D’où viennent eth/era ? lafitte.yan [Forum Yahoo GVasconha-doman 2006-12-24 n° 7810]

- Jean Lafitte

Bonjour les amis,

Il est bien difficile de ne pas faire de la linguistique sur cette liste,
puisqu'on n'a encore rien trouvé qui puisse définir les Gascons et la
Gascogne autrement que par ce qui fut sa langue propre pendant plus de 1000
ans : il suffit de soulever une question d'article dans le nom d'un groupe
de chanteurs pour amorcer un débat dont on ne sait quand il finira !

En se déclarant en accord avec moi sur ce que j'avais écrit de l'article de
la montagne, l'ami Halip ajoute, dans son message d'hier vendredi 22:27 :
« Influence ibérique EL espagnol = ETH gascon ? C'est probable. »

J'y voyais plutôt un parallélisme d'évolution. Or je découvre que c'est
aussi l'opinion du grand hispaniste Ménendez Pidal dans Orígenes del
Español. Dans le cours d'une longue étude sur le passage de ille ou illu(m)
aux formes constatées dans les diverses régions péninsulaires, il écrit
ceci, pp. 336-337, § 63-3 :

« En el gascón del valle de Arán tiene arraigo esta forma ; masculino : « et
baix Arán » ; femenino : « era erba, dera villa » ; plural : « es ans, es
parts, des menes » ; con preposición hay asimilación : « ena lengua », coma
en nuestro documento de Sobrarbe. ‹ En el gascón más meridional que linda
con Aragón y con Sobrarbe, esto es, en Cominges, Bigorra y parte de Bearne
(Olorón.), ocurren formas semejantes ; masculino : » el » o » et », y con
preposición : » det, at » ; femenino : » era » y » dera, ara » [note 3]. Este
artículo el, et, del alto gascón, frente al lu general en el resto de
Gascuña y en el provenzal, y frente a le de Foix y parte del Languedoc,
revela influencia española, coma cree Meyer-Lübke (Gram., II. § 104), o
major un desarrollo común con el español ; cierto que el Alto Aragón,
lindante con esa alta Gascuña, no usa el, sino lo, o, pero la continuidad
geográfica queda establecida por medio del ribagorzano y el catalán, que
tienen el. Por lo demás, el desarrollo de esta forma del artículo alto
gascón es independiente de la de España en cuanto conserva en el femenino la
vocal inicial era, y en cuanto se ajusta a la fonética gascona (et con. su
-ll > -t, castellu > castet ; y era con su -ll- > r, avellana > aueraa).

 » Como la r de (e)ro, (e)ra no responde en Sobrarbe a la fonética local,
hemos de atribuirla a influencia gascona. Acaso pudo [p. 337] apoyarla en
período muy antiguo otra influencia, la del vasco donde es comunísimo el
cambio entre l y r (vasco illargi > vizc. irargi ÂŒluna’ ; esp. vajilla >
bachera en labortano y bajo navarro) [Note 1]. De notar es que el masculino
(e)ro no existe en el gascón ni responde a su fonética (bellu bèt, bella
bèro).  »


 » Note 3 - A. LUCHAIRE, Études sur les idiomes pyrénéens, París, 1879, pág.
229, y para la extensión geográfica, véase ALF 727°, 772°, 853°,1579° para
el masculino, y 224°, 824°, 903°, 1636° para el femenino. G. ROHLFS, Le
Gascon, 1935, págs. 117-118. »

 » Note 1 - Véase Uhlenbeck en la Rev. Intern. de Est. Vascos, IV, 1910,
págs. 76-79 y 113 (también pág. 86 para el artículo guizon-ar-en,
guizon-ar-i). »

On remarquera que Menéndez Pidal signale un "el" gascon avant même "et". En
fait, c’est la forme phonétique devant un mot commençant par l- (ALG VI,
2432). Le savant romaniste suppose donc que "ill(e) + l-" n’est jamais passé
par un stade "et + l-", mais a donné directement "el + l" ; c’est
phonétiquement très vraisemblable ! Et la graphie "classique" si férue
d’étymologie devrait dans ce cas écrire "el larèr", "el lòc" etc., rejognant
la phonétique qui semble remonter aux origines de la langue...

Plus généralement, l’article est un mot auxiliaire du nom, avec lequel il
forme un tout sémantiaque et phonétique, contrairement au pronom eth, era,
de même origine et même forme. C’est donc avec pertinence que Txatti espère
trouver dans des textes anciens les formes » et, eth, etj, etch, ere, era,
es  » (son message du 19 20:37).

Mais pour revenir à l’emploi écrit de ces formes, j’en ai vainement cherché
dans les 3 contrats de locations de pâturages de 1419 publiés par J.-F. Le
Nail, d’après le Registre 1415-1426 de Pey de Prat, notaire de Luz (Mélanges
offert à X. Ravier, pp. 182-211).

Hèt beroy.

J.L.

Grans de sau

  • Juste un mot en passant car je n'ai pas un accès facile à internet depuis où je me trouve : il ne s'agissait pas, à l'origine, de l'article dans le nom du groupe puisque MP essayait juste de faire un jeu de mot avec le pronom "eth de N." (sous-entendu celui de N.) ...
    Sinon je suis entièrement d'accord avec la thèse du "parallélisme d'évoltion" entre "eth" gaqscon et "el" castillan.
    Par contre quand à graphier "eth" en fonction de la façon dont il se prononce (er, el, ed, etj, etch ..) est un autre sujet : on peut aussi aisément se conformer à l'idée que le graphème "-th" dans "eth" se prononce différemment en fonction du son initial du mot qui suit sans en changer la forme écrite. Les Aranais ont fait un autre choix et graphient "er" l'article dès lors qu'il se prononce "er" ou "el". Les glissements entre de l à r en gascon et basque sont connus (et attestent d'ailleurs la parenté entre les deux langues pour les esprits chagrins qui en douteraient encore). Quant à savoir quelle est la chronologie ou la philologie de l'évolution de ille ou illum à eth ou el, seul des études de textes certifiés très (trop ?) anciens le permettraient : avons-nous ce matériau à disposition ? Devons-nous chercher des écrits (religieux par exemple, à St Bertrand) dans l'espoir d'en découvrir sinon de "nouveaux" mais "vierges d'études" ? Merci à l'ami Jean de reconnaître la pertinence de mon espoir.

    B°S²-Aau


Un gran de sau ?

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