Débat avec Halip Lartiga LAFITTEJann [Forum Yahoo GVasconha-doman 2006-10-21 n° 7347]

- Jean Lafitte

Puisque le débat public avec Philippe Lartigue prend un tour d'attaque
personnelle, je vais y répondre publiquement, tout en évitant de blesser
celui que je considère encore comme un ami.

Voici six morceaux pris dans trois messages successifs de Philippe dans
l'envoi groupé n° 1297 de ce 20 octobre.

> Quand je vois ces vieux réactionnaires Béarnais ou Gascons qui aujourd'hui
> crachent sur tous ceux qui essaient de faire quelque chose alors qu'eux n'ont
> jamais rien fait m'énerve au plus haut point.

Il est désormais de bon ton de traiter de « vieux réactionnaires » tous ceux
dont on veut dénigrer les propos. Bien sûr, la plupart de ceux qui
critiquent l'occitanisme ne sont pas des perdreaux de l'année ; ceux-ci se
moquent bien de l'occitan comme du gascon. Mais que je sache, en dehors de
quelques chansons de corps de garde, je ne crois pas qu'il soit avéré, sous
quelque ciel que ce soit, que « plus on devient vieux, plus on devient
con ». On a fait remarquer au contraire que le vivier où se recrutent les
« vieux cons » est celui des « jeunes cons » : il suffit d'attendre.

Faisons donc abstraction de ces qualificatifs désobligeants et essayons de
comprendre : la plupart de ces anti-occitanistes ont vu la catégorie
socio-professionnelle des enseignants faire main-mise sur la langue de leur
enfance et, au nom de l'idéologie occitaniste, en transformer l'écriture et
même le vocabulaire. Et cela à titre professionnel, grâce à la loi Deixonne.
Les autres, occupés à gagner leur vie, n'exerçant pas en général un métier
littéraire, ont été dans l'impossibilité d'opposer des faits et
raisonnements pertinents aux assertions des occitanistes. Mais ils ont
rentré cela dans leur coeur et l'ont ressenti comme une spoliation, aggravée
par le sentiment que leurs impôts servaient à détruire ce bien intime
qu'était leur langue « de case ».
Je demande à Halip : s’il n’était pas entré à l’Éducation nationale ‹ sur
concours, et brillamment, je le précise pour ceux qui l’ignoreraient ‹
aurait-il les moyens de faire quelque chose pour la langue gasconne, en plus
de son métier et de ses charges de famille ?
Moi, qui suis de la vieille génération, je ne l’aurais pas pu ; et si je
travaille sur le gascon depuis plus de 20 ans, c’est parce que ma retraite
me le permet. D’autres voyagent de par le monde, vont à la pêche ou jouent à
la pétanque avec les amis. Je ne prétends pas être un héros, mais n’ai pas
peur de dire que je suis un privilégié de pouvoir me consacrer sans souci à
cette cause.
Je ne regrette qu’une chose, c’est le refus de dialogue de bien des
militants qui préfèrent le rejet et l’anathème à l’écoute des arguments
d’autrui.

Halip poursuit :

> De plus, ce ne sont pas eux qui ont souffert mais leurs parents et grands
> parents. Ne soyons pas anachroniques.

Je prépare un article pour le prochain Ligam-DiGaM sur la sociolinguistique
du gascon selon les enquêteurs de l’ALG entre avril 1946 et juin 1952. On y
voit nettement la pauvreté et le caractère arriéré de l’économie gasconne au
lendemain de la guerre, et en parallèle le fait que la grande majorité des
jeunes parents de l’époque, gasconophone entre eux, ne parlent que français
à leurs enfants. On comprend pourquoi, sans avoir à faire un dessin.
Or ce sont ces enfants, non gasconophones, ou si peu, sur qui Halip semble
tourner sa rancoeur. Aurait-il mieux fait qu’eux, toujours dans les mêmes
conditions économiques ?

Au fond, ce qui me gêne beaucoup chez Halip, c’est son acharnement,
anachronique, lui, sur les générations passées, proches ou plus lointaines.
D’autant qu’il est improductif et ne peut qu’augmenter les rancoeurs. de
part et d’autre.

> Si Jean Lafitte ne veut pas que son nom soit orthographié Lahita, c’est son
> droit. Quant à moi, Lartiga ne me gêne absolument pas. Contrairement à ce que
> Jean Lafitte semble dire, ce ne sont pas ses ancêtres ou les miens qui ont
> choisi mais le curé ou le fonctionnaire (un planqué dans un bureau sans doute)
> qui un jour à choisi d’écrire Lafitte ou Lartigue...

