"La corrida, c’est le pire Sud qui soit" Vincent.P

- Vincent P.

Trouvé ici :
occitania.forumactif.com/debuta-de-serada-f48/corrida-basta

Enfin une argumentation anti-corrida sérieuse ! (...)

"La corrida, c’est le pire Sud qui soit, celui de mecs et de meufs trépignant et braillant, se délectant du martyre d’une bête splendide, réclamant sa mort, immonde masse tresseuse de nasses, grouillante de préjugés, saturée de frustrations, meute ne vivant que pour voir grossir la meute, œuvrant à son renforcement, voyant dans toute solitude une provocation, une atteinte à la sûreté de son gras.
La corrida, c’est le pire Sud qui soit, un Sud gavé de téléréalité qui va se les vider en regardant la pique s’enfoncer dans la chair sanguinolente d’une bête piégée, humiliée, le Sud des têtes de lard ricardisées et des têtes de cons parmi lesquelles on repère, au premier regard, celles, rougeoyantes, des notaires sans culture, des avocats sans cause, et des vétérinaires dont les animaux se méfient.
La corrida, c’est le pire Sud qui soit, le Sud obsédé par ses propres racines, ignorant tout du feuillage et des oiseaux, le Sud qui a des toiles d’araignée sous les bras, porte un béret enfoncé jusqu’aux yeux, brandit comme autant de cartons rouges ses proverbes, ses dictons, sa prétendue sagesse faite de résignation, de garde à vous, et de soumission à l’ordre établi.
Défenestrons ce Sud et dézinguons la corrida !"

extrait de Corrida, basta ! / Christian Lacombe. -Paris : ed. Robert Laffont,

Grans de sau

  • Il y a erreur d’ailleurs : l’auteur de ces lignes est Christian Laborde, romancier bigourdan, ancien professeur d’occitan de son état. C’est un exemple parmi d’autres de nougaroleries pseudo-universalistes, substrat idéologique de l’occitanisme contemporain.

    Admirons tout de même ce mouvement intellectuel et patriotique qui fait écrire ceci à ses plus illustres représentants : "le Sud obsédé par ses propres racines [...] porte un béret enfoncé jusqu’aux yeux, brandit comme autant de cartons rouges ses proverbes, ses dictons, sa prétendue sagesse faite de résignation, de garde à vous, et de soumission à l’ordre établi".
    C’est du Céline, l’imitation de Paris une fois de plus, la recherche mimétique d’une gouaille par haine de la sienne, trop paysanne.

  • Au passage, Laborde a tort : s’il vise assez bien la bourgeoisie provinciale comme friande de ce spectacle, il a tout à fait tort dans son portrait éculé du paysan aficionado.
    S’il y eut bien une catégorie sociale qui fut réfractaire aux nouveaux jeux sportifs du siècle dernier (rugby, corrida, ...), ce furent les paysans, qui n’y sont venus que très tardivement.
    Ces sports étaient ceux de la ville.
    Même dans les Landes, il y avait une forte dichotomie entre la course landaise populaire et non codifiée et la corrida urbaine (Bayonne, Dax, ...), avec des liens avec le tourisme et le thermalisme.

  • Es pulèu una question d’imatge, e pensi que l’imatge caricaturau dau Gascon - o dau "Meridionau" - es pulèu portada per un public (farré auger chifres confirmats pr’aquò milhor dider) en granda part compausat de toristalha.
    S’enten dehet parlar aleman e olandés as arènas, me sembla (i sui anat dus còps : pas mei).

