Toulouse la boulimique face à Bordeaux la...

- Vincent P.

Cette ville m’effraie.

Pourtant, Dieu sait si je l’aime, Toulouse : elle est la ville de coeur de bon nombre de Béarnais. Mais le simple fait de rentrer dans Toulouse est un parcours du combattant, entre la nationale devenue autoroute, les deux périphériques...

Le problème de Toulouse et de son agglo, c’est qu’il n’y a pas réellement de frontière naturelle, à la manière de la Garonne et de la forêt à Bordeaux : alors, Toulouse s’étend, s’étend et s’étend encore. Le Tarn a été atteint.

Notre merveilleux attardisme génétique, dont je ne cesse de vanter les mérites, fait que le Gers se défend : viva lo Gèrs ! (Plus sérieusement, il y a une exception gersoise : j’y reviendrai, notamment en agriculture moderne où le Gers fait figure d’irréductible village gaulois).

On connait les raisons : héliotropisme, Aérospatiale... Mais cet afflux soudain de personnes est-il une raison suffisante pour ne pas mieux gérer ?

Tu me demandes de proposer des solutions [1]. Je n’en ai pas.
Peut-être une à vrai dire : cesser de faire de la mobilité une obligation de vie. Mais je n’ai pas envie de creuser cette idée, de peur d’être mal compris. Pour résumer, mon idée est quand même que cet afflux de personnes est avant tout une "déportation economique" organisée : les régions françaises du Nord perdent leur jeunesse et Toulouse, qui les accueille à bras ouvert, snobe sa population locale. Je ne veux pas entrer dans le discours occitaniste de la colonisation française, mais force est d’avouer qu’il y a du vrai.

En même temps, c’est trop facile d’accuser les nouveaux venus de tous
les maux : j’en vois déjà certains me dire que je retombe dans ce vieux travers de "l’estrangèr". En fait, ce n’est pas du tout mon objectif : je dis juste que Toulouse n’est pas faite pour devenir la mégapole que ses édiles imaginent et les départements limitrophes la banlieue dortoir de ce monstre, de briques s’entend.

Nos départements devraient pouvoir développer une économie plus locale, plus proche des habitants. Les ambitions de Toulouse s’opposent à ce principe : Toulouse veut que le Gersois d’Auch viennent acheter ses meubles à Ikéa (et surtout pas chez le menuisier de la ville), veut que l’Ariégeois de Saverdun viennent travailler dans ses bureaux à elle (quelle idée saugrenue que de faire
travailler les gens là où ils habitent !?).

Pour autant, Toulouse ne veut pas de cette population chez elle : elle éloigne les classes moyennes à la lointaine périphérie (de toute façon, elles viendront travailler et faire leurs courses), elle parque les classes
défavorisées dans ses tours
(rive gauche si possible) et elle attire
toute la jeunesse bobo française dans son hypercentre rénové
(qui pue
l’artificialité, briquettes industrielles toutes roses, colombages alsaciens), tout cela dans un français sans accent.

Quelle différence avec Bordeaux ou toute autre ville européenne ? Je
n’en sais rien, c’est du domaine de l’intime conviction. Tout ce que
je constate, c’est que Talence par exemple est encore loin de devenir
Le Mirail. Bordeaux a encore une certaine aristocratie, et la banlieue
bordelaise toujours ce côté populaire gascon. Toulouse est le symbole
de ces cités parvenues, nouvelles-riches
, tout comme ces villages
toulousains qui se découvrent tout à coup ville.

[La photo qui illustre l’article est celle qui illustre le programme "Arc Arena", chez Kaufman & Broad.]

Notes

[1Cet article répond à une demande de Tederic, qui voulait obtenir de Vincent des précisions et aussi des solutions !

Grans de sau

  • Trop de mobilité empêche de tisser des liens durables avec ses prochains.

    Peut-on vraiment se faire des amis si on reste dans une ville un ou deux ans ? Oui peut-être, mais on les perd !

    Et ce qui est vrai pour l’amitié est vrai pour toutes les formes de coopération humaine (y compris la coopération dans le travail) : la durée permet de se connaître, de s’apprécier, de sélectionner ses alliés...

    Alors, aux nouveaux toulousains et bordelais, un conseil : vous êtes arrivés dans des lieux où la vie peut être douce. Ne partez pas !

    Et aux anciens toulousains et bordelais, ne partez pas non plus ! Ou alors juste pour des voyages de découverte...

    Plus largement, la mobilité exacerbée nous empêche de connaître notre milieu.

    Un exemple : à l’heure où on comprend que rien ne vaut les fruits et légumes "du pays", il faut les connaître !

    Et il faut connaître les bonnes adresses pour en trouver...
    Pour cela, il faut du temps !