Je regrette de dire que ce sont là propos de discussions d’après boire, peu
pertinents sur le fond. L’écrit, même aujourd’hui, est le fait d’une
minorité ; autrefois, les "clercs", qui avaient appris les lettres en latin.
Sa remarque est juste, certes, mais ne change rien au fait que les clercs de
Gascogne ont écrit Lartigue et La Fiite parce que telle était la
prononciation gasconne. Halip lui-même a écrit des choses très pertinente
sur le vocalisme gascon en "e", et ce que je rappelle est tout à fait
cohérent avec cela.

C’est l’occitanisme moderne qui a rétabli le -a disparu de l’écrit gascon
ancien dès le XIIe s. à Bayonne, un peu plus tard ailleurs ; ce -a est en
effet voulu comme graphie » englobante » d’un occitan standardisé de Bayonne
à Nice. Mais c’est soumettre le gascon aux impératifs d’une Occitanie à
construire (Sauzet), alors que Halip a fait sienne, comme moi-même, cette
phrase du Pr. Tomás Buesa Oliver de l’université de Saragosse :
 » El gascón tiene tal individualidad que no puede subordinárselo al
occitano ».

> Mon esprit est donc formaté par les occitanistes... c’est la meilleure de ces
> derniers jours.

Alors, dis-nous pourquoi tu tiens tant à ce -a occitaniste ?

> Bon, je crois que nous ne sommes plus du tout en phase, Jean
> Lafitte et moi. Autant ses travaux sur le gascon peuvent très souvent être
> sérieux, autant son anti occitanisme lui fait parfois dire des bêtises et ôte
> par la même toute crédibilité à ce qu’il écrit.

Tu affirmes que je dis des bêtises ; les quelles ? en quoi sont-elles des
bêtises ?
Je tiens en outre à rétablir l’ordre des facteurs : j’ai été occitaniste à
mes débuts, n’ayant aucune raison de ne pas croire ce qu’on me disait quand
j’ai adhéré à l’I.E.O.-Paris en 1982. Je crus donc tout ce qui me fut dit
des "poupées russes" qu’étaient le béarnais, le gascon et l’occitan. J’eus
aussi la naïveté de croire que mon appartenance à un » Institut d’études »
m’autorisait, et plus encore me faisait un devoir d’effectuer des études sur
ma langue ancestrale, et même un "devoir d’état" lorsque le président me
demanda d’assurer un cours de gascon à partir de 1989.
Je fus alors affecté du syndrome de la "gasconite" qu’un jeune et brillant
professeur originaire de Luchon décrivait ainsi en 1994 : » Nous sommes
d’une génération qui a grandi avec l’idée que l’Occitanie, telle qu’on nous
la représente sur les cartes, était une évidence. Mais plus j’avance dans
l’étude de notre langue et de notre histoire, plus je me sens
irréductiblement Gascon. »
Je ne pense pas qu’il en soit différemment de Halip.
C’est donc ma réflexion sur des faits de langue et de société gasconne
d’aujourd’hui qui m’a conduit à rejeter l’occitanisme. Et non le contraire.
Tout comme je rejette le béarnisme fermé sur lui-même.

> C’est bien dommage car son travail aurait pu servir utilement la cause
> gasconne.
> Elle la dessert par son côté de plus en plus réactionnaire et négatif. On
> n’est jamais aussi bien trahi et déçu que par ceux qu’on a appréciés.

Encore le mot » réactionnaire » qui ne devrait pas avoir sa place dans un
débat linguistique. En cela, Halip, tu me déçois, toi aussi. Mais je ne te
rejette pas, car j’ai eu maintes fois l’occasion d’apprécier ton
intelligence. Mais tu devrais veiller à ce qu’elle ne soit mise au silence
par tes sentiments de déception devant un monde qui n’est pas ce que tu
aimerais.

Sur le fond, je dessers la cause gasconne si je dis des erreurs ; qu’on me le
montre, et je changerai de discours, et publiquement. Mais jusqu’à présent,
j’estime que, de bonne foi certes, les occitanistes béarnais, qui ont tant
fait pour la cause gasconne, l’ont aussi deservie en l’enfermant dans le
monde occitaniste, esentiellemnt peuplé d’enseignants. Lapassade en était
conscient, mais trop vieux pour réagir.