  • La suite de ce texte si léger :

    "Je sais un autre Sud qui est un sein, une source, un songe. C’est mon Sud à moi, populaire et aristocratique, primitif et savant, ouvert, vivant, vital.
    Mon Sud à moi, c’est Joë Bousquet écrivant La tisane de Sarments à Carcassonne, Claude Nougaro chantant « Locomotive d’or » au théâtre du Capitole, Bernard Lubat jouant de la batterie à des ragondins à Uzeste, André Breton marchant dans les rues de Saint-Cirq Lapopie, une percussion de Dimitri Szarzewski, la pluie dans un roman de Bernard Manciet, le revêtement granuleux de la route du Tourmalet, n’importe quelle rue de Toulouse, le poète Jean-Pierre Tardif rédigeant, en occitan, une petite grammaire arabe, Lance Armstrong accélérant dans la montée du Pla d’Adet, les Converse rouges d’un Lolita, Nabokov marchant, enfant, dans une rue de Pau."

    Comme quoi, quand je parlais de "nougaroleries", je faisais preuve d’un sens de la divination étonnant.
    Moi le Sud que je n’aime pas, c’est justement celui de ces poètes besogneux qui singent l’accent toulousain pour débiter des banalités humanistes qu’un curé n’oserait plus dans un sermon.
    C’est la bobologie occitane, c’est notre Saint-Germain-des-Prés qui rejoue à Mythologies de Barthes.
    C’est l’orientalisme puéril du XIXème siècle.

  • Que Christian Laborde ait son opinion sur la corrida, c’est son affaire.
    Qu’il ait beaucoup de talent, dans une certaine filiation célinienne, en effet, est une réalité.
    Que la corrida à l’espagnole et le folklore des bandas ait trop tendance à s’imposer chez nous comme un substitut à une culture plus autochtone un peu (!) défaillante est une autre réalité (l’alternative est entre ce substitut - ci et une basquisation envahissante sur laquelle j’aimerais un jour revenir).
    Qu’en effet les pratiques "néo-gasconnes" (ou néo-occitanes) comme le rugby et la corrida aient d’abord été boudés par la paysannerie et plutôt acceptées par des couches plus urbaines ou bourgeoises, c’est probablement vrai également.

    Mais de grâce, arrêtons de colporter des à peu-près (dans le meilleur des cas) au sujet des corrida et de leur "mundillo".
    David écrivait il y a quelques semaines qu’on trouvait des foules avinées aux arènes, aujourd’hui il s’agirait de "toristalha" (ce que nous sommes sans doute un peu tous aujourd’hui,non ?) parlant plutôt allemand et hollandais ...

    Non je vous assure ce n’est pas majoritaire et de bien loin.
    Cet été alors que j’arrivais, comme souvent, un peu en retard et dérangeais des rangs assis pour trouver ma place, une brave dame m’a demandé tout fort "on vas atau ?"("on puish !" ai-je philosophiquement répondu).
    Plus sérieusement, je mets à nouveau en garde de ne pas tomber dans le panneau des anti-corridas qui rèvent d’un monde culturellement asseptisé et mondialisé où les courses landaises seront, à leur tour, un jour mises sur la sellette à supposer que les infrastructures la soutenant économiquement n’aient pas, elles aussi, cédé après une éventuelle interdiction entrainant l’effondrement du milieu socio-économique taurin.
    Enfin,je vous renvoie à la mystérieuse parenté entre l’ensemble des traditions et pratiques taurines qu’évoquait un article de Sud Ouest le 2 octobre dernier ("la génération dorée").
    Les principales figures actuelles de la course landaise évoquaient cette parenté qui avec El Juli (Thomas Marty) qui avec Morante de La Puebla (Hugo Viney-Thomas) dans des termes qui ne laissent pas indifférent.
    Mais il est certes permis de préférer la fière conclusion apportée par Matthieu Noguès, qui sera la mienne ce soir, fatigué de devoir écrire ma réaction sur un timbre-poste de 2cm sur 4 et avec un clavier où les majuscules semblent se déclencher toutes seules à mon insu !) :
    "Je suis né là-dedans et rien ne peut changer la course ; elle demeure la course, une tradition, je suis donc tel que je suis".


Un gran de sau ?

(connexion facultative)

  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Ajouter un document

Dans la même rubrique :


 

Sommaire Noms & Lòcs