    • Bonjour,

      Juste pour dire que je suis à Toulouse depuis maintenant 3 ans (avant j’etais à Paris) et je ne veux plus partir :

      C’est tout simplement génial d’habiter ici et de connaitre les gens de la région qui sont tous très sympathiques.

      Quand à l’aristocratie toulousaine, elle existe bien, il suffit juste de se promener dans l’hypercentre pour en voir les traces.

      Ce qui est certain, c’est que pour ma part je trouve dans l’ensemble les toulousains beaucoup plus accueillant que les bordelais, aussi aristos soient-ils (J’ai un frère qui habite Bdx et il a beaucoup de mal à s’intégrer. Il a vécu quelques temps à Toulouse et la ville rose lui manque).

      Ceci dit, je tiens quand même à préciser que je connais des bordelais très sympas avec qui je passe d’agréables moments.

      Bref, tout cela pour dire qu’aujourd’hui encore, malgré une tendance à la boulimie un peu anarchique, la ville rose peut encore faire réver des jeunes gens comme moi (29 ans).

      Vive la Garonne Toulousaine !!

      A bientot...

  • La banlieue bordelaise aurait donc un petit côté gascon...

    Ah bon...

    Mais sinon, c’est vrai, Bordeaux a gardé son petit côté aristocratique... celui que n’a d’ailleurs jamais eu Toulouse, sinon peut être à l’époque romaine...

    Reste à savoir s’ils sont nombreux, ceux qui désirent vivre à l’ombre de l’aristocratie...
    Fils de paysans et petit fonctionnaire, cela voudrait dire pour moi un gentil retour à l’ancien régime, avec de belles demeures que je pourrais aller voir de loin, le dimanche, si le seigneur me permet une sortie...

    Vive l’aristocratie bordelaise... à Bordeaux ! (ou à Arcachon s’il fait beau).

    • Adiù anonyme !

      Apparemment tu ne connais pas la région bordelaise.

      Si pour toi la banlieue bordelaise se résume aux cités du haut Cenon ou Lormont, effectivement on a un peu de mal à trouver le côté gascon.

      Mais sais-tu que "banlieue" ne veut pas dire "cité", contrairement à ce que t’ont laissé croire les médias ?

      Je t’invite à aller constater de toi-même la gasconitude de Bègles, Talence, Bassens, Pessac, Artigues, Villenave, etc... bref les communes formant la banlieue de Bordeaux (c’est-à-dire un anneau de communes jouxtant la ville centre).

      Tu n’auras aucun mal à la trouver (si toutefois tu sors des cités) :

      marchés, match de rugby ou de foot, messes, bars, etc...).

      Concernant le "petit côté arisocratique", Bordeaux a connu une histoire très prospère depuis plusieurs siècles (grâce aux richesses procurées par son port), et il est donc naturel de retrouver aujourd’hui encore des familles aristocratiques issues de cette période prospère.

      Je t’avouerai que je souhaiterais qu’il y en ait plus, de sorte que nos chateaux, notre façade des quais, etc... arrêtent de partir entre les mains d’américains, d’anglais, de japonais ou de multinationales diverses, et restent au sein du patrimoine bordelais.

      C’est également ce petit côté aristocratique qui a fait la beauté artistique de l’architecture bordelaise.

      Mais là non plus, ne confondons pas aristocratie et bourgeoisie néo-bordelaise, cette dernière étant bien plus souvent la cause du côté "froid et hautain" repproché aux bordelais.
      Bordeaux, comme Toulouse, souffre d’une forte immigration de nordistes (région parisienne notamment) mais est définitivement gasconne et donc par définition accueillante et chaleureuse.

      Mais encore faut-il avoir la chance de tomber dans les bons milieux, ceux qui te prouveront que l’ancien régime n’existe plus que dans ton cerveau...

      Toulouse est une ville accueillante (ça fait un mois que j’y vis) où il a l’air de faire bon vivre, si l’on aime les grandes villes (pour ma part j’en ai ma claque, vive la campagne !!).

      Seulement, en plus de tous les problèmes soulevés par Vincent P. (avec qui je suis 100% d’accord !!!), c’est moche... un peu de finesse architecturale n’aurait pas fait de mal...

      Mais stoppons là les comparaisons chauvines Bx/Tlse qui ne mènent à rien...

      Si tu es toulousain, je t’invite à me faire découvrir les bons côtés de la ville rose. Pour ma part, je te propose une balade en agglomération bordelaise (banlieue+ville centre) afin que tu puisse constater la gasconitude du coin. Tederic pourra te donner mon mail.

      Adishatz, et sourie un peu, t’as l’air blasé de la vie !!!

    • Tout à fait ! En tant que Bordelais, j’invite ceux qui ont des préjugés sur notre ville à aller faire un tour aux Capus, à la Victoire, ou mieux encore dans le quartier St-Pierre où l’ambiance n’a rien de froid et hautain !!!


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