Amicalement à tous ceux qui aiment la langue gasconne, occitanistes ou non,
en souhaitant qu’ils mettent toujours en avant l’écoute des autres et la
raison.

J.L.

Grans de sau

  • A propos des liens entre occitanisme et milieu enseignant, il y a
    effectivement du vrai dans l'avis de Jean Lafitte. Seulement, je ferai
    attention à faire une nette distinction entre instituteurs,
    enseignants de matière optionnelle, universitaires, ...

    Il est indéniable que la recherche linguistique a été captée par des
    universitaires. Cela dit, c'est là le propre de la recherche ! En
    fait, la différence se trouve que la langue gasconne avait jusque là
    était le sujet de prédilection des autodidactes. Si l'on excepte
    quelques grandes pointures de l'avant-guerre ( Luchaire, Raymond... ),
    les grands travaux de lexicologie ont été réalisés par des "hommes du
    cru", toujours soucieux de rendre leur travail accessible, quitte à
    faire des entorses à une méthode rigoureusement scientifique qui
    d'ailleurs n'existait pas ( il faudra attendre l'Ecole de Toulouse ).

    La question qu'il faut se poser n'est pas celle de la captation par
    les universitaires de la question linguistique, il me semble qu'il
    s'agit là d'un phénomène normal et inéluctable. La question est plutôt
    de connaître les raisons précises qui ont jeté de très éminents
    chercheurs dans les hypothèses occitanistes. A cette question, je n'ai
    de réponse que l'importance de la formation par un professeur
    référent, qui qu'on le veuille ou non, influence durablement le mode
    de pensée.

    Je ne suis que de trop loin les travaux actuels. A vue de nez, ils me
    semblent plutôt médiocres, si j'en juge les titres. Disons que des
    dizaines de thèses sur la standardisation de l'occitan, ce n'est guère
    excitant à mes yeux. Rien en comparaison de ce que peuvent fournir les
    Etudes Basques de Bordeaux ou Bayonne. Pour une idée de la vitalité
    actuelle :

    http://artxiker.ccsd.cnrs.fr/

    Maintenant, il est certain que Jean Lafitte faisait allusion au
    phénomène sociologique qui voit, d'après lui, le milieu enseigant se
    faire le chantre de l'occitanisme. Je ne ferai que faire état de ma
    propre expérience :

    1. Il me semble que le milieu de l'enseignement primaire est
    vigoureusement hostile à l'occitanisme. Sans généraliser, il y a dans
    l'école primaire un fond d'égalitarisme républicain qui s'accommode
    mal de la philosophie occitaniste. Par contre, j'ai remarqué une chose
     : les instituteurs sont toujours du cru ( mode de recrutement des IUFM
    ) et à ce titre, souvent très sensibles à la culture locale non
    institutionnalisée. En Béarn, il n'est pas rare que les fêtes de fin
    d'année rendent hommage à la "culture béarnaise", ...

    Donc, pour résumer, une école primaire ancrée dans sa géographie, mais
    revêche à tout séparatisme.

    2. C'est moins clair en collège-lycée. Les pauvres profs d'occitan qui
    se démènent ont toute ma sympathie. Ils sont loin d'endoctriner les
    masses estudiantines ! J'ai aussi remarqué un dédain de la part de
    certains professeurs à l'égard de leurs confrères enseignant
    l'occitan. Une anecdote : un professeur d'occitan faisait la promotion
    de sa matière en cours de français. Le professeur de français, après
    intervention de son collègue, conteste les arguments de celui-ci, alla
    même jusqu'à remettre en cause l'idée de langue occitane. Sans grands
    arguments je l'avoue, mais avec des petites choses marquantes : "Le
    Béarn, c'est plus proche des Anglais" par exemple.

    Tout cela concerne la sociologie du milieu enseignant. Il n'y a rien
    d'étrange : la situation vis-à-vis de l'occitanisme est fonction de
    considérations plus globales. Je peux dire que la haine de l'itinérant
    occitan est assez généralisée.

