    Originaire du triangle "Pontonx Lesperon Magescq" j’ai un profond dégoût pour ce qui s’y est passé. Dans mon enfance, tout le monde parlait le gascon dans un pays d’une beauté époustouflante. Il n’y avait pas acculturation : on était tout entier en Gascogne.
    Mais - c’est vrai - l’idéologie française était là, tapie, et s’est engouffrée dans la folie dite "progressiste".
    Aujourd’hui, ces landes sont une banlieue.

  • Hé oui, nous ne sommes plus en Gascogne ou en Guyenne mais bel et bien en Franchouillardie ! Venez visiter la Franchouillardie et ses lotissements.
     :(

  • Je veux "rassurer" Labat : le mal ne frappe pas que le triangle "Pontonx Lesperon Magescq".
    Hier, j’ai fait un petit tour entre Réaup, Meylan et Arx, donc dans les landes d’Albret oriental ; certaines photos sont déjà sur le site (par précaution diplomatique, je ne mets pas en ligne le pire).
    L’impression générale est bien, dans les zones habitées, d’une banlieuïsation, et, partout, d’un mouvement général d’enclosure (grillages, barrières, portails, tout est de facture industrielle et jure avec le milieu, avec un style parfois faussement traditionnel pour les portails...)  ; chasses privées, châteaux et manoirs, centres canins, anciennes bordes réhabilitées... tout est bon pour mettre des panneaux "voie privée" ; et demain, les dizaines d’hectares préparés pour des parcs photovoltaïques deviendront aussi des zones interdites...
    Comme on est loin de la culture de l’airial !

    Meylan, petit village apparemment loin de tout, n’est pas le dernier dans la banlieuïsation :

     petit lotissement récent..., pavillons sans racines...

     chemin qui figure sur ma carte IGN d’il y a plus de 30 ans, apparemment coupé par une propriété clôturée...

    Je ne reparlerai pas ici des fenêtre en plastique style série américaine, ni des abris de jardin achetés en grande surface...

    Il y a encore quelques paysages de rêve.


Un gran de sau ?

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