    Mais là encore il ne s'agit pas de ce à quoi Jean Lafitte faisait
    allusion. Jean Lafitte n'affirme pas que le milieu enseignant est
    acquis à l'occitanisme mais que l'occitanisme est le fait
    d'enseignants, aussi minoritaires soient-ils dans leur propre corps.
    J'y vois là une illusion d'optique : si les occitanistes sont nombreux
    à être enseignants, c'est que les autres n'y sont pas. Et si les
    autres n'y sont pas, c'est qu'ils ne sont pas sentis concernés par
    cette aventure ou alors n'ont pas eu l'occasion.

    L'intellectualisation du régionalisme a toujours été l'affaire
    d'élites locales. Il y a un monde entre le petit patriotisme du paysan
    gascon, en fait qui défend sa terre, et la vision nationaliste des
    félibres ou des occitanistes. J'affirme haut et fort que félibrige et
    occitanisme sont une même continuité, l'élite littéraire ayant été
    remplacée par l'élite enseignante, pour des raisons institutionnelles.
    Pourquoi cela ? Car depuis l'après-guerre, l'individu attiré par les
    questions intellectuelles va croire ne pouvoir trouver satisfaction
    que dans l'enseignement. Ainsi, des personnes "génétiquement"
    déterminées ont opté pour l'enseignement. Autrefois, elles auraient
    été de ces paysans poètes, de ces chansonniers libertaires, de ces
    hommes politiques locaux, ... Parfois ceux-ci auraient fait docteur.
    Mais l'effort de 1946 a fait qu'immanquablement, toutes ces personnes
    ont été dirigées vers l'enseignement, et ceci le plus tôt possible (
    sélections dès la seconde pour les Ecoles Normales, recrutement avec
    seulement le BAC pour certains professeurs ).

    Voici l'illusion : le mouvement régionaliste, autrefois divers, a vu
    ses héritiers philosophiques intégrer le monde enseignant, amenant
    avec eux la sociologie de groupe de leur nouveau corps. D'où
    l'évolution du régionalisme, des félibres aux occitanistes. C'est un
    dégât collatéral de la modernisation du pays. Et n'est en rien le
    fruit d'un complot d'où, je pense, la nécessité de dédramatiser la
    polémique.

    NB : Il va sans dire que je peux difficilement masquer une certaine
    sympathie pour le milieu enseignant, que je trouve dans son ensemble
    ouvert. L'envie de le dédouaner est sans doute trop forte de mon côté,
    pour raisons familiales. L'idée que les dérives de l'occitanisme sont
    aussi le fait de petits roitelets locaux m'est assez familière. Et
    puis, aujourd'hui, ce sont les artistes qui portent l'occitanisme : on
    ne le dit pas assez. Ecrivains, chanteurs, ... C'est une mutation tout
    à fait primordiale.

  • Selon LAFITTEJann <LAFITTEJann@wanadoo.fr> :

    Je vais définitivement clore le débat. Jean, nous nous connaissons depuis 15 ou
    16 ans. Nous nous rencontrâmes à Biscarrosse au printemps 1991 et je fus
    d'emblée enthousiasmé par tes travaux. Enfin une réflexion argumentée et
    pertinente sur le gascon face à l'occitanisme, me suis-je dit. Depuis, je n'ai
    cessé de te soutenir, contre vents et marées, en me créant bien des inimitiés.
    Alors aujourd'hui, la déception est à la hauteur de l'enthousiasme jadis.
    Tu parles d'attaques personnelles...mais qui de nous deux attaque ? Je lis tous
    tes messages sur ce forum et tes piques, tes saillies contre les
    fonctionnaires, surtout ceux de l'éducation, sont assez récurrentes, ainsi que
    ton discours poujadiste qui m'est proprement insupportable. Comme je suis le
    seul de la catégorie à participer aux discussions, je le prends pour moi. Donc,
    ne t'étonnes pas que le berger tchanqué réponde à la bergère béarnaise, après
    avoir fait preuve de beaucoup de patience. D'autre part, j'enseigne à mes
    élèves la graphie que tu préconisais, je dois être le seul. Effectivement je
    crois, et tu as raison de parler d'acte de foi, que le seul petit avenir pour
    notre langue est un gascon unifié autour des dialectes les plus conservateurs
    du sud-ouest, ceux qui se situent au sud et à l'ouest de la dernière isoglosse.
    Tu parles aussi de main-mise des enseignants sur la langue. A qui la faute ?
    Ce que je regrette en fait c'est que ton anti-occitanisme, justifié sous bien
    des aspects, prenne aujourd'hui le pas sur le reste de ton travail. Je crois
    que tout le monde a saisi le danger du dogme occitaniste, maintenant il faut
    avancer et ne pas sombrer dans le règlement de compte idéologique. Les
    occitanistes sont passés à côté, certes, tout comme les félibres. Tu les
    critiques avec raison mais tu fais preuve de beaucoup de mansuétude vis à vis
    des Etats français qui se sont succédés depuis 500 ans et qui, à mon sens, ont
    une responsabilité bien plus lourde quant au massacre consciencieux et
    systématique des cultures évoluant sur leur territoire. Tu critiques souvent la
    fonction publique, l'utilisation des deniers publics, mais il faut alors en
    faire autant de la France, quant à sa responsabilité historique. Je n'ai
    évidemment pas conservé ces messages mais tout le monde les a lus. Voilà, nous
    ne sommes pas d'accord sur les causes du mal et ce ne sont pas uniquement des
    solutions graphiques qui vont résoudre le problème. J'ai fait chez moi le
    minimum vital, c'est à dire que j'ai transmis la langue à ma fille. Elle en
    fera ce qu'elle voudra, vraisemblablement pas grand chose, mais j'aurais au
    moins accompli ce devoir de fidélité patrimoniale. D'autre part, j'ai choisi un
    métier qui me permet de faire un peu pour que quelques braises rougeoient
    encore. Qui sait si ces braises ne rallumeront pas le feu ? Pas moi, ni toi, ni
    personne. L'Histoire est tellement pleine de surprises. Alors en plus, si ce
    métier me permet de m'installer confortablement dans une salle de classe,
    d'être décemment payé sans me demander chaque jour si les actionnaires,
    réclamant leur retour sur investissement, ne vont pas me jeter dehors, alors
    tant mieux. C'est ce qui s'appelle joindre l'utile à l'agréable. Si tout le
    monde pouvait exercer le métier qu'il aime dans de bonnes conditions, quel
    bonheur ! Mais rassure-toi, le service public d'éducation ne va pas durer autant
    que le marché de Dax, tout comme les autres services publics d'ailleurs. Je ne
    m'en réjouis pas du tout car je pense qu'il est le garant, certes parfois
    imparfait, d'une certaine égalité dans notre pays.
    Enfin, il n'était pas nécessaire d'invoquer l'O.A.S. pour apporter de l'eau à
    ton moulin, je ne pense pas que mes attaques étaient à ce point féroces. Nul
    besoin de te justifier sur ce terrain.
    Voilà, c'est un peu brouillon car je n'ai pas ton talent de rhéteur. Je ne
    participerai plus à aucune polémique négative et inutile, j'allais dire
    stérile. Comment écrivaient nos ancêtres ? Doit-on mettre un accent aigü ou
    circonflexe ? Face au naufrage annoncé, ces questions me semblent de plus en
    plus futiles. Parlons, écrivons, transmettons...le reste n'est que littérature,
    au mauvais sens du terme.

    Philippe Lartigue

  • Bonjour,

    La "profession de foi" (!) de Philippe Lartigue est bien pathétique.
    Coincé entre l'enclume et le marteau, il se pose des questions
    existentielles dont je comprends qu'elles l'amène dans une impasse,
    parce qu'il refuse (comme moi) de prendre parti entre deux extrêmes,
    qu'il refuse cette alternative que l'on voudrait nous imposer. La
    déviance idéologique frappe des deux côtés, aussi bien de l'enclume
    que du marteau, et come lui je le regrette.

    Pour avoir mis un bout de doigt dans cet engrenage idéologique, je
    reconnais son dilemme et je refuse aussi cette alternative qui nous
    offre le seul choix entre un anti-occitanisme (en même temps anti-
    basque) localement un béarnisme traditionnaliste (qui rejoint le
    discours d'extrême-droite) et l'occitanisme "impérialiste" et
    gauchiste.
    D'un côté c'est le Souvenir Français devenu Souvenir Béarnais ou
    Souvenir Gascon, aux accents fascisants, qui défend le souvenir d'un
    mort idéalisé : le langage d'autrefois.
    De l'autre côté c'est l'"alliance objective" de l'occitanisme
    activiste avec l'ETA (où ce qu'il en reste, et qui n'a plus rien à
    voir avec la fameuse organisation anti-franquiste), où l'on défend
    l'indéfendable. On se partage les territoires ... et les
    subventions : à toi l'Euskadi à moi l'Occitanie. Le reste n'existe
    pas, ou si peu.

    Jean Lafitte, vous vous battez certes honorablement pour embaumer le
    cadavre, mais vous semblez ne pas sentir les odeurs qui nous
    viennent de la plume d'Alexis Arrête-Lendresse, et qui empuantissent
    la poésie de la langue. Le relents ne passent donc pas votre porte ?
    J'ai du mal à le croire.

    Pour conclure, je défends toujours l'idée, que je pensais centrale
    dans ce forum, d'une réalité que je ne sais pas définir autrement
    que celle des "pays vascons", où l'on parle le français, l'espagnol,
    le basque, le gascon ou le béarnais.

    Adishatz

    A.L.

  • Adishatz & kaixo !

    Le Mardi 24 Octobre 2006 09:30, Alain JB Lalanne a écrit :

    > De l'autre côté c'est l'"alliance objective" de l'occitanisme
    > activiste avec l'ETA (où ce qu'il en reste, et qui n'a plus rien à
    > voir avec la fameuse organisation anti-franquiste), où l'on défend
    > l'indéfendable. On se partage les territoires ... et les
    > subventions : à toi l'Euskadi à moi l'Occitanie. Le reste n'existe
    > pas, ou si peu.

    Continuons à mesurer nos mots.
    L'occitanisme peut converger avec le nationalisme basque, notamment parce que
    les deux sont très axés sur la défense de la langue. Les nationalistes
    basques y réussissent beaucoup mieux, mais c'est un autre débat.

    De plus, certains occitanistes (pas tous, loin de là) développent un projet
    autonomiste ou nationaliste fondé sur l'idée que la langue fait un peuple, et
    qu'un peuple doit être libre.
    C'est respectable, même si ce n'est pas forcément opérationnel.

    Mais l'autonomisme et le nationalisme peuvent être non violents,
    heureusement !
    Il faut donc rejeter l'amalgame nationalisme basque=ETA.

    L'indéfendable n'est pas de défendre le droit du pays basque à l'indépendance.
    C'est de le faire par la violence, alors que, en démocratie, une volonté
    majoritaire d'indépendance peut normalement aboutir par le suffrage
    universel. Ou alors, on n'est pas vraiment en démocratie...

    Pour être plus concret, je pense que tu as en tête, Alain, des accords passés,
    dont j'ai vaguement eu connaissance, où les occitanistes cessaient de
    revendiquer Bayonne comme occitane, en échange de je ne sais quoi.
    Pour ma part, je refuse de céder sur la gasconitat de Bayonne, tout en
    acceptant que cette ville ait une appartenance multiple, notamment "sharnege"
    ou vasconne.


    > Pour conclure, je défends toujours l'idée, que je pensais centrale
    > dans ce forum, d'une réalité que je ne sais pas définir autrement
    > que celle des "pays vascons", où l'on parle le français, l'espagnol,
    > le basque, le gascon ou le béarnais.

    Je pense toujours que la Gascogne doit s'affirmer "vasconne".
    L'effacement de la langue gasconne enlève à la Gascogne le ciment qui l'a unie
    pendant un millénaire, et lui fait perdre un trait identitaire important.
    Sans la langue, la différence gasconne devient faible par rapport à
    l'Occitanie voisine.
    La Garonne n'est plus, depuis longtemps, une frontière nette.
    L'appartenance à la Vasconie est un moyen d'affirmer sa différence, donc
    d'exister. Et ce n'est pas qu'un artifice. Plutôt un retour aux sources qui
    est rendu particulièrement opportun par le contexte présent.

    Maintenant, il ne suffit pas de répéter "nous sommes vascons", mais de
    concrétiser cette appartenance sur le terrain, notamment sur le plan culturel
    (langue, chanson, échanges...).
    Mais je pense que le minimum est d'être solidaire des basques qui luttent pour
    sauver leur langue, leur liberté, leur mémoire.
    Etre solidaire, c'est par exemple prendre la parole pour contrer une
    diabolisation injuste du nationalisme basque. C'est un peu ce que je fais
    maintenant.
    Etre g(v)ascon, c'est faire que les basques se sentent moins étrangers en
    Gascogne. A l'heure où ils sont nombreux à venir en week-end ou en vacances,
    depuis l'Hegoalde (pays basque sud), je pense qu'il y a des choses à faire...
    Pour ce qui est des basques d'Iparralde, je pense que nous avons aussi
    beaucoup à leur dire, parce qu'il connaissent souvent presque aussi mal la
    Gascogne que les autres français. Ils la connaissent certes sur le terrain,
    mais ne la conceptualisent pas comme nous le faisons...

    Agur bero bat Tonensetik !
    Tederic

  • Selon Tederic Merger <tederic@gasconha.com> :

    Quand on est face à un Etat qui ne réagit qu'aux manifestations de violence, qui
    n'accorde d'attention qu'aux brutaux, étant brutal lui même (très hypocritement
    pour la France, qui présence toujours ses turpitudes comme des vertus,
    parce-que françaises, et veut sans cesse en remontrer au reste de l'Humanité),
    quelle est l'alternative ? Les Etats-Nations ne sont sensibles qu'aux rapports
    de force, et l'Etat français le premier. Je le regrette mais c'est comme ça.
    Croyez-vous vraiment que les Basques auraient obtenu quoi que ce soit sans la
    violence ? Croyez-vous naivement que l'Etat espagnol aurait accordé tout ce
    qu'il a accordé par pure bonté ? Vous rêvez ? Ce qu'obtiennent les Basques du
    Nord, et qui nous paraît si merveilleux, ne sont que les miettes du gâteau
    méridional et est dû à la crainte qu'éprouve l'Etat français, et ce
    qu'obtiennent les gascons, surtout dans le 64, ne sont que les miettes des
    Iparraldeak...il n'y a pas de quoi pavoiser.
    Or, les Basques ne sont pas de simples Espagnols du Nord, ils sont une nation
    avec un conscience très forte de leur identité. C'est justement ce qui agace
    certains ici, même sur ce forum, et ce qui agace en général car cette forte
    personnalité a bien sûr des aspects agaçants. Mais nous n'allons tout de même
    pas traduire toute notre frustration d'être nuls par une simple dénonciation
    des Basques. En Gascogne, je veux dire dans la France du Sud-Ouest, il y a une
    écrasante majorité de Français du Sud-Ouest et très peu de Gascons. Notre
    objectif doit être de réintroduire un peu d'identité nationale. Les peuples ne
    survivent que parce qu'ils le méritent, je ne suis pas certain que ça soit le
    cas des Gascons. Si la France croit que le sacrifice des nations de son
    territoire va la sauver, elle se trompe lourdement. En matière d'Histoire rien
    n'est éternel, surtout pas les constructions politiques, par essence éphémères,
    et la France n'échappera pas à la règle, même sur les ruines fumantes de la
    Gascogne et des autres nations vaincues.

    Philippe Lartigue

  • Adiu Helip,

    Mais accepterais-tu de sacrifier ta vie professionnelle, ta vie familiale et
    tout le reste pour te lancer dans des actions violentes dont le résultat final
    n'est que très aléatoire ?
    De plus, comme presque personne n'est au courant de sa gasconnité, c'est un
    moyen de rester un long moment derrière les barreaux.

    Oui, l'état français a été violent dans le passé pour s'imposer et lui comme ses
    serviteurs ont réussi à nous effacer. A mon niveau, je tente de rétablir notre
    véritable histoire dans toute sa complexité et je ne cacherai pas par exemple
    que des Gascons (surtout les Gascons "orientaux") ont bien soutenu les Français
    contre les Gascons "Anglais" pendant la guerre de Cent ans...

    Je le répète : ce que vivent les Basques de l'autre côté de la frontière est une
    tout autre histoire. Leur vécu n'a rien à voir avec le notre. Et tout n'est pas
    rose dans le nationalisme basque "du sud" : il faudrait se rappeller qu'il existe
    un
    climat de persécution et de crainte pour ceux qui ne sont pas nationalistes et
    même pour les pro-PNV (parti nationaliste basque) dans pas mal de localités
    d'Euzkadi. Que je sache, les
    nationalistes catalans se sont imposés sans verser le sang. Aucune cause ne vaut
    assez pour imposer un tel climat à toute une société, surtout quand le
    territoire concerné a le libre droit de vote.

    Et il n'y a pas de quoi pavoiser au sujet de la situation du Labourd, de la
    Soule et de la Basse Navarre. Ces deux dernières régions sont sous-peuplées et
    peu riches puisqu'elles vivent les problème de nombreuses zones rurales. Et la
    côte basque
    ne l'est plus que de nom. En effet, les basques d'origine y sont en minorité,
    même avec l'appoint de basques "espagnols", et l'essentiel de la population
    est formé de Français "du nord" et autres retraités...

    J'en ai d'ailleurs parlé très récemment au téléphone avec Jean Elizatchar,
    ancien prof de
    basque à la fac de Bordeaux, et il m'a bien confirmé que sur les 300 000
    habitants du Pays Basque "français", les Basques étaient en minorité et
    formaient avec peine la moitié de ce chiffre.

    Si les basques "du nord" paraissent dynamiques, c'est qu'un peu plus de
    personnes s'intéressent au basque et à son identité grâce au nationalisme "du
    sud". Mais il ne faut pas s'illusionner par cette apparente meilleure santé des
    basques "du nord" face aux gascons. Le dynamisme "basque" du "nord" est surtout
    touristique avec plein de drapeaux basques de Sabino Arana partout... et il est
    avant tout sous perfusion du nationalisme basque "du sud". Par exemple, lors
    des manifestations à Bayonne en faveur de la création d'un département basque,
    les nationalistes basques "du nord" ont le plus grand mal à mobiliser des
    troupes, si bien que de nombreux cars venant du sud viennent combler les
    nombreux vides.

    Le nationalisme basque "du nord" arrive en moyenne à 10% des votes (parfois
    plus s'il s'agit d'une personnalité connue localement) aux élections locales et
    il a un conseiller général élu dans l'une des zones rurales qui sont fatalement
    plus
    "basquistes" vu la composition de la population. Ce n'est donc pas un hazard si
    les maires des communes littorales (dont Alliot-Marie) sont opposés au
    département basque au contraire de la majorité des maires ruraux de l'intérieur.

    Le seul parti nationaliste d'importance au nord est "Abertzalen Batasuna", un
    parti qui est à gauche, comme son nom l'indique, plus ou plus moins proche du
    Batasuna "du sud" (soutiens de l'ETA) bien que certains de ses membres
    n'apprécient plus trop que "les frères du sud" s'arrogent régulièrement le
    droit de décider pour eux. Les partis "du sud" qui ont tenté de s'implanter au
    nord, tels que le Parti nationaliste basque (PNV) ou EA n'ont pas dépassé une
    audience confidentielle. Il faut d'ailleurs remarquer que ces deux partis
    nationalistes basques dits "modérés", au pouvoir en Euzkadi depuis 1978 sans
    aucune interruption, sont aussi quasi inexistants en Navarre où les seuls
    nationalistes présents obtenant des élus sont les proches d'ETA. Il est à
    croire que quand les basques sont en position de faiblesse, les seuls
    représentants du nationalisme sont alors les plus radicaux.

    Ceci dit, avoir un parti nationaliste gascon qui ferait 10% des suffrages serait
    sûrement une révolution, mais il existe trois handicaps principaux entre autres :
    nous ne sommes pas voisins d'une forte entité du type de l'Euzkadi - le Val
    d'Aran ne peut sérieusement pas jouer ce rôle vu sa faible population et sa
    taille-, notre langue n'est pas une langue aussi spécifique que le basque, enfin
    le territoire que nous
    devons couvrir est à peu près 12 fois plus grand que le (petit) Pays Basque Nord
    (et le Pays Basque sud n'est aussi pas bien grand).

    Sans
    parler de la division droite/gauche et des subdivisions internes à ces deux
    tendances, le fait que tous les médias qui forment l'opinion sont tous à Paris
    (et
    pas ailleurs) et que les gens ne réfléchissent aux problèmes qu'au travers
    d'eux.
    Bref, il ne faut pas se croire dans un autre Etat. Ou alors, il faut organiser
    des voyages régulièrement pour voir "l'exemple" basque, comme le faisaient ou
    le font des occitanistes en Catalogne, ou surtout le faisaient les communistes
    français
    en URSS et dans le bloc de l'est ou bien encore les maoïstes français des années
    70 en
    Chine. Est-ce que cela changeait pour autant la situation française en leur
    faveur ?
    Il ne semble pas que oui.

    Amistats,

    Guilhem

  • Selon Guilhem Pépin <gaifier@free.fr> :

    Bien sûr que non, je ne suis pas prêt à un tel sacrifice ! Alors ceux qui ont le
    courage de le faire, ceux qui mettent en adéquation leurs actes et leurs
    opinions ont tout mon respect.

    Philippe Lartigue


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